(Photo: 123RF)
BLOGUE INVITÉ. Au Québec, on attend trop. On attend qu’un viaduc s’effondre avant de se questionner sur l’état de nos infrastructures, on attend de se faire voler des centaines de millions avant de lutter contre la corruption, on attend que les écoles soient forcées de fermer avant d’acheter quelques iPad...
On attend des années pour voir un médecin, pour se faire opérer, pour quelques stations de métro ou pour une Coupe Stanley à Montréal. À Québec, on attend pour un pont, un tunnel, un tramway, un gratte-ciel ou une équipe de la Ligue Nationale de Hockey.
Tristement, dans le dossier des CHSLD, notre légendaire patience s’est avérée fatale. À ce jour, plus de 3000 résidents, 3000 papis, mamies, papas, mamans ou amis ont été victimes de notre patience. Beaucoup d’entre eux sont décédés abandonnés, affamés, déshydratés et seuls, dans leur couche, au fond de leur matelas. Un véritable carnage.
Comment accepter depuis si longtemps ces inactions? Pourquoi sommes-nous si réactifs et si peu proactifs? Y a-t-il une personne qui peut me regarder, sans rire, dans les yeux et me dire que personne n’était au courant que nos routes et ponts étaient en décrépitude, que l’univers de la construction, surtout celui des contrats publics, n’était pas gangrené par la corruption ou que notre système scolaire et notre réseau de la santé, malgré leur budget combiné de plus de 60 milliards de dollars annuellement, sont en profonde crise d’infrastructure, de personnel et de sous-investissement depuis aussi longtemps que je puisse me rappeler?
La lourdeur des mots, la puissance de leur définition et le triste constat que l’attente éternelle et presque sans espoir concernant la multitude d’exemples mentionnés précédemment devraient tous nous déranger au plus haut point.
Le célèbre dramaturge et philosophe Sénèque disait ceci de l’attente: «Le plus grand obstacle à la vie est l’attente, qui espère demain et néglige aujourd’hui.»
Les répercussions des 6 derniers mois font en sorte que le Québec n’a aujourd’hui plus le luxe d’attendre. Économie sous respirateur artificielle, épuisement général de la population, sentiment d’impuissance, impatience et frustration de plus en plus présentes... les décisions des prochains mois seront parmi les plus importantes de l’histoire du Québec.
C’est le dos au mur et les pieds dans le vide que l’on juge de la force de caractère, de la sagesse et du courage d’un peuple.
Comme la plupart d’entre nous, j’ai hâte de jeter mon masque à bout de bras, d’aller au cinéma ou dans mes restos et bars préférés sans craindre ce virus qui hante notre quotidien. J’ai hâte de ne plus avoir de décompte funèbre au téléjournal ou de conférence de presse où l’on martèle les mêmes messages, jour après jour.
Malheureusement, la COVID-19 ne fait pas que remplir les soins intensifs, elle nous divise en tant que société. Pour ou contre ci, pour ou contre ça, nos échanges deviennent de plus en plus acrimonieux, faisant en sorte que l’on perd de vue l’ultime objectif commun à tous; revenir à la normale.
Dans notre vie, rare sont les moments où nos décisions personnelles peuvent avoir un immense impact collectif. Aujourd’hui, plus que jamais, face à l’immense défi et à l’urgence de la situation que représente cette deuxième vague, il est définitivement le temps que l’on arrête d’attendre et que l’on agisse, avant de revivre les pires journées macabres du printemps 2020.