Seulement 4% des organismes disent utiliser ces technologies «à leur plein potentiel», le plus souvent par manque d’argent ou d’expertise. (Photo: 123RF)
Québec investit 5,4 millions $ pour aider les organismes sans but lucratif (OSBL) de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale à entamer leur virage numérique, annonce le ministre du Travail, de l’Emploi et de la Solidarité sociale, Jean Boulet.
Le programme DATAide, piloté par les organismes Centraide et Nord ouvert, offrira une série de formations aux participants et leur donnera accès à des bourses pouvant aller jusqu’à 50 000 $.
«Ça peut être pour des licences pour une application, ça peut être pour la mise à niveau de l’équipement», a cité comme exemple le président et directeur général de Centraide du Grand Montréal, Claude Pinard, en entrevue téléphonique.
Si Centraide a créé ce programme, c’est parce qu’il a découvert que 30 % des organismes communautaires avaient un retard sur le virage numérique avant la pandémie. «Le mot “retard” est important, parce que des fois ça veut dire que tu n’as même pas commencé», a expliqué Claude Pinard.
Une étude de 2019 de l’Observatoire québécois des inégalités a fait ce constat. Dans le même rapport, on peut lire que la majorité du personnel des OSBL québécois dit avoir « peu » de connaissances au sujet du virage numérique et que seulement 4% des organismes disent utiliser ces technologies «à leur plein potentiel», le plus souvent par manque d’argent ou d’expertise.
«Il est essentiel que les services offerts par les organismes soient adaptés à la réalité d’aujourd’hui. Les organismes participants pourront non seulement réduire la fracture numérique, mais aussi innover et être encore plus agiles en ce qui concerne leur capacité à soutenir les personnes en situation de vulnérabilité», a souligné le ministre Boulet dans un communiqué de presse.
La magie des données
Alors que la pénurie de personnel fait rage dans la province, l’utilisation de nouvelles technologies pourrait être pour plusieurs un moyen de garder la tête hors de l’eau.
Le but, c’est «de venir s’assurer que les postes qui ne sont pas pourvus peuvent l’être avec un peu d’aide sur le plan de l’intelligence artificielle», tout en conservant ceux qui sont déjà occupés, a indiqué Claude Pinard. «Si tu automatises certaines de tes tâches, tu peux libérer tes ressources humaines pour être encore plus près des populations que tu essaies de desservir.»
Mais la technologie pourrait aussi ouvrir la porte à des possibilités inédites. L’analyse des données pourrait par exemple donner une idée beaucoup plus claire de quels sont les besoins, et à quel endroit.
«Disons qu’en 2021 on avait x personnes qui avaient de la difficulté à se trouver un logement, a mentionné M. Pinard. Si nous étions capables d’automatiser un certain répertoire des baux qui sont disponibles ou pas disponibles, nous aurions des données fermes, en 2023, pour dire “la situation s’est améliorée” ou “la situation s’est dégradée”».
Selon lui, «il y a vraiment une opportunité d’être plus stratégiques dans l’ensemble des investissements, mais aussi dans l’ensemble des interventions».
Un pas après l’autre
Trois niveaux de formation seront offerts, chacun d’eux débloquant l’accès des bourses à la valeur croissante.
Les premières bourses, d’un montant maximal de 5000 $, seront ouvertes dès mai. Les bourses de deuxième niveau, de 15 000 $, seront disponibles à l’automne et celles de dernier niveau, de 50 000 $, feront leur arrivée à l’hiver prochain.
Les choses sont organisées de cette manière, car en consultant une cinquantaine d’organismes, Centraide du Grand Montréal a réalisé que tous n’étaient pas à la même place. «Il y a des gens qu’il faut qu’ils débutent, il y a des gens qu’il faut qu’ils accélèrent et il y a des gens qui sont peut-être déjà rendus à la phase d’innovation».
Même avec l’aide offerte, la route sera longue pour rattraper «le fossé technologique» auquel sont confrontés de nombreux OSBL, a convenu Claude Pinard, mais l’annonce de lundi est d’après lui «un excellent début».