François Gilbert, PDG d'Anges Québec, estime qu'il s'agit principalement d'une question de «timing». Selon lui, les joueurs du domaine du financement ont tendance à investir davantage certaines années, et moins d'autres années. En 2017, tout le monde semble être au sommet de son cycle en même temps. «Je suis dans le milieu depuis 30 ans et je n'ai jamais vu autant d'argent sortir de partout en même temps, dit-il. C'est un bon moment pour les entrepreneurs pour aller chercher du financement.»
Les chiffres de l'Association canadienne du capital de risque et d'investissement, par exemple, montrent que les investissements en capital de risque dans la province ont totalisé 207 M $ au premier trimestre de cette année, contre 136 M $ l'an dernier, 61 M $ en 2015 et 30 M $ en 2014.
Un autre facteur est la volonté politique actuelle de vouloir soutenir et développer des joueurs de calibre international et des leaders mondiaux. Cette situation résulte notamment du fait que les gouvernements désirent de plus en plus éviter que les entreprises prometteuses d'ici se fassent dérober par des firmes étrangères. Pour favoriser le développement international de celles-ci, et favoriser leur ascension vers la position de numéro un, deux, ou trois mondial, ils doivent donc s'assurer que les entreprises ont accès à un financement suffisant.
«Le Québec s'est donné une vision d'intervention pour atteindre cet objectif, et Lightspeed cadre très bien dans ce contexte», indique François Gilbert, qui sera conférencier avec Dax Dasilva, PDG et fondateur de Lightspeed, le 31 janvier à l'événement Financement PME, organisé par le Groupe Les Affaires.
Qu'en est-il des entreprises qui ont de la difficulté à se financer ? Selon lui, plusieurs sociétés n'obtiennent pas de financement parce qu'elles n'osent pas rêver, planifier et demander. Plusieurs entrepreneurs se disent, avant même d'avoir essayé, qu'ils seront incapables de lever 200 M $. Pourquoi demander ? Adopter une telle attitude, c'est toutefois faire erreur, croit M. Gilbert. Les leaders d'entreprises doivent être visionnaires et oser demander, parce que Lightspeed n'est pas anecdotique : la Caisse de dépôt veut investir plus agressivement dans les PME québécoises, et Investissement Québec se lance tranquillement dans des investissements plus importants pour réaliser la vision de Québec.
Cependant, pour maximiser les chances d'obtenir de gros sous, les entrepreneurs doivent avoir de gros projets. Ils doivent avoir des visées internationales. «Un joueur de capital de risque veut faire au moins dix fois sa mise, alors une entreprise qui touche de 200 M $ à 300 M $ doit pouvoir transformer cette somme en une valorisation de 3 G $», dit François Gilbert.
Un plan béton
Lightspeed prévoit bûcher dur d'ici deux ans, de sorte à être prête pour un lancement en Bourse à l'été 2019. Ses processus, compétences, et capacités à produire des rapports devront donc être comparables à ce qui est attendu d'une entreprise publique. Pour y arriver, la société estime qu'elle devra grandir aussi rapidement qu'elle a crû depuis deux ans, période durant laquelle son nombre de clients est passé de 25 000 à 50 000.
La recette secrète de Lightspeed pour mettre la main sur 207 M $ ? Dax Dasilva, le PDG et fondateur, attribue son succès à la capacité de son entreprise à développer un produit qui est en avance de deux ans sur le reste du marché. La rapide croissance internationale du fabricant de système de point de vente, qui était dans plus de 100 pays en moins de quelques années après sa fondation, contribue également à son succès. «En tant que PME, vous devez pouvoir montrer que vous êtes un joueur solide, c'est-à-dire que vous atteignez vos objectifs. Vous devez avoir des chiffres attrayants à montrer. Si c'est le cas, les investisseurs vont continuer de vous soutenir.» Lightspeed est l'exemple parfait : tous les investisseurs ayant participé à cette dernière ronde de financement - la Caisse de dépôt, Investissement Québec, iNovia Capital et la Silicon Valley Bank - avaient déjà confié de l'argent à l'entreprise.
Dax Dasilva conseille aussi aux startup et aux PME qui recherchent du financement d'élaborer un plan d'affaires robuste. Les avantages ? Celui-ci vous aidera à déterminer plus clairement ce que vous devriez faire ou pas, et quelles occasions vous devriez poursuivre. Avoir des objectifs concrets vous permettra par ailleurs de savoir si vous êtes toujours sur les rails, si vous avez atteint un bon product/market fit, et si la demande est là. «Plusieurs startup auraient avantage à avoir un bon plan d'affaires et un bon modèle de revenus, et à l'exécuter, conseille Dax Dasilva. C'est ça qui impressionne réellement les investisseurs. Les idées seules ne sont preuves de rien.»
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