Michel Brûlé est un oiseau rare. Cet homme qui fut l'un des premiers professeurs embauchés à l'École de technologie supérieure (ÉTS) en 1978, pour, entre autres, y développer une concentration en technologies des ordinateurs, est aujourd'hui un pur financier.
Son holding, Investissements M & M, détient des participations dans des entreprises, dont la valeur totale s'établit entre 10 et 15 millions de dollars (M$). Il fait également partie des investisseurs du FIER Longueuil et d'Anges Québec. Et c'est d'ailleurs en tant qu'ange financier qu'il aime se définir : un individu qui investit dans des entreprises en démarrage tout en leur prodiguant des conseils et en leur présentant son carnet d'adresses.
«Il y a dix ans, ce terme était péjoratif, connoté d'amateurisme et de jovialisme. Aujourd'hui, la perception et la réalité ont changé. Les anges sont des financiers expérimentés qui font bénéficier les entrepreneurs de leurs réseaux», dit-il.
Arroser les jeunes pousses
Contrairement à ce qui se passait durant les belles années de la bulle Internet, les technologies n'attirent plus les dollars des anges financiers. «En haute technologie, c'est même le désert, car les équipements et les outillages spécialisés exigent beaucoup de capitaux», précise le financier qui préfère privilégier les entreprises de services.
«Dernièrement, j'ai participé au financement d'un réseau d'autobus scolaires qui veut croître par acquisitions. C'est très différent de la techno, mais ça fait travailler beaucoup de gens !»
Cet ingénieur diplômé en génie électrique de l'Université d'Ottawa estime que ses interventions font baisser les «probabilités de mort prématurée» des jeunes pousses. «Mais à la condition expresse que le capitaine veuille nous écouter ! Ce critère de compatibilité doit d'ailleurs être à la base de toute décision d'investissement», dit-il.
Les résultats ne semblent d'ailleurs pas mauvais, puisque l'organisation canadienne National Angel Capital Organization a nommé Michel Brûlé «Investisseur de l'année» en 2010.
Un flair hors du commun
Si l'ingénieur est devenu un ange financier, c'est non seulement en raison de son goût pour l'enseignement, mais surtout à cause de son flair. Au sommet de la bulle techno, en mai 2000, il se départit des parts de l'entreprise InnoMediaLogic, dont il est alors actionnaire minoritaire, aux côtés du géant québécois du capital-risque : Novacap.
La transaction, de 155 M$ en comptant et en échange d'actions, en a fait instantanément un millionnaire. Cette vente a d'ailleurs reçu en 2000 le prix «Meilleure transaction de l'année au Canada dans le capital-risque», décerné par la Canadian Venture Capital Association.
«À l'époque, l'euphorie était telle que nous avons obtenu le prix le plus prestigieux que nous aurions pu souhaiter recevoir», dit M. Brûlé.
En définitive, résume-t-il, rien dans sa vie n'a été planifié. Une seule chose l'a guidé : chercher et créer afin de combler des besoins du marché.
«Je n'ai jamais eu pour objectif de devenir riche. Je voulais innover et me distinguer. J'ai su reconnaître les bonnes occasions, les saisir à temps et bien positionner les nouveaux produits.»