Le 16 octobre dernier, j’ai entendu un slogan qui ne m’a pas laissée indifférente : « Devenir inapte n’est pas un choix ». C’était à l’occasion du lancement d’une version simplifiée du mandat de protection par le Curateur public.
Je vois d’un très bon œil cette campagne qui a pour but de sensibiliser les Québécois à l’importance d’avoir un mandat de protection. Celui-ci a pour rôle de désigner une personne de confiance afin que cette dernière agisse en votre nom lorsque vous ne le pourrez plus.
Un sondage publié par le curateur public en 2016 nous révèle que 42% des répondants détiennent un mandat, ce qui représente une hausse de 6% par rapport à 2010. Chez les 65 ans et plus, 78% ont fait leur mandat. Les Québécois semblent en effet faire preuve de prudence face à l’inaptitude.
Selon le sondage en question, presque 85% des répondants ont préparé leur mandat devant le notaire. Malgré qu’il soit possible de préparer un mandat sans notaire à l’aide des formulaires simplifiés et accessibles en ligne en format PDF (sur le site du Curateur public), il reste prudent d’avoir l’aide et les conseils d’un juriste pour s’assurer de ne rien oublier.
Personne ne choisit de devenir inapte. Et l’inaptitude n’avertit pas. Me Normand Jutras, curateur public du Québec, l’a d’ailleurs souligné : « bien évidemment, personne ne souhaite s’imaginer être incapable de s’occuper de sa personne ou ses biens. Mais l’inaptitude peut survenir n’importe quand, à n’importe quelle étape de vie ».
Un traumatisme crânien survenant suite à un accident de voiture ou un accident de ski, par exemple, peut rendre quelqu’un inapte. Tous les jours nous partons travailler sans savoir ce qui pourrait nous arriver. Et que dire de la population vieillissante? La cohorte des 65 ans et plus représente 16,9% de la population canadienne, et ce nombre est en croissance. On estime que d’ici 2041, les aînés compteront pour le quart de la population.
Population vieillissante rime inévitablement avec enjeux de santé. Les diagnostics débilitants et de troubles cognitifs importants comme l’Alzheimer vont se multiplier. L’âge d’or amène en effet son lot de défis, parmi lesquels on retrouve également la vulnérabilité financière.
Le mandat de protection est un excellent moyen pour veiller à ce que vos affaires financières et votre bien-être soient pris en charge si vous devenez incapable de le faire. Vous devez nommer une personne qui agira à titre de mandataire. Vous pouvez aussi envisager de nommer deux personnes, une qui pourrait s’occuper de votre bien-être et l’autre d’administrer vos biens. Le ou les mandataires auront le plein pouvoir d’agir en votre nom. Vous devrez également choisir un substitut au cas où votre premier choix (ou vos premiers choix) ne pourrait agir en votre nom pour des raisons qui sont hors de leur contrôle, par exemple, s’ils sont eux-mêmes malades, ou bien même décédés.
Le mandat est activé uniquement si une inaptitude est confirmée. Le processus commence avec des évaluations médicales et psychosociales sur la personne. Ces évaluations sont validées par le tribunal. Ensuite, un jugement est déclaré et le mandat entre en vigueur, donnant aux mandataires le pouvoir d’agir au nom du mandant.
Le mandat d’inaptitude prend fin lors du décès du mandant, ou si ce dernier redevient apte. Après le décès, il revient plutôt au liquidateur testamentaire de prendre en charge l’administration de la succession.
Bien qu’il y ait de plus en plus de Québécois qui prennent conscience de l’importance du mandat de protection, je suis d’avis qu’il y a encore un chemin à parcourir. Dans un monde idéal, chaque Québécois en âge de majorité aurait un mandat.