«Si nous avons aujourd’hui des mandats dans d’autres pays, ce n’est pas parce que nous avons fait du démarchage, dit Christian Perrier, président de PCI Automatisation Industrielle. (Photo: courtoisie)
LES GRANDS DE L'INGÉNIERIE. Si certaines firmes de génie exportent par opportunité, d’autres le font carrément par nécessité — pour se créer des occasions qu’elles ne trouvent pas sur le marché québécois. Dans les deux cas, les firmes qui veulent exporter leurs services doivent être innovantes et savoir bâtir des relations de confiance.
Il faut dire que les ingénieurs-entrepreneurs ont un talent particulier pour percer à l’international. Selon un sondage publié en novembre 2022 par l’Ordre des Ingénieurs du Québec, plus du tiers (36%) des entreprises détenues par des ingénieurs et ingénieures exportent leurs produits ou leurs services outre-frontière, soit trois fois plus que chez les PME canadiennes.
La tendance se comprend d’un point de vue technique; après tout, les lois de la physique ne changent pas d’un pays à l’autre. Pourtant, lorsqu’on s’intéresse aux firmes qui ont du succès à l’international, on se rend compte que leur histoire commence la plupart du temps par une relation de confiance qui s’est bâtie ici même au Québec.
«Si nous avons aujourd’hui des mandats dans d’autres pays, ce n’est pas parce que nous avons fait du démarchage, annonce Christian Perrier, président de PCI Automatisation Industrielle, dont 40% des revenus proviennent des États-Unis. C’est parce qu’un de nos premiers clients locaux avait des activités internationales et qu’il nous a fait confiance pour l’automatisation des lignes de production de ses usines basées à l’étranger.»
Par la suite, PCI Automatisation Industrielle a ajouté des cordes à son arc en offrant des services de conception de panneaux de contrôle et de distribution électrique, de robotique, de mécanique, d’informatique industrielle et une assistance technique en tout temps. La firme montréalaise a aussi développé une expertise dans les logiciels d’optimisation industrielle; lorsqu’une entreprise a automatisé ses opérations à l’aide de robots, elle peut alors commencer à optimiser ses flux avec un système d’informatique industriel.
«C’est un service de niche difficile à vendre au Québec, compte tenu du retard numérique dans le secteur manufacturier, explique Christian Perrier. Notre potentiel de croissance est beaucoup plus grand aux États-Unis.» D’où l’intérêt pour sa firme de continuer à développer ce marché.
Des marchés pour apprendre
En près de 25 ans d’activité, la firme montréalaise de génie-conseil Laporte — qui agit dans les secteurs pharmaceutique, alimentaire et bio industriel — a eu des clients dans le reste du Canada, aux États-Unis, au Mexique, en France, en Suisse, en Belgique et elle vise aujourd’hui les marchés d’Amérique latine et d’Afrique.
Or, si on remonte dans le temps, Daniel Laporte, président fondateur de la firme, confirme que l’aventure « hors Québec » a commencé avec un joueur local. «Il y a une quinzaine d’années, nous avons mené un projet pour réutiliser le CO2 dans l’usine de Molson à Montréal. L’entreprise nous a ensuite demandé d’implanter le même système dans ses usines de Toronto, de Vancouver et d’Edmonton.» Le scénario s’est reproduit avec le géant pharmaceutique GSK, un de ses clients dans la ville Québec, qui lui a ouvert le marché américain en lui confiant un mandat dans une usine de Philadelphie.
«En travaillant dans d’autres pays, on apprend beaucoup», note Daniel Laporte. Récemment, la firme montréalaise a participé à un projet de «viande cultivée» — «produite par culture cellulaire» — dans une usine de Californie. «Lorsque ce procédé arrivera au Québec, nous serons positionnés comme une firme ayant été exposée à cette technologie.»
Suivre la trace du talent
Pour Daniel Laporte, une firme qui a des ambitions à l’international ne peut procéder par la seule force de sa «stratégie d’affaires» ; elle doit se montrer opportuniste, d’abord et avant tout. «Les occasions viennent des êtres humains qui croisent notre route, dit-il, philosophe. Quand nous avons eu de bons ingénieurs qui ont décidé de se relocaliser dans une autre ville ou un autre pays, nous les avons convaincus de démarrer des projets [internationaux] avec nous. »
L’inverse est aussi vrai. Le président se remémore l’expansion européenne de Laporte en 2010. «J’ai passé trois ans en France à faire du développement d’affaires et à prendre des informations sectorielles. Puis j’ai réussi à recruter celui que je considère être le plus brillant jeune ingénieur en pharmaceutique en France. Et c’est de là qu’est venue l’opportunité. » L’ingénieur en question, Pierre Thibaud, est devenu président de Laporte Euro, pilotant des mandats en France, mais aussi en Belgique et au Maghreb.
Chacune à leur manière, PCI Automatisation Industrielle et Laporte ont compris que, à l’international, l’innovation est une autoroute à double sens ; elle s’exporte autant qu’elle s’importe. C’est ce qui fait la riche d’une aventure «hors Québec».