Si vous n'avez pas encore entendu parler du nouveau président de la SAQ, n'en soyez pas surpris. Depuis son entrée en poste, le grand patron de la société d'État est d'une discrétion qui tranche avec le bruit médiatique qui entourait les faits et gestes de son prédécesseur, Sylvain Toutant. Cela augure de l'ensemble de son mandat, pense un expert.
C'est au terme d'une longue attente que nous avons obtenu une entrevue avec celui qui dirige la SAQ depuis plus d'un an. Nommé officiellement pdg en juin 2008, M. Duval occupait l'intérim à la tête de l'entreprise depuis novembre 2007.
Selon Isabelle Merizzi, porte-parole de la SAQ, c'est par une volonté délibérée de faire parler la SAQ plutôt que de lui que M. Duval s'est jusqu'ici fait absent de l'écran radar des médias. Il justifie sa discrétion par les défis considérables qui l'occupent.
Pour Yan Cimon, professeur au département de management de l'Université Laval, la présidence de M. Duval devrait faire moins de vague que celle de l'ancien pdg de la SAQ, Sylvain Toutant. Philippe Duval jouit déjà d'une expérience dans l'entreprise d'État et il est beaucoup plus à même de jauger la dimension politique de son rôle, dit-il.
Au moment de sa nomination, des sources libérales suggéraient d'ailleurs qu'on l'avait choisi justement pour sa discrétion et parce qu'on ne voulait pas d'un pdg qui allait " tout chambarder ".
L'expérience de M. Duval, qui a bien réussi dans le passé chez le fabricant de produits laitiers Danone, contraste aussi avec celle de M. Toutant, qui arrivait de chez Réno-Dépôt. Malgré des qualités exceptionnelles de gestionnaire dans le commerce de détail, M. Toutant a dû composer avec un problème d'image dès le début, dit Yan Cimon. " Le problème de M. Toutant en était un de perception. Les gens se disaient qu'on ne peut pas vendre du vin comme on vend des écrous. "
La stratégie du compromis
M. Cimon voit d'ailleurs d'un bon oeil la stratégie mise en oeuvre par la SAQ depuis l'arrivée de M. Duval. " On semble en être arrivé à un bon compromis entre l'expansion de l'offre de produits, destinée à satisfaire les connaisseurs, et la réduction de nombre de produits pour améliorer la rentabilité. "
En misant sur le conseil et en cherchant à mener les Québécois à mieux boire, la SAQ se conforme aussi à son mandat social, selon le professeur.
Pour M. Cimon, il faut juger les succès récents de la SAQ selon la vision favorable qu'en ont aujourd'hui les Québécois. " Il y a quelques années, acheter du vin à la SAQ n'était pas une expérience très agréable ", rappelle-t-il.
De nos jours, on entend encore de temps à autre des gens réclamer la privatisation de la société d'État, mais les tenants de cette option " représentent un courant minoritaire ", affirme M. Cimon.