Un casse-tête chinois
Place dès lors au nouveau casting élitiste, avec «des critères de sélection pour signer avec les plus sérieux, les plus durables et offrant le plus de retombées pour le Québec», nous affirmait-on déjà en mars dernier chez Hydro-Québec.
Reste à voir si le cadre de référence gouvernemental à l'intérieur duquel le producteur d’électricité va devoir gérer ses nouveaux clients issus de la crypto ne risque pas de favoriser les gros joueurs étrangers. Ces derniers n’ont pas forcément pour habitude d’être «bons joueurs».
Une crainte légitime qu'éprouvent de plus en plus les entrepreneurs québécois de la blockchain.
«Je pense que le Chief Operating Officer a rencontré M. Martel la semaine passée», nous a indiqué un directeur d’une «mine» locale quelques jours après avoir reconnu «les gens de Bitmain» à C2 Montréal, la conférence qui réinvente le réseautage.
Contacté par Les Affaires, le fabricant chinois de l’incontournable gamme des AntMiner n’a pas encore dissipé nos interrogations sur ses projets d’expansion officielle au pays.
Constituée au Québec en personne morale depuis janvier 2018, Technologies Bitmain emploierait actuellement moins de 5 personnes pour mener depuis ses bureaux montréalais des «services client et d’ingénierie en centre de données».
Pour les non-initiés à l’univers crypto, brossons un rapide portrait-robot de cette multinationale chinoise controversée car elle brasse des milliards de dollars grâce à des activités aussi complémentaires que conflictuelles pour le libre-marché:
- la fabrication de puces électroniques et de matériel dédiés au mining présentés comme les plus efficients actuellement sur le marché.
- l’exploitation de fermes de minage, de cloud mining avec Hashnet, et de «coopératives de mineurs» au travers de sa filiale historique Antpool (qui affichait 16% de part de marché du hashrate de Bitcoin sur la semaine écoulée) mais également depuis peu de BTC.com, «le premier fournisseur mondial de données, de pools et de wallets Bitcoin» (24,5%!).
- le capital-risque, avec une participation dans des dizaines de start-up assurant l’échange de cryptomonnaies contre devises à cours légal, à l’instar de la licorne Circle (fintech aussi soutenue par Goldman Sachs), ou proposant des solutions basées sur certaines chaînes de blocs.
Bitmain mène d'ailleurs des discussions avec divers niveaux de pouvoir québécois depuis le début de l’année dans le but vraisemblablement d’échapper aux pressions de Pékin. Assurant une gestion stricte de ses flux de capitaux, la Chine se montre particulièrement suspicieuse quant au détournement de ces technologies contre les institutions monétaires, aux mences que ces activistes constituent pour la deuxième économie du monde.
Bitmain prospecte depuis lors, à la recherche de sites chez nous et poursuit même des négociations avec des sociétés dans l’industrie des papiers ou des textiles. Le mastodonte chinois du bitcoin leur proposant de partager le cas échéant des infrastructures sous-exploitées.