Les mères de la région de Montréal peuvent compter sur Compagnie F pour démarrer leur entreprise.
L'organisme gère Investissement femmes Montréal (IFM), l'un des 11 organismes régionaux de soutien à l'entrepreneuriat féminin (ORSEF), et organise, depuis trois ans, le Défi de l'entrepreneuriat féminin. Entrevue avec sa gestionnaire, Maricarmen Merino.
Journal Les Affaires - En quoi les mères font-elles des entrepreneures différentes des autres ?
Maricarmen Merino - La principale différence est la gestion du temps. Chez les femmes enceintes ou sur le point d'accoucher, on observe fréquemment un phénomène de remise en question. Plusieurs choisissent l'entrepreneuriat pour contrôler leur temps, leur avenir et leur pouvoir économique.
JLA - Avez-vous constaté une multiplication des « mamantrepreneures » ?
M.M. - Oui. Dernièrement, chacun de nos ateliers de création d'entreprise comptait au moins une femme enceinte. Par ailleurs, lors du dernier Défi de l'entrepreneuriat féminin, je siégeais au comité Transformation et production. Sur les 26 projets proposés, 70 % étaient portés par des mères de famille. On le sait parce qu'à la différence des hommes, les femmes mentionnent qu'elles ont des enfants dans leur dossier de candidature.
JLA - Comment expliquez-vous cette progression ?
M.M. - Il y a deux phénomènes. Les femmes de la génération Y, qui sont les jeunes mères d'aujourd'hui, accordent plus d'importance à la vie familiale, et l'entrepreneuriat est pour elles une façon de concilier leur rôle de parent et leur accomplissement professionnel. D'autre part, la situation économique fait que des femmes très scolarisées et débordant d'idées ne trouvent pas d'emploi. On observe cela notamment chez les immigrantes, qui arrivent avec de bons diplômes et de l'expérience, mais qui ne trouvent pas de travail salarié. Démarrer leur entreprise leur permet de se réaliser.
JLA - Quels sont les défis propres aux mamantrepreneures ?
M.M. - Le principal défi est le financement. Une femme enceinte ou une jeune mère qui cherche à emprunter de l'argent représente un facteur de risque élevé, et donc, on lui propose un taux d'intérêt élevé. C'est d'ailleurs là qu'intervient IFM : nous offrons des prêts de 1 000 à 25 000 $ au taux directeur de la Banque centrale plus deux points.
JLA - Qu'est-ce qui pourrait être fait pour aider davantage ?
M.M. - C'était une question abordée lors des Journées de l'entrepreneuriat féminin, en novembre dernier. Nous devons faciliter l'accès au financement et à l'aide technique. Par exemple, beaucoup d'entrepreneuses sont privées du Soutien au travail autonome d'Emploi-Québec, parce que le secteur qu'elles ont choisi n'est pas admissible. En effet, les femmes privilégient les secteurs des services et, pour beaucoup d'immigrantes, de l'import-export. D'autres part, il faut contrecarrer le manque d'audace des femmes, qui investissent leur propre argent dans leur entreprise de peur de devoir s'adresser à une banque. Nous constatons que beaucoup de femmes, quelle que soit leur origine, ont un problème avec les chiffres et l'argent. Il faut lutter contre cela.