Ksenia Sosnina, PDG d'Ilim Group, une des plus grandes sociétés russes de pâtes et papiers, contribue à la proportion de 45% de femmes dirigeantes de ce pays.
À l’échelle mondiale, le nombre de femmes dans les organes décisionnels n’a augmenté que de 3% en 5 ans. Et ce, malgré les nombreuses études démontrant les avantages de la diversité à la haute direction des entreprises, tant au niveau de la performance financière que de l’engagement des employés, du branding ou de la culture.
L’Europe de l’Est, championne de la parité!
Alors que mondialement un tiers des entreprises n’ont toujours pas une seule femme dans des postes de haute direction, une région se démarque: l’Europe de l’Est. Là-bas, 35% des postes de haute direction sont occupés par des femmes (45% en Russie!) et à peine 16% des entreprises n’ont aucune femme cadre supérieure. Il semblerait que ce soit le legs des régimes communistes qui ont comme valeur centrale l’égalité. Voyons ce qu’il en est dans les autres pays.
En Australie, la proportion de femmes siégeant dans les conseils d’administration des sociétés de l’ASX 200 est passée de 19,4% en 2012 à 23,4% en 2016. Ce progrès est principalement dû au fait que 82 % de ces sociétés se sont dotées d’une politique interne fixant un objectif chiffré de représentation féminine dans les instances décisionnelles.
L’Afrique, la bonne élève des régions émergentes
L’Afrique, où les femmes occupent de plus en plus les postes de haute responsabilité, est largement en tête des régions émergentes avec 14,4 % de femmes membres d’un CA d’entreprises d’envergure (Asie-Pacifique 9,8 %, Amérique latine 5,6 %, Moyen-Orient 1 %).
Pendant ce temps, au Japon, il est difficile pour les femmes de concilier vie familiale et vie professionnelle. Leur sous-représentation fait partie de la culture alors que 70% des femmes travaillent à temps partiel et moins de 4% d’entre elles siègent au CA de sociétés cotées en bourse.
Canada: ne vous laissez pas berner par le 20%!
Au Canada, les femmes n’occupent que 15,9% des sièges des conseils du FP500. Si vous entendez parler d’une proportion de 20%, sachez qu’il s’agit des sociétés du TSX60, donc les 60 plus importantes sociétés cotées en bourse au Canada, ce qui n’est pas représentatif de notre société dans son ensemble. D’ailleurs, une seule de ces 60 sociétés a une femme comme chef de la direction.
Pourquoi le progrès semble-t-il si lent au Canada par rapport à l’Europe? La réponse est simple: les quotas! Mais est-ce que cela fonctionne réellement? Si on parle de nombre de femmes dans les CA, la réponse est oui! Si on parle de nombre de femmes dans les comités exécutifs ou à la présidence, la réponse est non! En effet, les pays scandinaves, qui furent les premiers à avoir imposé des quotas il y a plus d’une décennie, ont rapidement atteint la parité dans les CA. Mais ils ont, à ce jour, moins de 20% de femmes dans les comités exécutifs.
Au Québec, en 2007, sous le gouvernement Charest, la Loi sur la gouvernance des sociétés d'État a permis en cinq ans une augmentation significative des femmes de 27,5 % à 52,4 % dans les conseils de ces 22 sociétés.
Faut-il conclure que quand on légifère on trouve des femmes et quand on ne légifère pas on trouve des excuses?
La France, grâce à la Loi Copé-Zimmermann prévoyant 40% de femmes dans les CA pour 2017, a fait des pas de géants. Rappelons qu’en 2010 la France et le Canada étaient au même stade: 12% de femmes dans les conseils, et qu’en 2017 la France est en voie d’atteindre les 40%... Marie-Jo Zimmermann, la députée qui a coécrit cette fameuse loi, m’avait d’ailleurs reçue à l’Assemblée Nationale à Paris il y a 18 mois. Mon témoignage de nos faibles résultats en matière de l’atteinte de la parité l’a surprise puisque le Canada est vu dans le monde comme étant avant-gardiste.
Quelques mois plus tard, je rencontrais, à Londres, Susan Vinnicombe, auteure du rapport sur la situation des femmes dans les CA britanniques et membre du comité national de Lord Davies. Ce dernier avait été investi d’une importante mission par David Cameron: doubler le nombre de femmes dans les CA. Ce fut fait en cinq ans, passant de 13 à 26%. Ces progrès fulgurants furent atteints sans législation, mais avec une réelle volonté émanant du chef d’État. Celle-ci s’est traduite par des groupes de réflexion et d’action réunissant toutes les parties prenantes. Un effort concerté, une attention soutenue, un sentiment d’urgence et surtout des objectifs mesurables avec un échéancier clair ont été fixés pour permettre cette progression. De plus, David Cameron a personnellement signé des lettres de sensibilisation adressées à chaque président de conseil n’ayant aucune femme autour de la table. Une demande officielle en ce sens a d’ailleurs été transmise par le comité des relations gouvernementales de La Gouvernance au Féminin à notre premier ministre Justin Trudeau. Nous attendons la suite.