Dans les faits, les investissements qu'il a réalisés dans le cadre de Dans l'oeil du dragon viennent de sa poche, et non de XPND Capital, le fonds de 17 M$ qu'il a mis sur pied en 2011. Meurtri d'avoir été écarté de Stingray, M. Taillefer avait alors décidé d'accrocher son bâton d'entrepreneur et de se limiter à appuyer les projets des autres.
«J'ai la chance d'avoir beaucoup de cicatrices dans le dos et il y a encore une couple de poignards qui restent, dit-il. Et ce genre de blessures, ce genre de cicatrices, je pense que je peux en faire profiter les entrepreneurs et les aider à éviter certains écueils.»
D'une taille lilliputienne selon les normes de l'industrie, XPND Capital a réussi à réaliser de bons rendements (son taux de rentabilité interne s'élèverait à environ 30 %) grâce aux relations de M. Taillefer. En effet, ce dernier a investi dans des entreprises qui, contrairement à celles présentées à Dans l'oeil du dragon, avaient souvent l'embarras du choix pour trouver du financement.
Maintenant à la tête d'un fonds de 50 M$, il est de retour dans la grande ligue du milieu des affaires québécois. Si son pari sur l'entrepreneuriat social semble une commande difficile à remplir, Alexandre Taillefer n'a jamais été aussi bien préparé.
Toujours aussi créatif, il est maintenant rompu à la finance. «Il connaît ses chiffres sur le bout des doigts quand il prend des décisions et il est très fort sur les modèles d'affaires», affirme Rémi Racine, pdg du studio de jeux vidéo Behaviour, au conseil duquel M. Taillefer siège. Un trait qu'a aussi noté Martin-Luc Archambault, qui soutient que c'est vers lui que ses collègues se tournaient pour calculer la rentabilité des projets sur le plateau de Dans l'oeil du dragon.
Alexandre Taillefer, pour sa part, ne doute pas de la faisabilité de son projet de taxis, malgré tous les obstacles qui devront être franchis pour le mener à bien. «Alex, il croit beaucoup en lui, mais je te dirais que c'est plus fort que ça, note Martin Le Sauteur. Il a foi en lui. Il ne croit pas en ses moyens ; il a foi en ses moyens.»
Le principal intéressé, du reste, admet qu'il y a une part de naïveté dans le fait de se croire capable de réinventer une industrie. «Tu n'as pas idée à quel point j'ai été naïf et à quel point j'ai été chanceux dans ma carrière. Aujourd'hui, j'ai 43 ans, ça fait 21 ans que je suis en affaires et j'ose croire que ce que je fais aujourd'hui nécessite beaucoup moins de chance et que le niveau de naïveté est plus bas, mais ça en prend un petit peu. Pour être entrepreneur, il faut vouloir changer le monde. Ça prend toujours ce petit côté naïf.»