Qu'est-ce qui rend la situation économique mondiale actuelle particulièrement exigeante ?
Premièrement, nous ne vivons plus dans un monde à deux vitesses, mais dans un monde à plusieurs vitesses. Dans les pays du BRIC, la Chine a de meilleures chances de croissance grâce à ses réformes. Dans le monde développé, le fossé se creuse entre l'Europe et les États-Unis. Si les Américains peuvent régler leurs dysfonctions gouvernementales, les États-Unis offriront de meilleures perspectives. Deuxièmement, la révolution technologique est un facteur qui donne aux organisations la capacité d'analyser rapidement une foule de données et de créer du nouveau. Troisièmement, la réglementation prend une importance accrue. Et quatrièmement, depuis la mondialisation et l'automatisation, ce que j'appelle «le compromis capitaliste» est menacé. Le capital et la main-d'oeuvre ne vont plus de pair. Même si les rendements du capital sont élevés, la main-d'oeuvre souffre, la classe moyenne s'érode. Ces tendances créent une grande incertitude. Nous vivons dans une période de changement accéléré.
Comment les entreprises doivent-elles composer avec ces changements ?
On ne peut plus penser croître avec le marché. D'abord, il faut croître en créant de la nouvelle valeur. Innover et, en même temps, être productif, ce qui peut sembler contradictoire, car on devient productif à force de répéter les mêmes façons de faire. Mais la concurrence s'intensifie et elle ne vient pas juste de celui qui fabrique le même produit que vous. Ensuite, il faut que la mission de l'entreprise soit axée sur le long terme, même si on a toujours d'excellentes raisons d'agir à court terme. Le défi maintenant est de satisfaire toutes les parties prenantes, pas seulement les actionnaires.
Quelles sont les qualités personnelles d'un bon leader, dans ce contexte ?
Il doit avoir une idée claire de la direction et des priorités de son entreprise. Faire preuve d'une grande capacité d'adaptation. Avant, on comparait le chef d'entreprise à un chef d'orchestre symphonique. Aujourd'hui, pensez à un orchestre de jazz, où on laisse de la place à la créativité et à l'improvisation. Un bon leader s'assure aussi de communiquer le même message à tout le monde et d'être transparent. Elle est révolue, l'époque où on adaptait notre message à notre public.