Alors que les entreprises tentent de transformer leurs façons de faire pour rendre l'organisation plus accueillante auprès des femmes, beaucoup d'efforts restent à faire pour atteindre la parité homme-femme au sein des conseils d'administration. «En 2010, on évaluait que les femmes occupaient 18 % des postes de cadres et 16 % des sièges d'administrateur au sein des entreprises du S&P 500», rappelle Johanne Desjardins, administratrice de sociétés et directrice associée de KPMG-SECOR.
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D'après un rapport du Conseil consultatif du gouvernement canadien, publié en 2014, le pourcentage de femmes au sein des conseils d'administration du FP 500 atteint à peine 16 %, tandis que le gouvernement fédéral s'est fixé l'objectif d'atteindre 30 % de femmes d'ici 2019.
Au Québec, la Loi sur la gouvernance des sociétés d'État a fait en sorte que le taux de femmes au sein des CA des organismes publics est passé de 28 à 52,4 % en cinq ans.
Mais les entreprises privées sont encore à la traîne. «Les chiffres montrent qu'entre 2010 et 2013, la proportion de femmes a augmenté de moins de 2 %», souligne Johanne Desjardins.
«Il est très étonnant de voir qu'en dépit des règles qui obligent les entreprises inscrites en Bourse à déclarer le nombre de femmes présentes à leur CA, il y ait encore si peu de femmes aux postes d'administrateur ou au sein des hautes directions», juge Céline Blanchet, vice-présidente des affaires corporatives chez DeSerres et administratrice à la Société des alcools du Québec.
Des réflexes à développer
L'un des premiers leviers des entreprises consiste à présenter systématiquement des candidatures féminines aux postes à pourvoir.
«Il ne s'agit pas, bien entendu, de présenter une femme à tout prix, même si elle n'a pas les compétences requises. C'est à la fois une question d'affinités avec l'équipe, et la recherche de certaines qualités comme l'ouverture d'esprit, la vision, la capacité d'influence, l'esprit d'équipe et l'intégrité», précise Mme Desjardins.
La question des quotas, déjà appliqués au sein des entreprises publiques, peut aussi permettre aux organisations de se donner des cibles et les inciter à adopter des pratiques qui deviendront ensuite des réflexes. «Même si personne n'aime entendre parler de quotas, on voit bien que le fait d'avoir imposé la parité au sein des sociétés d'État a changé la donne», dit Mme Blanchet.
Elle rappelle que 7 des 12 membres du CA de la société publique sont des femmes. «Il ne s'agit pas d'une question de compétences, car on a des profils exceptionnels, avec des entrepreneures et des femmes telles que Liliane Colpron, de Première Moisson», précise Mme Blanchet.
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L'enjeu consiste à convaincre le pdg de l'entreprise et à changer les réflexes de la haute direction, souvent composée d'hommes, qui ne sont pas toujours portés à penser à la mixité lors des recrutements. «Il existe des candidates très qualifiées mais méconnues, car les réseaux d'influence sont à prédominance masculine», affirme Mme Desjardins.
Pour cela, il faut commencer par donner l'occasion, aux membres de la direction comme aux employés, de parler des avantages d'une féminisation accrue de l'organisation.
Ensuite, pour former la relève féminine, les organisations peuvent favoriser la mise en place de réseaux de mentors féminins, qui serviront d'exemple aux recrues. Les organisations peuvent jumeler les recrues à des membres de la haute direction, ou organiser des rencontres avec des femmes occupant des postes de leaders afin qu'elles témoignent de leur expérience.
Selon Céline Blanchet, les femmes doivent aussi avoir l'occasion de se faire valoir par leur travail : «C'est aussi en donnant la possibilité aux femmes d'être dans un comité de direction et de présenter des dossiers devant le CA qu'elles pourront ensuite montrer leurs compétences», souligne-t-elle.
Par ailleurs, la vice-présidente de DeSerres note l'ascension des femmes dans des milieux traditionnellement masculins, comme la finance. L'enjeu est important : des études démontrent que la mixité dans un CA permet d'améliorer l'efficacité et la rentabilité de l'entreprise.
«La mixité est toujours un élément positif, car les femmes ont des perspectives différentes de celles des hommes», dit Johanne Desjardins.
La directrice du Fonds monétaire international, Christine Lagarde, affirmait qu'un Lehman Sisters aurait peut-être causé moins de problèmes que Lehman Brothers. Céline Blanchet renchérit : «L'égalité homme-femme amène aussi l'amélioration des conditions économiques et sociales, grâce à la présence de femmes qui craignent moins de poser des questions».
Gouvernance
Série 4 de 5. Comment les conseils d'administration peuvent-ils se préparer à trouver des solutions aux principaux enjeux de gouvernance? Voici des conseils et des exemples de bonnes pratiques au sein des CA.
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