(Photo: Bloomberg)
Les temps durs vont persister encore quelques années avant que l’industrie minière québécoise retrouve son envol. Même si le cadre est devenu plus prévisible avec la révision complétée de la Loi sur les mines et le redémarrage du Plan Nord, les tendances mondiales ne sont pas favorables à court terme.
«Le secteur minier québécois est en mode survie. Les gens sont conscients que le pire est derrière eux, mais la reprise prendra du temps. Elle commencera avec les grandes entreprises. Quant aux petites, on est surpris de leur résilience», a analysé Nochane Rousseau, associé et leader chez Price Waterhouse Cooper en conférence à l’évènement Objectif Nord, organisé à Québec mardi par Les affaires.
Une part des difficultés actuelles vient des cycles de l’industrie, d’une durée de 5 à 10 ans. Le secteur minier traverse une quatrième année difficile. Il y a eu régression des investissements et M. Rousseau anticipe maintenant une vague de fusions-acquisitions avant qu’un nouveau boom se produise.
Ce qui aide présentement les minières québécoises dans un contexte défavorable, avec une baisse de la demande mondiale, c’est la faiblesse du dollar canadien et la baisse du prix du pétrole qui réduit les coûts de transport – un point crucial étant donné que le Nord du Québec est loin des grands marchés de consommation.
«Sans ces éléments, la fosse du Labrador ne serait pas en opération aujourd’hui avec la baisse des prix du fer», a noté M. Rousseau.
Le prix moyen du fer était de 135$ la tonne en 2013 et il n’est plus aujourd’hui que de 47$. Le ralentissement de la croissance économique en Chine, de même que des surplus d’inventaires dans ce pays, créent cette tendance baissière.
À long terme, toutefois, PWC est plus optimiste pour le secteur minier québécois. Les besoins en nourriture croîtront de 35% d’ici 2030 quand la population mondiale aura atteint les 8,3 milliards de personnes. Les besoins en engrais et fertilisants seront donc en forte hausse et le Québec possède notamment des gisements d’apathite, servant à produire les engrais.
Ensuite, le processus mondial d’urbanisation accéléré crééra une demande pour la construction d’infrastructures urbaines. Actuellement, 50% de la population mondiale vit en ville; ce sera 86% en 2050 selon les prévisions. La croissance de la classe moyenne dans les pays émergents stimulera la consommation pour quantité de produits, dont les voitures et les appareils électroniques.
«Donc on croit qu’à long terme, la demande pour les produits miniers sera en croissance. On est en train d’épuiser les mines actuelles et il y aura donc d’excellentes opportunités pour les bons projets (qualité de gisement, productivité, bons coûts d’opération, acceptabilité sociale)», anticipe M. Rousseau.
La présidente de l'Association minière du Québec, de son côté, s'est réjouie du fait que le Québec soit redevenu un endroit intéressant pour les investisseurs après être passé du premier au 18e rang mondial de 2010 à 2014. En 2015, selon l'Institut Fraser, le Québec occupe le 6e rang mondial.
«Chaque geste qui crée de l'incertitude a des effets importants sur l'attractivité. Maintenant, avec la Loi sur les mines qui a été révisée et le Plan Nord qui est relancé, on a un cadre plus stable et plus prévisible», a affirmé Mme Méthot, exprimant toutefois une préoccupation face à la volonté gouvernementale de soustraire 50% du territoire du PLan Nord à des fins de protection.
André Gaumond, des Redevances Aurifères Osisko a exprimé plus fortement son désaccord face à ce projet du gouvernement Couillard.
«Cinquante pour cent d'aires protégées, ce n'est pas ce dont on a besoin! Ce n'est pas ce que veulent les générations futures et ce n'est pas ce que veulent les nations autochtones. On est déjà une des juridictions qui a le plus d'aires protégées», a-t-il fait valoir.
Parmi les autres préoccupations de l'industrie minière, il y a évidemment l'accès au Port de Sept-Iies, bloqué par la minière Cliff, qui empêche des concurrents d'y accéder.
Le déploiement de la fibre optique sur tout le territoire nordique (pour faciliter les communications des entreprises, l'éducation à distance, la télésanté et la téléjustice) est aussi un enjeu majeur. Le Secrétaire au Plan Nord, Robert Sauvé, a indiqué qu'il faudra une décennie pour y arriver.
«Tout cela coûtera 200 M$ et je n'aurai pas ces sommes en cinq ans. À moins que des projets se développent assez vite pour que nos budgets augmentent. Mais c'est prioritaire», a assuré M. Sauvé.