En achetant les actifs français d’Enel Green Power, Boralex est devenue le plus important producteur d’énergie éolienne indépendant de ce pays. Les dirigeants ont su imposer l’entreprise québécoise parmi plusieurs concurrents qui convoitaient la même proie.
Les dirigeants de Boralex connaissaient bien Enel Green Power (EGP), un acteur important de l’énergie éolienne et un de leur concurrent sur le marché français. Lorsqu’ils ont appris qu’EGP souhaitait se départir de ses actifs français, ils ont voulu saisir l’occasion pour diversifier leur marché et augmenter leur présence dans l’Hexagone. Après la transaction, Boralex disposait au total d’un quart de puissance installée de plus qu’avant, et surtout faisait bondir ses actifs français de 72 %. Sur ses 280 employés, 100 sont désormais en France, 20 aux États-Unis et 160 au Canada.
« En Amérique du Nord, le marché de l’énergie éolienne est un peu moins prospère qu’il y a quelques années, car les programmes d’appels d’offres publics se font moins nombreux, explique Patrick Lemaire, pdg de Boralex. Les acquisitions, notamment à l’étranger, deviennent donc cruciales pour poursuivre notre croissance. »
La France est d’autant plus intéressante que l’État s’y est donné comme objectif de tirer 20 % de sa production d’énergie de sources renouvelables, notamment l’éolien. Cela rend beaucoup plus prévisible le potentiel de croissance.
Au-delà de la diversification géographique, les actifs d’Enel étaient attrayants en raison d’un carnet de projets bien remplis. La division française d’EGP, en plus de 186 mégawatts (MW) nets d’énergie éolienne déjà en exploitation dans 12 parcs éoliens et de 10 MW supplémentaires en construction, dispose d’un vaste portefeuille de 310 MW de projets à venir, dont une partie est déjà très avancée. Elle mise aussi sur des contrats d’achat d’électricité avec Électricité de France, dont la durée résiduelle moyenne est de 11 ans. Bénéficiant de tarifs garantis, ils aideront Boralex à générer des flux de trésorerie prévisibles et récurrents.
La petite séduction
Pour faire cette acquisition, Boralex a déboursé 400 millions de dollars canadiens. Mais l’entreprise a dû faire bien plus que de montrer des billets verts pour convaincre Enel de lui céder ses actifs français. « Nous sommes un relativement petit joueur, qui avait été retenu au second tour d’appel d’offres, rappelle Patrick Lemaire. Nous devions démontrer que nous étions à même de réussir une acquisition aussi importante dans un délai serré, car Enel souhaitait absolument que la transaction soit close avant janvier 2015. »
Mais Boralex avait quelques atouts dans son jeu. Elle n’en était pas à sa première acquisition, bien que celle-ci soit sa plus importante jusqu’à maintenant. Elle avait les capacités financières pour se lancer. Mais surtout, elle répondait à certains critères importants pour EGP. Très attachés à l’équipe en place chez EGP France, les dirigeants d’Enel souhaitaient ardemment que les nouveaux acquéreurs la gardent en place. Or, Boralex prévoyait justement intégrer une grande partie de cette équipe.
Le fait que Boralex soit un développeur-opérateur a aussi séduit Enel. Il était clair que Boralex acquérait le portefeuille de projets d’EGP France pour le réaliser, et non pour le revendre.
Encore toute fraîche, l’acquisition d’EGP France est au stade de l’intégration. Boralex met notamment beaucoup l’accent sur l’optimisation de la production d’électricité dans les parcs en exploitation. Elle doit aussi bien arrimer les outils de suivi et de gestion des nouveaux actifs à ses propres systèmes. Elle fait tout cela en restant à l’affût d’autres bonnes occasions.
« Notre capacité à faire une nouvelle acquisition rapidement est réduite en raison de l’intégration d’Enel, mais nous avons démontré que nous avions les ressources pour trouver le financement afin de réaliser ce type de projet, lance Patrick Lemaire. Nous pourrons le refaire si une occasion similaire se présente, afin d’apporter de la valeur à nos actionnaires. »