Les joueurs de l’industrie maritime ne sont pas tous égaux face aux récents soubresauts du monde économique. Portrait de trois entreprises maritimes qui, chacune à sa manière, tire son poisson de l’eau.
Pas de petites économies au Port de Québec
Presque 20 % moins de tonnage a transité par le Port de Québec en 2009 comparativement à 2008. C’était la première baisse depuis 2001 ! Résister à ce genre d’événement n’est pas simple pour un port. « Près de 65 % de nos coûts d’exploitation sont des coûts fixes, parce que nous louons des infrastructures comme des quais, des élévateurs à grains, des convoyeurs et des bâtiments. Donc, que nous ayons beaucoup d’activité ou non au port affecte peu nos dépenses. », dit Mario Bernard, vice-président Finances.
Le Port de Québec a toutefois réussi à sauver de l’argent en automatisant davantage ses opérations. Cette fois, il a réduit le nombre d’agents surveillant les lieux (en sous-traitance) par des caméras, un réseau de fibre optique et des barrières. « L’automatisation est quelque chose de courant et continuellement amélioré chez nous, dit Mario Bernard. Par exemple, quand un employé enregistre son heure de départ, tout se met automatiquement à jour : la fiche de paie, la banque de congés et nos livres comptables. »
Le Port de Québec a aussi économisé 300 000 $ en sous-traitant la gestion de deux lieux, sur ses terrains, remis en valeur pour le 400ième : la salle de spectacle extérieure l’Agora et la plage de la Baie de Beauport. « C’est sur le site du port, mais c’est très loin de notre activité principale ! », dit Mario Bernard en riant.
Le Groupe Fednav profite de la crise
En faisant chuter les prix, les crises financières sont avantageuses pour les acheteurs qui disposent de bonnes réserves. Malgré la tourmente, le transporteur international Fednav a commandé 15 vraquiers surnommés Handys. Ils valent aujourd’hui de 25 à 30 M $ US contre environ 60 M $ en 2008 !
« Nous avons une soixantaine de navires qui nous appartiennent en propre », dit Jean Lemay, vice-président Commerce de la firme établie à Montréal. « D’ici 2014, nous remplacerons quinze des vraquiers qui ont plus de 20 ans.»
Avec cet achat bien planifié, Fednav réalise plus qu’une économie : il investit pour réduire ses coûts d’opération et ses gaz à effet de serre (GES). En effet, les nouveaux Handys brûlent beaucoup moins de mazout que les vieux. Environ 10 tonnes de moins par jour pour ceux de Fednav.
Fednav occupe présentement un bon créneau pour résister au marasme ambiant. « Le transport du vrac est beaucoup moins affecté par le ralentissement que le transport des conteneurs », dit Jean Lemay. « Quand la crise est arrivée, la Chine a investi dans ses infrastructures ce qui a augmenté ses importations de minerai de fer et a bénéficié à tous les vraquiers, par effet domino, même ceux qui ne sont pas présents en Asie. »
Quick thinking à la Société Montréal Gateway
La situation est bien différente du côté de Montréal Gateway, qui travaille avec des conteneurs plutôt que des vraquiers. Concrètement, le gestionnaire de terminaux charge et décharge des navires, des camions et des trains sur deux des terminaux du Port de Montréal. « Nous somme la plus grosse entreprise du type à l’Est du Canada », dit Kevin Doherty, chef de la direction de la firme.
Montréal Gateway a remarqué dès la fin de 2008 que ses affaires ralentissaient. Elle a décidé d’agir quand elle a vu que rien ne s’améliorait à l’été 2009. « Notre plus gros marché est l’Europe. Or, on sait comment se porte l’économie européenne! », dit M. Doherty. Au final, le volume d’affaire de la compagnie a chuté d’environ 30 % entre 2008 et 2009! Les choses reprennent depuis, mais très lentement.
Pour faire face à la crise, Montréal Gateway a réduit ses frais. « Il allait de soi que nous n’augmenterions pas nos tarifs; personne ne fait cela lors d’une récession », dit le directeur général. Malgré les compressions, le mot d’ordre était toutefois de maintenir le plus possible la qualité des services offerts.
La compagnie a cessé d’offrir le déchargement de camions de 16 h à minuit. La demande était faible lors de ce quart de travail, selon la firme. Ce service est toutefois disponible de manière officieuse. « On ne l’annonce pas, mais, si un camion se présente à ces heures, on le décharge; ce sont les travailleurs affectés aux trains qui s’en chargent », dit M. Doherty.
Montréal Gateway a ensuite repoussé de 6 h à 8 h les premiers déchargements de camions le matin. « Nous transportions surtout des conteneurs vides et le travail entraînait des temps morts l’après-midi. »
Grâce à ces initiatives, et d’autres, Montréal Gateway a obtenu des économies de 5 à 10 %.