Votre voisin de copropriété profite du week-end du Grand prix pour louer son condo sur Airbnb. Résultat : bières et déchets jonchent les couloirs, sans compter le bruit incessant et les gens qui circulent en pleine nuit. Quels sont vos recours lorsqu’un voisin de passage trouble la quiétude des lieux ou ne respecte pas les règles de l’immeuble ?
Certains propriétaires de condos croient qu’ils peuvent jouir de leur propriété comme bon leur semble. Ce qui, en 2014, comprend la location du condo pendant une courte période grâce à la plate-forme Airbnb afin de transformer son bien immobilier en source de revenus..., et potentiellement en source de malaises.
Car les autres copropriétaires de l’immeuble pourraient ne pas apprécier avoir l’impression de vivre dans un hôtel. Ce n’est même pas une figure de style : « Il est déjà arrivé que des utilisateurs d’Airbnb se présentent à la conciergerie d’une copropriété pour se plaindre qu’ils n’avaient pas assez de serviettes ! », rapporte Michèle Bérard, vice-présidente de l’Association des syndicats de copropriété du Québec (ASCQ)
Des règles à respecter
Dans une copropriété il y a des règles. « La déclaration de copropriété sert à établir toutes les règles relatives aux unités d’habitation, mais aussi au mode de vie », rappelle Mme Bérard.
« Normalement, la déclaration de copropriété prévoit que la location à court terme, d’une durée habituelle de moins de six mois, est interdite », explique de son côté Michel Paradis, avocat et médiateur au cabinet Jolicœur Lacasse.
Mais que faire lorsque la déclaration ne comprend pas une telle clause ?
Alors, le syndicat n’a d’autre choix que d’obtenir la double majorité, soit 50 % des copropriétaires porteurs de plus de 75 % des voix de tous les copropriétaires. Encore là, cela ne se fait pas toujours en criant ciseau.
« Imaginez une copropriété de 250 logements où il faut appeler tous les copropriétaires, les réunir pour procéder au vote et ensuite entériner la déclaration modifiée auprès d’un notaire, avec tous les frais que cela comporte », souligne la vice-présidente de l’ASCQ.
Dans le cas où on ne réussit pas à ajouter une telle clause, on peut tenter de régler la situation avec les moyens du bord. Par exemple, si l’immeuble fournit les services d’un gardien de sécurité, on peut lui demander d’aller avertir les fêtards de diminuer le bruit à un niveau de décibel acceptable.
Sinon, les copropriétaires n’ont d’autres choix que de jouer eux-mêmes à la police, ce qui n’a rien d’agréable à 3 h du matin, sans compter que leur propre sécurité n’est pas assurée.
Des mesures draconiennes
Dans l’hypothèse où on ne peut faire cesser la pratique, soit par absence de quorum ou parce qu’un propriétaire ne suit tout simplement pas la règle prévue à la déclaration de copropriété, il n’y pas mille solutions.
Les syndicats peuvent transmettre des rappels à tous les copropriétaires leur indiquant que ce type de location est interdit. Si le propriétaire refuse d’obtempérer, il peut transmettre des mises en demeure exigeant de cesser son « commerce ».
Dans certaines villes, à Québec notamment, il est également possible de porter plainte auprès de la Ville lorsque les règlements municipaux interdisent ce type de location.
Pas interdit ou autorisé?
« Même en l’absence d’une clause qui interdit ce type de pratique, la location d’un condo sur Airbnb contrevient, selon moi, à la clause de destination résidentielle que l’on retrouve pratiquement dans toutes les déclarations », indique Me Paradis.
Pour être conforme, il faudrait en fait que la déclaration de copropriété mentionne qu'un tel usage est permis, comme le prévoient certaines copropriétés de villégiature telles qu’au Mont-Saint-Anne.
Les syndicats de copropriété ont tout avantage à être proactifs pour éviter les débordements et la multiplication des poursuites judiciaires : si on se fie à sa croissance fulgurante depuis ses débuts en 2008, Airbnb semble être là pour rester...