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Au travail, nous nous attendons à être jugés selon nos mérites, à être reconnus pour nos réalisations, nos talents, nos idées et initiatives personnelles. Mais qu'en est-il en réalité ? Diverses études effectuées récemment par des spécialistes des affaires, de la psychologie et de la sociologie donnent un aperçu de l'expérience collective des femmes en milieu de travail qui vient confirmer certaines notions intuitives et en remettre d'autres en question.
Rémunération: Les dés sont pipés
Selon les derniers chiffres du Bureau américain des statistiques du travail, c'est dans le secteur de la vente que les différences salariales entre les hommes et les femmes sont les plus grandes.
Par exemple, la rémunération des femmes dans le secteur des ventes d'assurance équivaut à seulement 62,5 % de celle des hommes ; elle est de 64,3 % dans le secteur des ventes au détail, et de 66 % dans celui des ventes immobilières. C'est surprenant, compte tenu du fait que la rémunération dans le secteur des ventes a toujours été considérée comme moins politique que les autres, et davantage fondée sur le mérite. Mais dans une étude de deux grandes maisons de courtage, Janice Madden, professeur à la Wharton School, a constaté que les représentantes des ventes gagnaient moins que leurs collègues de sexe masculin parce qu'elles écopaient régulièrement des comptes de moindre importance qui généraient de plus petites commissions et qu'elles n'avaient pas droit à du personnel de soutien, à des mentors ni à d'autres privilèges qui leur auraient permis d'améliorer leur performance. Autrement dit, la rémunération au mérite peut être un moyen de dissimuler une forme de discrimination pure et simple.
Maternité: Toujours pénalisée
Dans une expérience classique sur la discrimination, trois professeurs de sociologie - Shelley Correll, Stephen Benard et In Paik - ont demandé à des étudiants d'université d'évaluer deux candidatures à un même emploi après examen de la documentation les concernant - curriculum vitae, fiche de renseignements personnels et notes tirées d'entrevues de présélection. Après s'être assurés que, sur la foi des dossiers présentés, les candidats étaient également qualifiés, les chercheurs ont modifié ces dossiers pour indiquer que l'un des postulants avait des enfants. Les mères étaient nettement moins susceptibles de voir leur candidature recommandée pour un même poste, et lorsque leur candidature était retenue, elles se voyaient offrir comme salaire à l'embauche 11 000$ de moins en moyenne que les femmes sans enfant.
Les pères n'étaient pas du tout pénalisés. Les évaluateurs, pris en flagrant délit de discrimination fondée sur la situation familiale, ont révélé qu'ils avaient supposé que les mères étaient naturellement moins compétentes et moins engagées.
Choix de carrière: Pour gagner, il faut participer
Lorsque deux professeurs de management, Matthew Bidwell de la Wharton School et Roxana Barbulescu de l'Université McGill, ont fait enquête auprès d'étudiants qui commençaient un prestigieux programme international de MBA d'une durée d'un an, ils ont constaté que les femmes étaient aussi confiantes que les hommes de décrocher un emploi une fois leur diplôme en poche - en gestion générale et services-conseils, mais pas en finance. Ce manque de confiance peut expliquer pourquoi, selon de nouvelles enquêtes menées auprès des participants au programme, moins de femmes présentaient leur candidature à des postes en finance. Toutefois, les femmes qui le faisaient avaient autant de chances que les hommes d'obtenir une offre. Les chercheurs ont découvert que pour les diplômés d'un MBA, les règles du jeu sont exactement les mêmes au départ et concluent : « Rien ne prouve que les femmes soient moins susceptibles de recevoir des offres d'emploi dans l'un ou l'autre des domaines étudiés ».
SOURCE : « DO WOMEN CHOOSE DIFFERENT JOBS FROM MEN ? MECHANISMS OF APPLICATION SEGREGATION IN THE MARKET FOR MANAGERIAL WORKERS », PAR ROXANA BARBULESCU ET MATTHEW BIDWELL, ORGANIZATION SCIENCE, 2012.
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Éthique: Ce n'est pas bien
Oseriez-vous confier un projet de moindre importance à un subordonné talentueux, puis dénoncer ses erreurs pour empêcher qu'on ne l'admire trop ?
Des dilemmes éthiques comme celui-là ont été soumis à la réflexion de 65 femmes et 38 hommes recrutés par l'intermédiaire du service Mechanical Turk d'Amazon. Les femmes étaient beaucoup plus indignées que les hommes par ces décisions moralement contestables - qu'elles ont également jugées moins rentables - dans cette petite mais non moins dérangeante expérience menée par Jessica Kennedy de la Wharton School et Laura Kray de la Haas School of Business.
Hauts potentiels: Qui décroche les meilleurs emplois ?
Les missions qui favorisent l'avancement vont plus souvent aux hommes qu'aux femmes : c'est ce que révèle une étude menée récemment par Catalyst auprès de 1 660 diplômés d'écoles de commerce sur la nature des projets confiés aux employés à haut potentiel. En moyenne, les hommes disposaient d'un budget deux fois supérieur et d'un personnel trois fois supérieur par rapport aux femmes, dans le cadre des projets qui leur étaient attribués. Seulement 22 % des femmes, par rapport à 30 % des hommes, disposaient d'un budget de plus de 10 millions de dollars, et seulement 46 % des femmes, par rapport à 56 % des hommes, étaient investies de la responsabilité des résultats financiers. Qui plus est, plus du tiers des hommes, mais seulement le quart des femmes, ont indiqué que leur emploi leur valait beaucoup d'attention de la part de la haute direction.
SOURCE : « GOOD INTENTIONS, IMPERFECT EXECUTION ? WOMEN GET FEWER OF THE "HOT JOBS" NEEDED TO ADVANCE », PAR CHRISTINE SILVA, NANCY M. CARTER ET ANNA BENINGER, CATALYST, 2012.
Conciliation travail-famille: Pourquoi les femmes renoncent à leur carrière
Les femmes à haut potentiel qui renoncent à leur carrière pour s'occuper de leur famille ne le font pas de gaité de coeur : c'est la conclusion qu'a tirée Pamela Stone, professeur au Hunter College, d'une étude menée auprès de 54 femmes très performantes, recrutées le plus souvent parmi les anciennes étudiantes de quatre collèges et universités de prestige. Ces femmes ont fait carrière pendant onze ans en moyenne ; 60 % d'entre elles ont travaillé bien après la naissance de leur deuxième enfant. Aucune n'a été poussée vers la sortie. Pas moins de 90 % sont parties, non pas pour s'occuper de leur famille, mais à cause de problèmes d'ordre professionnel - sentiment de frustration persistant et trop longues heures de travail, pour l'essentiel. Les deux tiers de celles qui sont parties ont essayé le travail à temps partiel, qu'elles ont finalement jugé problématique : si elles trouvaient les semaines longues auparavant, le temps partiel revenait souvent à travailler 40 heures en étant rémunérée pour 20 heures. Mais ce qui les a incitées encore davantage à quitter définitivement la vie active, c'est l'incapacité de travailler à temps partiel sans être marginalisées.
11 000 $ - L'écart de salaire à l'embauche entre les mères et les femmes sans enfant
60 % - 60 % des femmes travaillaient bien après la naissance de leur deuxième enfant
SOURCE : « OPTING OUT : CHALLENGING STEREOTYPES AND CREATING REAL OPTIONS FOR WOMEN IN THE PROFESSIONS », PAR PAMELA STONE, RESEARCH SYMPOSIUM « GENDER & WORK : CHALLENGING CONVENTIONAL WISDOM », HARVARD BUSINESS SCHOOL, 2013.
90 % - 90 % ont décroché à cause de problèmes au travail
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