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STAGES EN ENTREPRISE. Rien n'oblige pour l'instant les entreprises à payer leurs stagiaires... sauf peut-être la pénurie de main-d'oeuvre.
De son côté, l'Ordre des conseillers en ressources humaines agréés (CRHA) assure que l'avenue la plus avantageuse est de rémunérer les stagiaires pour leurs efforts. « Si c'est seulement un stage d'observation, ne pas rémunérer est adéquat, nuance sa directrice générale, Manon Poirier. S'il y a prestation de travail, il devrait toutefois y avoir une rémunération. »
Dans le contexte actuel, où ce sont les candidats qui choisissent les employeurs plutôt que l'inverse, les stages rémunérés peuvent être une bonne façon de s'assurer de trouver du nouveau personnel qualifié. « Non seulement les stages permettent d'attirer de la main- d'oeuvre, mais il s'agit là de main-d'oeuvre très motivée, très qualifiée, très engagée et très ouverte à s'impliquer, détaille Mme Poirier. C'est sûr que ça peut effectivement pallier la rareté. »
Pour la culture d'entreprise
Selon Mme Poirier, c'est une excellente façon de séduire les étudiants pour une entreprise qui n'a pas la capacité d'offrir les salaires les plus compétitifs de son industrie à ses nouveaux embauchés. Un stage donne l'occasion à un étudiant de s'immerger dans la culture d'entreprise, de former des liens, d'apprivoiser les collègues et de connaître les gestionnaires. S'il s'y plaît, c'est tout un atout. « On a vu des gens accepter un emploi dans l'entreprise où ils avaient fait leur stage même s'ils auraient peut-être pu avoir un emploi plus payant ailleurs, explique-t-elle. Ils se sont dit: "Je suis prêt à sacrifier quelques milliers de dollars, parce que je sais que j'aime cette culture-là". »
Bien sûr, pour vraiment retenir les stagiaires, il faut garder à l'esprit qu'ils ont plus d'options qu'auparavant et qu'ils aiment relever des défis. Pour leur donner l'envie de rester, il faut que leur passage dans l'entreprise les ait charmés. « L'idée est de confier aux stagiaires des tâches à valeur ajoutée plutôt que des tâches cléricales qui ne contribueront pas du tout au développement de leurs compétences, précise Mme Poirier. Si les projets ne sont pas intéressants ou si le stage n'est pas stimulant, on ne recrutera pas beaucoup. »
Recruter plus large
L'Unité de travail pour l'implantation de logement étudiant (UTILE), un organisme coopératif qui compte actuellement 200 logements en développement à Montréal, rémunère ses stagiaires depuis 2016. Auparavant, et depuis sa fondation en 2013, il carburait toutefois aux stages non rémunérés.
Deux changements ont accompagné ce virage. Le premier est l'élargissement de son bassin de recrutement. « Quand on avait des stages non rémunérés, on attirait surtout des gens qui peuvent travailler trois mois sans salaire, se souvient Laurent Levesque, le cofondateur et coordonnateur général de l'UTILE. Ça limitait notre bassin de recrutement. En rémunérant les stages, nous avons plus de choix, nous avons des candidatures de profils d'une plus grande diversité. »
Le second changement concerne la motivation des étudiants. « Rémunérer les stagiaires, ça les amène à voir le stage comme un véritable emploi plutôt qu'un truc à côté », explique M. Levesque. Cela amène aussi l'entreprise à s'assurer que les stagiaires font du vrai travail plutôt que des fonctions de soutien... comme la traditionnelle préparation du café.
La stratégie a-t-elle payé ? M. Levesque estime que oui. Plusieurs de ses stagiaires sont devenus des recrues « d'une qualité exceptionnelle ».
Proposer des stages rémunérés l'a aussi aidé à combattre la pénurie d'une autre façon. Prendre des stagiaires sous son aile est bien perçu dans le milieu professionnel, ce qui ajoute à la réputation de l'entreprise. Ce qui n'est pas négligeable dans un domaine où l'on constate aussi une pénurie de stages. « On jouit d'une bonne réputation et on est mieux positionnés sur les campus, car les gens savent qu'on offre des stages rémunérés de qualité, affirme M. Levesque. Je pense que ça aide à recruter, même au-delà des personnes à qui on a offert des stages. »