Afin de devenir vice-présidente, Est du Canada chez Knightsbridge à l'âge de 41 ans, Caroline Codsi a dû se libérer de l'étiquette de développement des affaires qui lui était accolée. Changer d'employeur et argumenter ne lui ont pas fait peur.
LES AFFAIRES - Pourquoi aspiriez-vous à la gestion ?
Caroline Codsi - C'est ma passion ! Je voulais jouer un rôle dans toutes les facettes d'une entreprise. J'ai un esprit entrepreneurial très développé, mais je n'ai jamais eu le courage de me lancer en affaires. Il n'y a rien qui s'en rapproche plus que ce que je fais présentement. Après trois ans et demi de forte croissance, on peut dire que la décision de me faire confiance a été la bonne. Mais c'était un pari, et les dirigeants de Knightsbridge ont pris encore plus de risques que moi.
L.A. - En quoi était-ce risqué ?
C.C. - C'était une grande évolution dans ma carrière. Ouvrir des portes et conclure des ventes [comme je le faisais chez KWA], c'est une chose. Inspirer et motiver une équipe, gérer l'exploitation et les finances, ça nécessite d'autres habiletés et compétences. Pour arriver à ce poste, il a fallu que quelqu'un me fasse confiance, mais aussi que je sois très déterminée. Quand vous avez beaucoup de succès en développement des affaires, on veut vous y laisser : vous êtes une poule aux oeufs d'or !
L.A. - Vous avez procédé par étapes...
C.C. - J'ai fait un premier changement d'employeur pour prendre la direction des ventes, et un deuxième pour occuper un rôle de gestion d'un centre de perte et profit. Pour ce dernier poste, chez Knightsbridge, il y a eu beaucoup de discussions, de part et d'autre. Ils m'ont offert à plusieurs reprises de créer un poste sur mesure pour moi, en développement des affaires. Ce n'était pas ce que je voulais ! J'ai tenu mon bout : c'était ça ou rien. J'ai fait un total de 13 entrevues, passé des tests psychométriques et même préparé un plan d'affaires. J'ai montré une compréhension des enjeux et ils ont été impressionnés. Je pense qu'ils voulaient tester mon sérieux.
L.A. - Vous, aviez-vous des doutes ?
C.C. - Non, parce que j'ai beaucoup confiance en moi. En même temps, je n'avais jamais occupé un tel poste ! Je savais que c'était ce que je devais faire, parce que je ne voulais pas être coincée dans ce carcan de développement des affaires à long terme. C'était aussi une étape critique pour aspirer à des postes de directrice générale. Évidemment, le fait que des gens dépendent de mon travail me faisait un peu peur. Pour m'aider, j'ai demandé à avoir un coach professionnel, une première pour moi.
L.A. - Quelle était votre relation avec cette personne ?
C.C. - Le défi était de trouver quelqu'un qui n'était ni un membre de mon équipe, ni un collègue, ni un concurrent. Nous avons trouvé un très bon compromis : la présidente de MICA, une entreprise torontoise que Knightsbridge a achetée. Nos caractères se ressemblent beaucoup et nous avons eu un coup de foudre professionnel. Ça a été formidable, parce que c'est quelqu'un avec qui je n'ai pas de rapport hiérarchique, en qui j'ai confiance et dont je reconnais les connaissances. C'est essentiel pour accepter la rétroaction. De mon côté, je lui ai démontré que j'étais ouverte et que je désirais m'améliorer.
L.A. - Comment l'équipe a-t-elle accueilli votre nomination ?
C.C. - J'avoue qu'il y a eu une petite vague de scepticisme durant la première année. Ce n'était pas évident, parce que ma réputation me précédait. On savait qui j'étais, ce que j'avais accompli et aussi que je n'avais pas encore occupé ce genre de poste. Dans un milieu de coachs et de gens très expérimentés, c'est particulièrement difficile, d'autant plus qu'ils craignaient que le développement des affaires ne devienne la seule préoccupation.
L.A. - De quelle façon avez-vous fait votre place ?
C.C. - J'ai mis beaucoup d'accent sur l'exploitation et la qualité. Je privilégie aussi les rencontres en personne, en équipe et individuellement. Je crois que je suis devenue crédible à leurs yeux lorsqu'ils ont constaté que je pouvais les aider à surmonter certains problèmes. Si j'ai eu du succès en développement des affaires, c'est parce que je suis très structurée et rigoureuse dans mon travail. Selon moi, ces qualités se transfèrent dans n'importe quelle sphère.