Lors de l'assemblée annuelle des actionnaires d'une société cotée en Bourse, ceux-ci sont invités à élire ou réélire le conseil d'administration. Ce vote se fait généralement par procuration. Or, il arrive qu'un ou des actionnaires soient insatisfaits de la gestion de la société ou de sa performance. Sous certaines conditions, les mécontents peuvent tenter de réunir un grand nombre de procurations en leur faveur, ce qui leur permettra de négocier avec la direction, voire de renverser son conseil d'administration. On parle de course aux procurations ou de proxy fight, en anglais.
" La loi permet à un actionnaire détenant un bloc d'actions représentant 5 % ou plus, d'exiger la tenue d'une assemblée extraordinaire. En outre, des actionnaires peuvent discuter entre eux de leur intention de vote. C'est ce qu'on appelle la course aux procurations. Ces situations peuvent créer un rapport de force avec la direction en place ", explique Francis Legault, associé principal chez Ogilvy Renault.
" Le but est généralement d'avoir une influence sur la façon dont la société est administrée. Les 15 actionnaires dissidents, le nombre maximal permis par la loi, pourront par exemple négocier avec les dirigeants, leur demander de changer quelques administrateurs, ou encore de vendre des actifs pour faire monter le prix de l'action ", dit Sonia Struthers, associée chez McCarthy Tétrault.
Cela peut même aller jusqu'au renversement du c.a. C'est donc une façon de prendre le contrôle de l'entreprise sans avoir à lancer une coûteuse offre publique d'achat. " Les règles dans ce domaine sont permissives au Canada, et dans certains cas, il peut y avoir des abus. Par exemple, quand les actionnaires dissidents ont une vision à très court terme de la gestion de la société : ils veulent seulement créer de la valeur et empocher les dividendes ", remarque M. Legault.
Selon lui, le resserrement du marché du crédit fait en sorte que les courses aux procurations devraient se multiplier. " Comme il est plus difficile de trouver l'argent nécessaire pour racheter une société, plutôt que de l'acquérir, on s'organise pour se positionner comme actionnaire à 5 % et on approche la haute direction pour négocier avec elle ", poursuit-il.
Des exemples canadiens
Des fonds d'investissement activistes américains comme Crescendo ont déniché plusieurs occasions d'affaires au Canada et ont eu recours aux proxy fights. Ainsi, Spar Aerospace fut vendue à L-3 Communications en 2001; Ad Opt Technologies à Kronos en 2004; Geac Computer à Golden Gate Capital en 2006; et BCE Emergis à Telus en 2007.
Autres exemples : la société Pet Valu, où les dissidents ont remporté leur pari, ce qui ne fut pas le cas pour le Groupe Forzani, où les actionnaires dissidents ont échoué.