Lorsque le dollar a atteint la parité avec le billet vert, beaucoup de manufacturiers québécois ont délaissé le marché américain. D'autres ont pris le taureau par les cornes et ont fait des investissements dans l'automatisation ou procédé à des acquisitions.
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Aujourd'hui, ils sont mieux placés que les autres pour profiter du répit que leur accorde la baisse du dollar.
C'est le cas de Cabico, un fabricant d'armoires de cuisine sur mesure établi près de la frontière américaine, à Coaticook.
La baisse de la devise canadienne et celle anticipée des coûts de transport ont l'effet d'une agréable bouffée d'air. «La profitabilité accrue nous permettra d'accélérer notre croissance», indique le président, Alain Ouzilleau. Après l'agrandissement d'une de ses deux usines, il prépare une acquisition en 2015, soit en Ontario, soit aux États-Unis. «De prime abord, ce serait moins cher en Ontario, mais nous n'appuyons pas notre stratégie sur la base du taux de change», ajoute-t-il.
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Voilà 10 ans, lorsque le dollar canadien valait 0,63 $, Cabico a quand même choisi de diversifier ses ventes au lieu de les concentrer entièrement aux États-Unis. Il a développé le Canada. Lorsque la devise canadienne s'est hissée à parité avec le billet vert, cette stratégie l'a bien servi. Mais il n'a pas quitté les États-Unis pour autant. Il a plutôt misé sur l'efficacité opérationnelle, implantant le principe du lean manufacturing, ou production optimisée, et automatisé ses processus. Son effectif est passé de 500 à 250 employés.
Depuis 2013, la PME récolte les fruits de sa résilience. Ses ventes ont crû de 25 % en 2013. En 2014, elle a réembauché 70 personnes. Ce qui a eu un effet déstabilisant au début, mais M. Ouzilleau s'attend à une hausse des ventes de 20 % et des marges encore accrues pour 2015.
Un facteur tactique, mais pas stratégique
Sa règle d'or - qui consiste à ne pas jouer l'avenir de l'entreprise sur un facteur qu'on ne contrôle pas, comme le taux de change ou la baisse du prix du pétrole - est aussi celle qui anime l'un des champions du secteur manufacturier en Beauce, le groupe Canam.
«Je peux développer des tactiques en fonction de la devise, mais jamais ma stratégie à long terme», lance Marc Dutil, le président du fabricant de charpentes métalliques et de solutions de construction.
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D'autant plus que Canam réalise 65 % de son chiffre d'affaires en dollars américains et compte deux fois plus d'usines aux États-Unis qu'au Canada. «Entre un dollar fort et un dollar faible, nous préférons le faible, parce qu'il rend le marché canadien moins attrayant pour nos compétiteurs ; mais il ne faut pas simplifier l'équation. Il y a beaucoup d'éléments qui bougent - certains intrants se paient en dollars américains, par exemple, tout comme les équipements - et le secteur manufacturier doit appuyer son succès sur ce qui le distingue.»
Et quand on lui parle de bâtir ou de rapatrier des usines au Canada, Marc Dutil répond que, là encore, ce n'est pas si simple : «Les Américains veulent acheter des produits faits chez eux. J'ai une usine de ponts au New Hampshire. Si elle était située en Beauce, je ne pourrais pas en vendre aux Américains.»
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