Peu à peu, les médias sociaux changent la donne : l’acte d’achat est précédé par une «connexion émotionelle» avec le produit recherché.
«Les spécialites en marketing-communication ne peuvent plus se contenter de vendre directement leurs produit aux consommateurs. Il leur faut maintenant susciter le goût du produit, le goût d’y revenir et même, éventuellement, de le recommander», explique Pierre Parent, associé, vice-président, stratégie, chez Wasabi Communications.
Ces spécialistes doivent comprendre et utiliser les médias sociaux. De nouvelles compétences sont donc maintenant nécessaires. Car il faut savoir où et quand les consommateurs sont les plus réceptifs.
« On doit suivre son public-cible quotidiennement, être à l’écoute et être prêt à réagir très rapidement en cas de besoin. C’est ce qu’a démontré l’affaire Oasis-Lassonde. Ce qui n’est pas une évidence !», affirme M. Parent.
Très conscient de ce phénomène d’accélération du changement, tant chez le consommateur que dans les plate-formes de communication, le titulaire de la Chaire de relations publiques et communication marketing de l’UQAM, Bernard Motulsky, parle d’une «course contre la montre».
«Le marché va vite, très vite. Et plus vite encore que l’industrie de la communication-marketing. Ce qui pose le problème des ressources humaines. Il faut trouver des gens formés aux plus récentes technologies de communication», dit le professeur de l’UQAM.
D’autant plus que les médias sociaux doivent être utilisés à bon escient, martèle Justin Kingsley, associé chez Sid Lee.
«C’est là que réside, selon moi, le vrai défi des agences : trouver des façons intelligentes d’impliquer le consommateur dans le maintien de la marque», dit-il, en insistant sur la transformation du concept même de consommateur.
«Aujourd’hui, à cause des médias sociaux, les consommateurs croient que leur voix est porteuse. Il nous faut donc trouver comment les impliquer et comment leur donner les rôles qu’ils veulent jouer», précise M. Kingsley.
Dans cet esprit, les nouvelles compétences qu’exigent les médias sociaux ne sont pas que d’ordre technique. Elles impliquent beaucoup de finesse d’esprit et un sens stratégique très développé.
Une situation… temporaire?
Toutefois, en raison de sa barrière linguistique, le Québec dispose encore de médias traditionnels très puissants, observe Marc Fortin, vice-président et directeur création chez lg2.
«Pensons, par exemple, que tous les dimanches soirs, près de quatre millions de Québécois regardent les mêmes émissions de télé, au nombre de deux ou trois. On ne trouvera jamais un tel ratio ailleurs en Amérique du Nord», dit M. Fortin, en ajoutant que les grands journaux et stations de radio du Québec continuent à bien tirer leur épingle du jeu.
«Ailleurs, en Amérique, les publics se sont fractionnés, parfois à l’extrême, ce qui explique l’explosion beaucoup plus forte qu’ici des médias sociaux et des applications mobiles. Notre situation culturelle unique fait que les campagnes de communication-marketing sont moins dépendantes des médias sociaux. Mais attention, car dans cinq ans, cela pourrait être fort différent !», estime M. Fortin.
A l’heure actuelle, concourt Francis Armstrong, associé principal chez Bleublancrouge, «le défi de synthétiser une offre sur toutes les plates-formes» reste le défi numéro un des agences.
Montréal, en position de force
Ceci dit, estime Benoît Bessette, vice-président chez Cossette, la métropole québécoise dispose d’atouts considérables qui lui permettront de profiter de la tendance de l’heure : la production de contenus.
«L’avenir des marques passe par le développement de contenus, sur le Web, sur YouTube, en applications mobiles et sur les médias traditionnels. Les gens veulent être inspirés par la marque», insiste M. Bessette.
Il donne en exemple le détaillant américain Target, qui utilise une multitude de plate-formes afin de communiquer des conseils d’ordre pratique à sa clientèle féminine.
Or, poursuit M. Bessette, Montréal regorge de capacités de créations de contenus, puisque la métropole abrite de nombreux scénaristes, comédiens, designeurs, réalisateurs, maisons de production et spécialistes de technologies multi-plateformes.
Selon ce dirigeant de Cossette, il n’existe que deux autres endroits, en Amérique, qui sont aussi propices à la création de contenus que ne l’est Montréal. Soit New York et Hollywood.