Qui dit innovation dit souvent échec. À l'occasion des 21 ans du fabricant britannique de petits appareils électriques et d'aspirateurs Dyson, son fondateur James Dyson nous a fait part de sa vision de l'échec et de la R-D.
Les Affaires - Comment reconnaître un véritable échec, et comment savoir qu'il est temps d'abandonner un projet ?
James Dyson - C'est difficile à dire. On ne peut jamais être certain, lorsqu'on prend la décision de laisser tomber une idée. Mais plus on connaît d'échecs, plus on est capable de savoir s'il faut abandonner un projet ou simplement le mettre de côté temporairement. Nous avons abandonné des projets à quelques reprises. Une fois, nous avions développé un tank vac, une machine cyclonique trois en un pour laver les tapis. Nous trouvions le concept génial et le prototype fonctionnait bien. Avant la mise en marché, j'ai toutefois eu l'impression que ce n'était pas une bonne idée. Les tapis ne devraient pas être mouillés. Nous sommes donc restés avec nos appareils existants. Quelque temps plus tard, le marché des appareils secs et mouillés de ce genre s'est complètement effondré. Même si nous avions beaucoup investi en temps et en efforts, nous savions que nous avions pris la bonne décision.
L. A. - Quel est votre plus grand échec ?
J. D. - L'échec fait partie de ma routine : nous faisons des prototypes tout le temps. On essaie une idée, on construit un prototype et on échoue. Et puis, on réessaie. Des centaines de prototypes plus tard, on peut finalement connaître la réussite.
L. A. - Êtes-vous capable de retirer quelque chose de ces échecs ?
J. D. - À chaque fois. On peut apprendre beaucoup plus d'un échec que d'un succès. Nous avons lancé notre premier aspirateur sans sac il y a 21 ans, et nous avons maintenant plus de 400 brevets pour plus de 500 inventions. C'est quand même quelque chose.
L. A. - Quelle est la plus grande erreur des entrepreneurs lorsqu'ils tentent d'innover ?
J. D. - Abandonner trop rapidement. Il faut être persistant, et cela demande beaucoup de détermination ! Il m'a fallu 15 ans et 5 127 prototypes avant que mon premier aspirateur soit prêt. Et encore aujourd'hui, nos technologies demandent plusieurs années de développement. Il faut aussi être optimiste. Lorsque j'ai emprunté une grande somme d'argent pour lancer mon entreprise, que nous travaillions sur des projets et que nous accumulions échec sur échec, nous tentions de garder le sourire. Nous étions des étudiants sans le sou de toute façon, alors notre situation n'allait pas vraiment changer si le tout ne décollait pas.
L. A. - Après 21 ans, avez-vous encore peur de l'échec ?
J. D. - Non, j'y suis habitué ! Nous sommes une société d'ingénierie. Ce n'est pas facile de réussir ses produits. Et c'est ce qui rend l'aventure excitante.