Profitant de son passage à Pékin dans le cadre de sa mission commerciale en Chine, le premier ministre du Québec Philippe Couillard rencontrera vendredi la haute direction de la minière chinoise Jilin Jien Nickel.
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On pourrait alors en savoir davantage sur ce qu’il adviendra de la mine Nunavik Nickel, de Canadian Royalties, située dans le territoire nordique du Québec. Un projet qui devait créer 400 emplois sur quinze ans, mais qui a été stoppé l’an dernier faute de liquidités et après d’importants ratés techniques.
«Nous rencontrons (les gens de Jilin Jien Nickel) à leur demande», a indiqué le premier ministre, interrogé par Les Affaires en marge d’une cérémonie de signatures d’ententes commerciales à Pékin. «Nous leur parlerons du Plan Nord, mais nous voudrons aussi connaître leurs intentions: combien d’emplois et combien de temps durera la mine», a-t-il ajouté.
Jilin Jien Nickel a acheté la mine de Canadian Royalties en 2010 pour moins de 200M$, une aubaine, à la suite de la crise financière qui a asphyxié le promoteur québécois. Elle était sur le point de démarrer, mais le projet qui devait livrer du cuivre et 160000 tonnes de concentré de nickel, a connu des problèmes techniques. L’extraction du nickel n’était pas optimale et un quai bâti par SNC-Lavalin, s’est effondré (SNC est d’ailleurs poursuivie pour 40M$ dans ce dossier).
Puis à l’été 2013, après avoir englouti 700M$ de plus dans le projet, la minière chinoise s’est fait couper les vivres par son principal bailleurs de fonds, la Bank of China. Résultat: une quinzaine d’entrepreneurs québécois n’ont pas été payés. La société a recruté la banque d’affaires Forbes and Manhattan pour réaliser une restructuration. Plus de la moitié du personnel a été mis à pied et l’équipe de direction a été éjectée. (Le président John Caldbick vient d’ailleurs de déposer une poursuite de 1,6M$ pour congédiement illégal).
Les rumeurs voulaient que la durée de vie de la mine soit réduite à trois ans. Depuis, la mine a réussi à faire des expéditions, d’abord de cuivre, pour payer une partie de ses sous-traitants.
En février 2014, les propriétaires ont annoncé l’injection de 200M$ additionnels dans la mine – s’ils obtenaient le financement - et en septembre, une première expédition de 23000 tonnes de nickel a été réalisée, via le passage du Nord-Ouest.
Phase 2 du projet
Philippe Couillard dit maintenant espérer voir «une phase deux» du projet. Il doit connaître assez bien le dossier, puisqu’il a lui-même siégé sur le conseil d’administration de la mine, quelques mois avant qu’elle ne devienne officiellement chinoise, en 2009.
Le potentiel minier du Québec et de l’Ontario a par ailleurs fait partie des sujets abordés mercredi à Pékin avec le ministre de l’énergie et des mines du gouvernement chinois, Jiang Dajing, que le premier ministre Couillard a rencontré, en compagnie de ses homologues du Conseil de la fédération canadienne, soit la première ministre de l’Ontario Kathleen Wynne et le premier ministre de l’Ile-du-Prince-Edouard, Robert Ghiz.
Tandis que Mme Wynnne a vanté son projet de Cercle de feu dans le nord de l’Ontario – qui est presque mort depuis que la minière américaine Cliffs Natural Resources a mis son projet de chromite sur la glace – le premier ministre québécois a rappelé que certains projets québécois avaient des partenaires chinois et qu’il travaillait sur des infrastructures afin d'accompagner les projets.
Une des préoccupations des partenaires chinois, notamment Wisco, dont M. Couillard a rencontré le patron mardi à Shanghai et qui est en coentreprise pour une mine de fer de 8G$ dans la Fosse du Labrador en plus d’être active dans deux autres sociétés canadiennes, réside dans le fait que le port de Sept-îles est bloqué aux expéditions à cause d’une dispute avec la minière Cliffs Natural Resources.
Cliffs possède deux mines de fer dans la fosse du Labrador en plus des terrains et un chemin de fer dans le port. Elle refuse de laisser transiter d’autres minerais que les siens sur le chemin de fer et le terrain. Depuis qu’elle éprouve des difficultés financières, elle envisage de vendre ses actifs dans la région.
Au sujet du nœud dans le port, le ministre de l’Économie, Jacques Daoust, qui participe lui aussi à la mission commerciale chinoise, a indiqué à Les Affaires qu’il allait forcer un règlement. «Nous ne laisserons pas une compagnie bloquer les expéditions», a-t-il assuré. Un message que lui et M. Couillard font passer aux Chinois pour les rassurer.
Quoiqu’il en soit, la demande de fer et de nickel en Chine est en baisse. Et les prix de ces métaux ont chuté, ce qui rend les projets québécois peu concurrentiels. De plus, le gouvernement chinois est en pleine transition à l’heure actuelle et toutes les décisions sont en suspens. Il ne faut donc pas avoir de trop fortes attentes côté nord, malgré la cour assidue à laquelle se livre Philippe Couillard.
Notre journaliste Suzanne Dansereau se trouve en Chine, où elle couvre la mission commerciale initiée par le gouvernement du Québec.
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