Les entrées en Bourse de compagnies québécoises ont été plutôt rares ces dernières années, mais c'est la voie qu'a choisie Manac, de Saint-Georges en Beauce, pour réaliser son plan de croissance par acquisitions. Son premier appel public à l'épargne à la Bourse de Toronto (TSX: MA), en septembre 2013 a permis au constructeur de semi-remorques d'atteindre son objectif de financement de 40 millions de dollars.
«On a eu le capital qu'on visait. Maintenant, est-ce que l'entrée en Bourse était la bonne décision? Six mois plus tard, je ne peux pas répondre. On saura dans un horizon de trois à cinq ans si on a répondu aux objectifs qu'on s'est donnés et qu'on a véhiculés lors de l'émission», affirme le président, Charles Dutil.
Manac, sortie de Canam en 2003 et devenue alors une société privée, a été présentée à son retour en Bourse comme un placement à plus long terme, axé sur la croissance. Son partenaire, American Industrial Partners, qui possède 36% des actions (autant que la famille Dutil), a un horizon de placement de cinq à sept ans. C'est en partie ce qui a motivé l'entrée en Bourse, car elle offre un outil de sortie intéressant, qui concrétise la valeur de la société.
Septième constructeur de semi-remorques en Amérique du Nord, Manac n'entend pas rejoindre les trois plus grands, mais cherchera à grandir en acquérant de petits constructeurs nord-américains spécialisés dans les véhicules pour les secteurs forestier, gazier, minier ou pétrolier, qui engrangent annuellement des revenus de 15 à 125 M$.
«Les trois gros constructeurs de notre industrie sont absents de ces secteurs, note M. Dutil. Manac [déjà dans les fourgons, les bennes et les fardiers] pourra avoir une ligne de produits complète.»
«Manac a à peine 3% de parts de marché en Amérique du Nord. Nos actionnaires veulent de la croissance, et notre jeune équipe est prête pour des défis plus élevés. La position que nous avons dans l'industrie comme le plus important des petits constructeurs permet un beau scénario de croissance.»
Charles Dutil souhaite concrétiser une première acquisition en 2014. Les revenus de 2013 ont atteint un sommet à 288 M$, et le carnet de commandes était bien rempli à 98 M$ au premier trimestre de cette année. L'entreprise procède aussi à des embauches maintenant que la crise est derrière. Dans les pires moments, la force de travail de Manac avait fondu à 675 employés; il y en a maintenant 1 050, dont 600 à Saint-Georges et les autres dans les deux usines du Missouri.
L'autre vecteur de croissance des profits sera la production optimisée. En 2012, Manac a entrepris l'amélioration de ses procédés de construction au Missouri, avec un gain de productivité de 20% en 15 mois.
«On vise des rendements similaires à Saint-Georges, dit Charles Dutil, mais on est conscient que ça prendra plus de temps. Les usines du Missouri sont plus petites, il y a moins d'expérience et moins d'inertie face au changement. Ce sont des concepts manufacturiers différents; et parfois, c'est apeurant, parce que c'est tellement simple que tu te demandes pourquoi tu n'y a pas pensé avant», songe M. Dutil, qui a notamment travaillé à réduire les stocks des produits en cours et des matières premières.