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Lumed, de Sherbrooke, déploiera au début de 2017 un nouveau logiciel pour le service des soins intensifs de l'hôpital Fleurimont du Centre hospitalier universitaire de Sherbrooke (CHUS). Cet outil permettra entre autres de mieux surveiller l'utilisation des vasopresseurs, des substances qui permettent d'augmenter la pression artérielle du patient en cas d'urgence.
Comme la réaction physique de chaque personne à ces substances, dont l'adrénaline, se prévoit difficilement, une dose trop importante est susceptible de générer de graves problèmes de santé. «Les vasopresseurs peuvent sauver des vies, mais ils peuvent aussi causer la mort, indique Vincent Nault, pdg de Lumed. Pour les administrer, il faut parfois procéder à des ajustements, jusqu'à 20 par heure.»
Branchée sur les moniteurs des patients, l'application de Lumed permettra de traiter en temps réel des informations, telles que le rythme cardiaque du patient, sa tension artérielle ainsi que la saturation en oxygène dans son sang. Il générera des alertes auprès des pharmaciens et des médecins lorsque les données récoltées suggéreront de revoir le plan d'intervention. L'application permettra d'afficher sur l'ordinateur des professionnels de la santé une mesure de la gravité de la situation, en plus d'illustrer l'évolution de l'ensemble des variables enregistrées en un seul graphique.
Le logiciel intègre le système APSS de surveillance des prescriptions d'antibiotiques, développé auparavant par Lumed selon un principe similaire, mais pour des situations nécessitant des alertes moins fréquentes. Déjà branché sur environ 700 lits au CHUS, le logiciel APSS a permis, depuis son implantation en 2010, de réduire de 20 % la consommation d'antibiotiques et de diminuer de deux jours la durée moyenne de séjour des patients subissant ce type de traitement. Résultat : le logiciel a fait économiser 1,8 million de dollars à l'établissement de santé.
Nouvelles propriétés intellectuelles
La PME de sept employés déploiera sa nouvelle solution informatique par un projet de recherche établi en collaboration avec l'Université de Sherbrooke. Le Fonds Merck Sharp & Dohme, le créneau d'excellence Accord SAGE-Innovation, la pharmaceutique Roche Diagnostics et le consortium de recherche et d'innovation en technologies médicales du Québec (MEDTEQ) ont notamment participé à la démarche, pour un investissement d'environ 600 000 $. Le logiciel réalisera aussi un suivi de l'utilisation de la procalcitonine, un biomarqueur servant à évaluer une infection bactérienne, que vend Roche Diagnostics.
«On cherche à démontrer et à augmenter la valeur du test dans les mains des cliniciens par l'encadrement du logiciel de Lumed», dit Michele D'Elia, directeur des affaires médicales chez Roche Diagnostics, au sujet de la participation de son entreprise.
Comme le projet-pilote s'effectue dans le cadre d'une recherche universitaire, Lumed ne touchera pas de profits en permettant, dans un premier temps, à l'hôpital d'utiliser le logiciel sans frais. «Cela permet de développer en collaboration de nouvelles propriétés intellectuelles», dit Vincent Nault. Dans un deuxième temps, l'entreprise se retrouvera en bonne position pour vendre sa solution éprouvée, tant auprès du CHUS que des autres établissements de santé.
Un projet étudiant devenu une entreprise
C'est avec ce modèle d'entreprise que Lumed a démarré. Le logiciel APSS a d'abord été mis au point par Vincent Nault et Mathieu Beaudoin, alors qu'ils étaient étudiants à l'Université de Sherbrooke, sous la supervision des professeurs Louis Valiquette et Froduald Kabanza. Le but consistait à trouver une solution informatique à la gestion plus intelligente des antibiotiques, pour à la fois prévenir le développement d'une résistance associé à leur surconsommation et réduire les dépenses des hôpitaux.
Un projet-pilote a été lancé en 2010 au CHUS, qui a ensuite acheté l'application APSS en 2011. Avec ce capital, Vincent Nault, Mathieu Beaudoin et Louis Valiquette ont fondé l'entreprise Lumed en 2012. La PME a ensuite remporté un appel d'offres de 330 000 $ en 2015 pour l'implanter durant cinq ans à l'hôpital de Chicoutimi.
La PME développe en parallèle un logiciel pour structurer l'information de façon à donner une meilleure vue d'ensemble des traitements de patients en oncologie. En revanche, la PME a mis en veilleuse son application Zinc pour la prévention des maladies nosocomiales. «Le produit existe s'il y a un appel d'offres, explique Vincent Nault, mais c'est un marché plus concurrentiel.»
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