Robert Nadeau, président et chef de la direction de l'Organisme d'autoréglementation du courtage immobilier du Québec.
Votre organisation vient de publier un mémoire assez critique en réponse au rapport du ministère des Finances sur «l'application de la Loi sur le courtage immobilier». Pourquoi était-ce important de répliquer ?
D'abord, une précision : en vertu de la Loi sur le courtage immobilier, qui a subi une refonte presque complète en 2010, il était prévu que le ministère produise un rapport quinquennal pour revoir la loi au besoin. Le problème, et la raison pour laquelle nous devions répliquer, c'est que ce rapport-là est en grande partie non fondé. Ce qui est rapporté n'est pas soutenu par des faits, mais par des impressions de quelqu'un au ministère ; ce n'est pas M. Leitao qui en est le fabricant. Disons que nous n'apprécions pas. Nous, nous soutenons ce que nous avançons dans notre mémoire avec des sources et des notes en bas de page. Et dans bien des cas, nous contredisons le rapport du ministère. Deux grands axes du rapport sont particulièrement problématiques : la protection du public et notre modèle de gouvernance.
En quoi ce rapport ou la Loi sur le courtage immobilier représentent-ils une menace pour la protection du public ?
Un des grands problèmes de la Loi depuis 1994, et nous l'avons réitéré en 2010, c'est qu'on n'y retrouve pas de définition claire de l'activité de courtage immobilier. Il faut absolument circonscrire le moment où le courtage immobilier commence et où il se termine. La raison est simple : pour offrir et appliquer les protections qui accompagnent le courtage, il faut savoir quand il s'agit d'une activité de courtage. Là, il faut s'en remettre aux juges. Et puisque la définition n'est pas écrite noir sur blanc, ça devient aussi plus complexe de lutter contre le courtage illégal. Il faut éviter que le public n'ait que le Code civil pour se défendre. Prenez DuProprio, par exemple, qui n'est pas un cas isolé. C'est comme Airbnb et l'hôtellerie ou Uber et les taxis, ces services échappent à la réglementation. Ils ne se battent pas à armes égales. Dans notre cas, pourquoi les autres courtiers devraient-ils suivre une formation, se conformer à un code de déontologie, subir des inspections et payer des cotisations ? Ça devient un catch 22 [une situation sans issue].
Que reprochez-vous au rapport quant à votre modèle de gouvernance ?
Le rapport suggère de ramener l'Organisme d'autoréglementation du courtage immobilier du Québec (OACIQ) dans le giron de Québec. Donc, de ramener dans l'État ce qui en est sorti dans les années 1990. Actuellement, non seulement nous ne coûtons rien à l'État, mais nous payons pour qu'il nous surveille ! En plus, le gouvernement actuel ne semble pas vouloir étendre l'appareil étatique, mais le réduire. C'est illogique. Le public est très satisfait de nos services. L'OACIQ est une réussite. D'ailleurs, une firme indépendante nous a évalués en 2013 et nous a qualifiés de «très structurés et très fiables». Franchement, nous sommes inquiets de constater l'incompréhension de certaines personnes au ministère des Finances à l'égard de notre rôle.
16 000 : Nombre de courtiers (immobiliers, commerciaux et hypothécaires) représentés par l’Organisme d’autoréglementation du courtage immobilier du Québec (OACIQ).
Robert Nadeau est président et chef de la direction de l'Organisme d'autoréglementation du courtage immobilier du Québec. Diplômé en droit de l'Université Sherbrooke, M. Nadeau entre à l'Association de l'immeuble du Québec en 1986 en tant que syndic adjoint. En 1998, il devient directeur général de l'organisme, qui a changé de nom pour l'Association des courtiers et agents immobiliers du Québec (ACAIQ). Il est nommé président et chef de la direction en 2004. Puis, en 2010, l'ACAIQ devient l'Organisme d'autoréglementation du courtage immobilier du Québec.