(Photo: 123RF)
BLOGUE INVITÉ. Bien qu’il soit encore trop tôt avant de tirer des leçons bien précises des répercussions long terme de la pandémie sur notre société, nous commençons déjà à voir certaines tendances sortir du lot.
Pour ma part, je constate que cette pandémie n’a fait qu’accélérer de profonds changements qui étaient déjà en cours depuis quelques années. Une évolution qui aurait, normalement, pris cinq à dix ans, a finalement été «turboboostée» en quelques mois pour toutes les raisons que l’on connaît.
Les deux tendances qui ressortent grandes gagnantes à ce jour sont ironiquement diamétralement opposées. D’un côté, notre relation avec la technologie s’est ancrée encore plus profondément dans notre quotidien, de l’autre, nous avons redécouvert l’importance de l’humain.
En effet, du télétravail à l’explosion du commerce en ligne en passant par la télémédecine ou les commandes de repas ou d’épicerie sur les multiples applications existantes, notre relation à la technologie est devenue, du jour au lendemain, obligatoire et essentielle!
De l’autre côté du spectre, l’obligation de devoir numériser notre vie et de limiter, voire proscrire, nos interactions avec les autres a eu un effet catalyseur de l’importance et surtout de notre besoin essentiel de relations humaines.
Ces changements drastiques ne font qu’accentuer mon argument de l’importance, de la part de nos gouvernements, de se doter d’un ministère du numérique 4.0.
Devant naviguer dans un univers où l’innovation avance à une folle cadence, ce ministère doit absolument évoluer en respectant le même tempo que les entreprises qui ont fait en sorte qu’il existe.
Nous sommes tous témoins, depuis quelques années, de la puissance des géants mondiaux de la technologie qui, grâce à leurs innovations, à leurs moyens financiers hors du commun et à leurs milliards de consommateurs quotidiens assidus, imposent, lentement mais sûrement, de nouvelles normes sociétales. Qui aurait cru, il y a à peine 10 ans, que les GAFA (Google, Apple, Facebook, Amazon) de ce monde auraient une influence aussi omniprésente sur notre vie.
Il existe, depuis quelques années, autant au provincial qu’au fédéral, un ministère du numérique. Cependant, leurs principaux objectifs sont majoritairement orientés envers la transformation interne des processus de l’administration publique, à l’accès aux citoyens et à faire évoluer le lourd appareil gouvernemental vers le 21e siècle.
Bien que l’objectif soit louable et très important, cette transformation arrive avec une vingtaine d’années de retard. Pour rire un peu, c’est un peu comme si je vous disais que l’une des priorités du ministère de l’Environnement était d’évaluer si nous devrions arrêter le chauffage au charbon! Il est bien entendu primordial de rattraper notre retard, mais il faut surtout tout faire afin de reprendre un certain contrôle dans un monde dont les pratiques font souvent beaucoup plus penser au Far West qu’à Wall Street.
Pour tout vous dire, la dernière fois que le Québec a eu un dossier aussi crucial pour son avenir c’était en 1963 lors de la deuxième nationalisation d’Hydro-Québec. René-Lévesque, alors ministre dans «l’équipe du tonnerre» du Gouvernement Lesage, avait, dans un discours, souligné l’importance de mettre fin à «un fouillis, invraisemblable et coûteux» afin de me mettre en place une réforme qui contribuera à «un aménagement rationnel de notre économie».
Malgré la différence d’acteurs, d’univers et d’époques, les parallèles à faire sont nombreux entre les raisons derrière la création d’Hydro-Québec et les raisons d’agir plus rapidement et plus fortement au niveau numérique.
Pour conclure, je crois que nous devrions nous inspirer de la ministre numérique de Taïwan, Audrey Tang. Plutôt que de reprocher tous les problèmes de la planète à la technologie, sa vision, beaucoup plus positive et constructive, est basée sur la prémisse que la technologie est le meilleur allié d’un gouvernement afin de bâtir une relation de confiance avec ses citoyens, de lutter contre la désinformation et de renforcer la démocratie. Comme quoi parfois, il suffit d’inverser la croyance générale afin de voir la problématique sous une nouvelle perspective!