(Photo: 123RF)
COURRIER DES LECTEURS. Le curriculum des écoles de commerce et de plusieurs programmes destinés aux cadres supérieurs enseigne principalement aux dirigeants à gérer ce qui se passe au sein de leur organisation ou les facteurs externes qui influent sur elle de manière isolée. Toutefois, il est aujourd'hui attendu des PDG qu'ils soient les instigateurs du changement hors des limites de leur entreprise, d'une façon porteuse pour l'ensemble de la population.
Les connaissances et l'expérience que j'ai acquises au fil des années me font réaliser que ces questions - et les occasions qu'elles recèlent - auxquelles sont aujourd'hui confrontés les chefs de la direction ne sont pas aussi simples à aborder qu'il n'y paraît.
Les dirigeants doivent désormais répondre à de nouvelles attentes. Nous acceptons que les entreprises engrangent des profits, mais nous exigeons également qu'elles contribuent à la société au-delà des dons à des causes méritoires, des galas huppés et des investissements dans des oeuvres de bienfaisance locales lors d'activités d'engagement des employés.
Le «super PDG» de 2019 doit aussi interagir avec un bassin d'acteurs variés pour défendre un point de vue clair sur les enjeux de notre époque. Il ou elle doit être la voix non seulement de son entreprise, mais également de sa collectivité et de ses employés pour faire avancer les questions de société qui leur tiennent le plus à coeur.
Autre exigence : celle de communiquer. Tant à l'interne qu'à l'externe, la communication n'est plus une option pour les dirigeants, elle est devenue un impératif opérationnel. Comme la communication est ma passion, son absence généralisée des programmes de formation pour les membres de direction m'apparaît comme une grave lacune.
Trop souvent, la communication est simplement perçue comme une compétence transversale (ces fameux soft skills) enseignée dans les Facultés des arts plutôt qu'une aptitude essentielle au monde des affaires. Personnellement, j'estime qu'être un communicateur convaincant, un leader authentique et une figure publique influente et inspirante nécessite temps et pratique. Ça vient aussi avec son lot de risques.
La communication n'est pas une expertise secondaire, mais bien un atout stratégique nécessaire pour les dirigeants. Considérez les statistiques suivantes : 75 % des 33 000 répondants du Baromètre de confiance Edelman 2019 font davantage confiance à leur employeur qu'à toute autre entité ou institution, et s'attendent à ce que ce dernier prenne position non seulement sur les enjeux liés à leur industrie, mais également sur des questions de société épineuses. De même, 71 % des répondants à l'échelle mondiale croient que les entreprises et leurs dirigeants ont la responsabilité de résoudre certains problèmes de société et que, pour ce faire, les PDG doivent prendre position publiquement et ouvrir le dialogue avec le gouvernement, les médias, les ONG et d'autres acteurs afin de faire progresser les choses.
Au cours de ma carrière, j'ai formé plusieurs chefs de la direction en vue d'apparitions publiques, de séances de discussion avec leurs employés ou d'entrevues avec les médias. Ce faisant, ils me confient fréquemment que la communication n'est pas une compétence qu'ils ont souvent «pratiquée». Plusieurs sont aussi conscients des nouvelles attentes auxquels ils font face et ils désirent y répondre. Ils souhaitent défendre les causes qui trouvent écho chez leurs employés, leurs clients et leur collectivité, et devenir le point de contact entre le public et le pouvoir. Malgré leur horaire plus que chargé, ils prennent le temps d'aborder les questions qui demeurent sans réponse. Ils essaient de nouvelles choses - publier sur LinkedIn ou Twitter, par exemple - et acceptent de participer à des panels, de parler ouvertement aux médias et de s'adresser à leurs employés en personne. Mais surtout, ils communiquent davantage, et le font à dessein.
Le rôle du PDG a grandement évolué. Ce dernier n'est plus simplement le dirigeant d'une entreprise ; il doit aussi être un communicateur courageux. Quel moment fantastique - et important - pour être le chef de la direction d'une entreprise ! Le monde entier a les yeux rivés vers vous, dans l'espoir que votre influence, vos employés, vos ressources financières, vos produits et vos services seront autant d'outils à mettre à profit pour corriger notre système défaillant. De cette grande responsabilité résultent des occasions à saisir avec enthousiasme par la haute direction. Après tout, qui ne sauterait pas sur l'occasion de transformer non seulement l'organisation qu'il dirige, mais également le monde qui l'entoure ?
Ève Laurier, directrice générale, Edelman Montréal
***
Les propos tenus dans cette rubrique n’engagent que leurs auteurs. Les personnes souhaitant publier une lettre d’opinion dans la rubrique Forum sont invitées à soumettre leur texte à courrierlesaffaires@tc.tc Les propos tenus dans cette rubrique n’engagent que leurs auteurs. Les personnes souhaitant publier une lettre d’opinion dans la rubrique Forum sont invitées à soumettre leur texte à courrierlesaffaires@tc.tc