Philanthropie: Des mesures d’impact complexes


Édition du 08 Avril 2017

Philanthropie: Des mesures d’impact complexes


Édition du 08 Avril 2017

Par Benoîte Labrosse

Depuis 2010, le programme ÉvalPop de ­Centraide et du ­Centre de formation populaire est offert à tous les organismes que ­Centraide soutient.

Les partenaires financiers des organismes à but non lucratif (OBNL) s'attendent dorénavant à plus qu'une traditionnelle reddition de comptes ; ils demandent à constater leurs résultats sur le terrain. «Auparavant, nous voulions nous assurer que les organismes allaient bien gérer les sommes d'argent recueillies, illustre Mario Régis, vice-président développement social chez Centraide du Grand Montréal. Depuis, nous avons essayé de raffiner notre analyse afin de pouvoir dire aux donateurs que leur argent a le plus grand impact possible.»

Cet impact représente «la transformation qui est générée dans une communauté par la contribution d'un organisme», précise Natalie Chapdelaine, gestionnaire pour le Québec et les communautés francophones d'Innoweave.

Centraide savait bien qu'en demandant aux 340 OBNL qu'il appuie de «connaître et faire connaître ses résultats», il obtiendrait des réponses variées, même si tous luttent contre la pauvreté et l'exclusion sociale. «Les disparités sont tellement grandes que ça deviendrait extrêmement difficile d'avoir une même mesure pour tout le monde, souligne M. Régis. Les indicateurs de succès ne seront pas les mêmes en sécurité alimentaire, en persévérance scolaire ou auprès des réfugiés. C'est pourquoi il est important que chaque organisme se dote de ses propres mesures d'impact.»

Comme la plupart des OBNL ne possédaient pas les connaissances nécessaires pour y parvenir, Centraide a conçu le programme ÉvalPop en collaboration avec le Centre de formation populaire. Depuis 2010, cette formation «fortement suggérée» en évaluation des résultats est offerte gratuitement à tous les organismes que Centraide soutient. «Pour nous, l'évaluation fait partie intégrante d'une saine gestion d'organisation, donc nous voulons faire en sorte qu'ils soient capables de la faire par eux-mêmes, et évidemment qu'ils nous en parlent après, pour que nous puissions transmettre les résultats aux donateurs», explique M. Régis.

Amitié Soleil est l'un des quelque 200 organismes qui ont pris part à ÉvalPop à ce jour. Pour mesurer si ses activités de francisation facilitaient effectivement l'intégration sociale et l'autonomie des participants, l'OBNL de la Petite-Bourgogne a tenu un journal de bord. Les résultats ont été concluants. «Être en mesure de prendre un rendez-vous chez le médecin, d'accompagner son enfant à l'école et d'interagir avec le personnel enseignant, ou encore d'échanger avec ses voisins sont autant de précieuses victoires pour les apprenants», affirmait la directrice générale d'Amitié Soleil, Linda Girard, en 2015.

Objectif amélioration

«Le travail de Centraide et d'autres fondations qui ont commencé à demander des mesures d'impact a vraiment eu un effet sur l'ensemble des organismes au Québec», fait remarquer Pascal Lépine, président et fondateur d'Atypic, une firme de services-conseils spécialisée auprès des OBNL. «Monsieur et Madame Tout-le-Monde se contentent encore de savoir si l'argent est bien géré et à quoi il sert, mais les grands donateurs, les fondations et les entreprises - qui ont une connaissance beaucoup plus pointue du marché - veulent maintenant des mesures d'impact.»

N'allez toutefois pas croire que les résultats de ces mesures sont ce qui intéresse le plus Centraide. «Que les organismes n'aient pas atteint les cibles qu'ils se sont données, ce n'est pas dramatique, assure Mario Régis. Ce qui est important, c'est comment ils vont corriger le tir pour y parvenir.»

«Chaque mesure doit être intrinsèquement reliée à la compréhension de l'impact qui est recherché, explique Natalie Chapdelaine, d'Innoweave. Ce qui appelle d'abord un travail de clarification de cet impact.»

Toujours ensemble, qui oeuvre pour la persévérance scolaire et la réussite sociale des jeunes à Verdun, a par exemple effectué cette réflexion en 2015. Son programme Sac à dos, centré sur la prévention du décrochage au primaire, terminait alors sa phase pilote. «C'était le bon moment pour voir si nos objectifs étaient tout à fait en lien avec les besoins sur le terrain et pour tenter d'améliorer ce que nous avions établi», raconte sa coordonnatrice, Mariana Caloca.

L'équipe a ainsi pu constater qu'elle était axée sur la mesure de performance. «Nous en avons discuté avec les professeurs, les participants, leurs parents et d'autres intervenants pour en venir à la conclusion que notre impact sur les notes des élèves était limité, admet Mme Caloca. Nos plus grands impacts positifs concernaient plutôt le niveau de motivation, le sentiment d'appartenance et les méthodes de travail.» Sac à dos a ajusté en conséquence ses outils de mesure, notamment un plan d'action individuel et des questionnaires distribués aux élèves et aux parents. Deux bilans sont produits chaque année. «Pouvoir constater nos résultats de manière concrète et quantifiée nous encourage dans notre travail», estime la coordonnatrice.

Si instaurer des mesures d'impact peut avoir plusieurs conséquences positives, les OBNL ne doivent pas négliger les possibles effets pervers qui découlent du rapport de force des donateurs. «Il ne faut pas que quelqu'un d'autre décide pour l'organisme de l'impact qu'il devrait avoir, avertit Pascal Lépine. Certains bailleurs de fonds sont plus directifs et veulent des impacts précis, ce qui peut inciter des organismes à modifier la manière dont ils travaillent pour aller chercher des fonds.» M. Lépine suggère d'ailleurs aux OBNL de «ne pas hésiter à refuser certaines sommes d'argent plutôt que de dénaturer leurs façons de répondre aux besoins du milieu qu'ils desservent».

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