Lors de mes entretiens avec différents gestionnaires de portefeuille, certains expriment parfois des réserves sur les politiques d'assouplissement quantitatif (quantitative easing) que les banques centrales ont tour à tour mises en place pour relancer leurs économies.
Jusqu'à maintenant, je n'avais jamais parlé à des gestionnaires ayant exprimé un rejet si catégorique de ces politiques que les portefeuillistes Paul Musson et Matt Moody, de l'équipe Mackenzie Ivy. Peu importe le succès qu'ont pu avoir ces politiques dans la foulée de la crise de 2008, elles sont en train, disent-ils, de détruire de la richesse dans l'économie mondiale.
Selon eux, cette politique de bas taux a mené à la crise de 2008. Plutôt que de tirer des leçons de leurs erreurs, les banques centrales ont poursuivi sur la lancée de ce qui a conduit à une première catastrophe, en doublant la mise.
«Le maintient de taux trop bas pendant de longues périodes, conjugué à une mentalité de renflouage sur le court terme ne rapporte pas grand-chose à l'économie réelle et aboutira à une mauvaise affectation du capital. Cela contribuera au ralentissement de la croissance, à l'instabilité du système financier et à la disparité des revenus. De nos jours, les décideurs pensent que les meilleures décisions quant à l'affectation des capitaux sont celles qui ont un impact immédiat et perceptible sur le PIB et non pas celles qui génèrent les meilleurs rendements au fil du temps», explique Matt Moody.
Il soutient que les expériences des banques centrales nous amènent en terrain inconnu.
«Elles pensent qu'elles maîtrisent la situation, mais il y a des risques importants à ce qu'elles font, nous ne savons pas comment en mesurer l'ampleur», prévient-il.
Des ratios excessifs
Pour l'équipe Ivy, les ratios de valorisation accordés aux actions sont excessifs et déconnectés des données fondamentales, gonflés par ce maintien de taux d'intérêt trop bas pendant trop longtemps afin de créer un effet de richesse.
«On voit bien qu'à court terme, comme on le voit en Europe depuis le début de l'année, l'annonce de programmes d'assouplissement quantitatif peut pousser rapidement le prix des actions à la hausse. On a vu le même phénomène dans d'autres endroits aussi, notamment au Japon, et bien sûr aux États-Unis. Il est facile d'extrapoler que l'assouplissement quantitatif est "bon" pour les actions», raisonne Matt Moody.