Un marché à fort potentiel
Le fondateur du salon eComMTL, Stéphane Ricoul, se demande pourquoi le Québec et le Canada tardent à prendre le virage de l'épicerie en ligne, alors qu'en Europe et aux États-Unis, on innove énormément dans le secteur.
M. Ricoul cite l'exemple du constructeur Volvo, qui a mis en place un prototype permettant aux clients de se faire livrer leur épicerie dans le coffre de leur voiture. Selon ce procédé, un message texte est envoyé au client lorsque sa commande est prête à être livrée, afin de connaître l'emplacement exact de la voiture. Lorsque le livreur s'approche du véhicule, Volvo génère une clé électronique valable une seule fois qui permet de déverrouiller le coffre. Une fois le travail terminé, il ne reste qu'à refermer le coffre et la clé électronique se désactive. «C'est absolument génial. Cela permet d'éliminer tous les problèmes de livraison», dit Stéphane Ricoul.
Dans un communiqué publié en février, le constructeur suédois affirmait que plus de 60 % des consommateurs ayant effectué leur épicerie en ligne avaient connu des problèmes de livraison en 2013, estimant que les premières livraisons ratées coûtaient globalement 1 milliard d'euros par année à l'économie mondiale.
M. Ricoul soutient que les épiciers ne veulent pas adapter leur modèle commercial à l'épicerie en ligne. «Quand on va chez IGA, il n'y a pas de place de stationnement ou de point de collecte réservés aux clients qui ont réalisé leurs achats en ligne, comme en Europe. Si on veut faire gagner du temps aux clients, il faut le faire jusqu'au bout», dit-il. Le site Internet de l'épicier précise que les clients désirant aller cueillir leurs emplettes en magasin doivent prévoir un délai de quatre heures suivant la conclusion de la transaction, comparativement à six heures pour une livraison à domicile.
IGA teste depuis janvier la stratégie du point de collecte dans son magasin de la Place Longueuil, ce qui permet aux cyberclients de faire livrer leur commande dans le coffre sans avoir à descendre de leur voiture.
Le coeur du commerce en ligne
«Ajouter une fonction de commerce électronique à un site Internet, c'est la pointe de l'iceberg. Avant tout, l'entreprise doit faire en sorte que la commande soit au coeur du modèle commercial. Par la suite, il faut entre autres lier la commande à la gestion des stocks, au service à la clientèle et au marketing», soutient Martin McNicoll, président d'ERP Guru, une entreprise montréalaise qui réalise tous ses revenus en ligne, dont 80 % sur le marché américain. ERP Guru conçoit des applications pour le progiciel de gestion intégré NetSuite, qui vient d'acheter le logiciel Retail Anywhere, lequel donne la possibilité aux détaillants d'avoir une stratégie de vente multicanal.
À son avis, un système centralisé permettra de recueillir un maximum de données sur chaque client, ce qui facilitera la mise en place d'une éventuelle stratégie de marketing personnalisée.
M. McNicoll, récent finaliste au prix PDG de l'année Investissement Québec, ajoute que le succès d'une stratégie de commerce en ligne repose aussi sur l'uniformisation de l'expérience client sur toutes les plateformes (téléphone intelligent, tablette ou ordinateur).
«Un autre élément primordial de satisfaction de la clientèle est le clavardage en direct», note Charles Desjardins, vice-président, ventes et marketing, chez Absolunet, une agence Web qui offre des solutions numériques. Celui-ci ajoute que les entreprises doivent s'assurer d'avoir suffisamment de ressources en place pour pouvoir répondre aux questions des clients en temps réel sur tous les canaux de communication, car ceux-ci désirent finaliser leur transaction rapidement.
M. Desjardins souligne également l'importance d'avoir une politique de gestion des retours cohérente et simple à comprendre pour ne pas rebuter la clientèle.
11 % - En ce qui concerne le panier d'épicerie, les ventes en ligne grugeront les ventes en magasin de 11 % d'ici 10 ans, une prévision jugée prudente.
Source : strategy&
26 % - La population serait prête à prendre le virage de l'épicerie en ligne : en 2012, 26 % des répondants d'une étude de Nielsen projetaient d'acheter des aliments et des boissons en ligne «au cours des trois à six prochains mois», comparativement à 18 % deux ans plus tôt.
Source : «How digital influences how we shop around the world», Nielsen, 2012 ; étude portant sur plus de 28 000 personnes originaires de 56 pays, dont le Canada.
4 % - En 2013, 4 % des cyberclients québécois ont acheté des produits dans la catégorie «épicerie et autres produits alimentaires». Plus généralement, 70 % des internautes québécois, dont 59 % des adultes, ont effectué au moins un achat en ligne cette année-là.
Source : CEFRIO ; échantillon de 454 répondants
17,8 % - Près de 18 % des internautes de 16 ans et plus ont acheté des aliments ou des boissons en ligne en 2012, par rapport à 10,8 % deux ans plus tôt. Ces chiffres comprennent toutefois les commandes de repas effectuées dans les restaurants.
Source : Statistique Canada
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