Les défis de la logistique dans une industrie en changement


Édition du 08 Novembre 2023

Les défis de la logistique dans une industrie en changement


Édition du 08 Novembre 2023

Par François Normand

Pendant 8 jours, le trafic maritime dans le corridor qui relie Montréal à Niagara, en Ontario, par un système d’écluses, a été interrompu. (Photo: 123RF)

LOGISTIQUE. La grève qui a récemment affecté la voie maritime du Saint-Laurent montre à quel point la chaîne logistique des entreprises québécoises peut être parfois fragile, malgré la fin de la pandémie de COVID-19. De façon générale, l’instabilité actuelle pousse plusieurs entreprises à prendre les devants afin de limiter des risques de toute nature.

Pendant 8 jours, le trafic maritime dans le corridor qui relie Montréal à Niagara, en Ontario, par un système d’écluses, a été interrompu. Cette situation a retardé les approvisionnements, la production et la livraison de plusieurs entreprises au Québec et ailleurs au Canada.

Heureusement, ce type de perturbation est peu fréquente, la chaîne logistique des entreprises du Québec étant moins perturbée depuis environ un an, disent les spécialistes.

Interviewé avant cette grève, Louis Veilleux, PDG du Groupe Mundial, qui possède trois entreprises spécialisées dans l’usinage du métal et de pièces (Métal Bernard, CDMB et Normandin), confirme que la situation s’est améliorée, notamment sur le plan des frais de transport, qui ont diminué.

En revanche, comme la plupart des entreprises au Québec, Groupe Mundial pâtit encore de la pénurie de main-d’œuvre, insiste le patron de la société, dont le siège social est situé à Saint-Lambert-de-Lauzon, dans la région de Chaudière-Appalaches.

« Il manque encore de camionneurs dans l’industrie », déplore l’entrepreneur, en précisant que cette situation a incité les trois entreprises du groupe à s’adapter pour en limiter l’effet sur leurs activités.

Par exemple, au lieu de faire affaire avec plusieurs transporteurs routiers, les trois PME préfèrent miser sur un nombre restreint de transporteurs, qui deviennent ainsi davantage des partenaires que des fournisseurs de services. « Avec cette approche, on veut réduire le gaspillage d’espaces non utilisés dans les camions, ce qui nous permet d’être plus efficaces, de réduire nos coûts de carburant et de diminuer nos émissions de gaz à effet de serre », explique Louis Veilleux.

 

Les entreprises sont plus résilientes

Le Groupe Mundial n’est pas la seule organisation à vouloir être plus efficace.

Depuis un certain temps, Jacques Roy, professeur au Département de gestion des opérations et de la logistique à HEC Montréal, observe que plusieurs entreprises au Québec et ailleurs en Amérique du Nord sont plus résilientes, notamment au chapitre des approvisionnements.

« Dans certains cas, on a réagi en achetant plus tôt et en augmentant les stocks. Résultat, le ratio des stocks aux ventes est relativement élevé, notamment par rapport aux États-Unis », dit-il.

Toutefois, le spécialiste en transport fait remarquer que cette pratique peut se révéler coûteuse, les taux d’intérêt connaissant une augmentation. Quand une entreprise accroît ses espaces de stockage, elle finance souvent ce projet à l’aide d’un prêt.

Par ailleurs, Jacques Roy confirme que les frais de transport internationaux — maritime et aérien — ont diminué. Ils demeurent toutefois élevés par rapport à la situation qui prévalait fin 2019-début 2020, avant le début de la pandémie.

C’est le même son de cloche du côté de Mathieu Charbonneau, directeur général de CargoM, la grappe de logistique et de transport dans la grande région de Montréal.

Selon lui, les acteurs et le secteur de la logistique sont « très résilients ». Malgré tout, ils font face à plusieurs problèmes criants, à commencer par la pénurie de talents, et ce, tant sur le plan de la chaîne logistique que sur celui du fabricant.

« L’enjeu de la main-d’œuvre est aussi exacerbé par l’augmentation des besoins [à cause du] commerce électronique », qui requiert une multiplication de livraisons à la carte, souligne Mathieu Charbonneau.

Selon lui, les entreprises sont aussi confrontées à des limites au chapitre de l’entreposage. « Il y a beaucoup de stock accumulé déjà dans les entrepôts, dit-il, et il y a un manque d’espace. »

 

Mutualiser les espaces pour réduire la pression

Une des solutions passe par la mutualisation des espaces d’entreposage dans la grande région de Montréal. CargoM aide déjà des entreprises à le faire grâce à un registre en ligne, mettant en contact les organisations qui ont un excès d’espace avec celles qui en manquent.

CargoM a lancé cet outil durant la pandémie, alors que plusieurs organisations avaient désespérément besoin d’espace pour stocker de la marchandise.

« En raison de l’intérêt marqué des utilisateurs pour cet outil, CargoM souhaite le pérenniser tout en l’améliorant afin qu’il soit plus facile d’utilisation et plus accessible », explique Mathieu Charbonneau.

À ses yeux, plusieurs autres choses peuvent être faites pour renforcer la logistique et les chaînes d’approvisionnement au Québec. Par exemple, sur le plan de la main-d’œuvre, l’industrie doit mieux promouvoir son secteur, ses métiers et ses formations, question de se rendre plus attrayante. 

Les entreprises spécialisées en logistique doivent aussi automatiser davantage leurs activités. 

Par exemple, Transport Robert a construit un centre de distribution automatisé à Varennes, sur la Rive-Sud, dans la région de Montréal, pour des produits frais et des produits surgelés. On parle d’un projet de 150 millions de dollars.

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