C'est maintenant confirmé. Aéroports de Montréal (ADM) prépare le démantèlement de l'aérogare de l'Aéroport de Mirabel.
À l'occasion de son assemblée annuelle, ADM a annoncé jeudi matin sa décision de lancer un appel d'offres afin de procéder sans tarder à la démolition de l'aérogare de Mirabel, du stationnement étagé attenant et de son aéroquai.
Une annonce que le maire de Mirabel, Jean Bouchard, a accueilli en se disant consterné. «C'est un non-sens de songer à démanteler ces installations qui ont été érigées au prix de tant de sacrifices humains lors de l'expropriation de centaines de familles (...).»
Construit au coût d’un demi milliard de dollars, le bâtiment de plusieurs étages a été inauguré en même temps que l'aéroport de Mirabel en octobre 1975. Il occupe à lui-seul une superficie de 15 acres, ou «plus d'un million de pi2», au centre d’un territoire encore largement inexploité de 6 000 acres, résultats d'expropriations monstre effectuées dans la région au début des années 70.
«Il est temps de tourner la page et de penser à l'avenir», a déclaré pour sa part le président-directeur général d'ADM, James Cherry, au cours de l'assemblée annuelle qui se tenait ce matin dans l'enceinte du siège de l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI), à Montréal. Craignant des manifestations, l’édifice le plus sécurisé de la métropole était encerclé de nombreux agents et voitures de police en début d’assemblée.
Sans autorisation
Le président d’ADM soutient pouvoir démolir l’aéroport sans se soucier d’obtenir au préalable «d’autorisation ministérielle» des gouvernements du Canada ou du Québec. ADM est une société privée à qui a été confiée la gestion des aéroports de Dorval et Mirabel en 1992.
«Oui, c’est bien ce que je dis. Nous n’avons pas de permission à demander. Transports Canada nous l’a confirmé», a déclaré M. Cherry en conférence de presse, évoquant l'existence dans son bail d'une clause de «désuétude», lui permettant de procéder à la démolition des installations qu'il gère.
La même clause fut apparemment utilisée au début des années 2000, lorsqu'ADM a décidé de détruire certains éléments de l'Aéroport Montréal-Trudeau pour le remettre à niveau. Depuis, l’aéroport de Dorval a connu de nombreuses améliorations, dont la construction de nouvelles jetées internationale et transfontalière, le tout représentant des investissements de plus de 1,5 milliard de dollars.
Désuet et irrécupérable
Le bâtiment de l'ancienne aérogare de Mirabel a servi pendant 30 ans et est laissé à lui-même depuis la décision fortement contestée d’ADM au milieu des années 1990, de mettre un terme aux vols internationaux réguliers à l’Aéroport de Mirabel pour les concentrer à l’Aéroport Montréal-Trudeau.
La «vie économique probable» d'un tel ouvrage, soutient ADM, varie de 40 à 50 ans et le qualifie aujourd’hui de «désuet et non économiquement récupérable». Depuis la fin de 2004, ADM soutient avoir investi plus de 30M$ dans cet aéroport et affirme que des réparations de plus de 15M$ sont requises de manières urgentes.
À lire: 60 secondes avec Jacques Roy
«Maintenir indéfiniment un bâtiment innoccupé et désuet serait irresponsable», affirme M. Cherry, refusant d’estimer les coûts de démolition à venir. «Je n’en sait rien. Je ne suis pas un spécialiste», a-t-il répondu, soutenant sans rire n’avoir fait aucune projection budgétaire à ce propos.
Lorsque questionné sur ce qu’il pouvait dire aux citoyens de Mirabel dont la vie a été boulversée par la construction de cet aéroport, ce dernier a déclaré n’avoir «rien à leur dire». «Nous avons fait tout ce que nous pouvions faire pour trouver une nouvelle vocation, a-t-il poursuivi. Nous n'avons pas réussi. Maintenant, le moment est venu de passer à autre chose».
Lors de sa séance du 24 avril dernier, les représentants élus de la Communauté métropolitaine de Montréal (CMM) ont adopté en vain une résolution appuyant les démarches de Mirabel afin de trouver une nouvelle vocation à l’aérogare de l’Aéroport de Mirabel et éviter sa démolition.
De son côté, le maire Bouchard dit poursuivre les démarches afin de trouver une nouvelle vocation à l'aéroport, comme l'implantation d'un centre de foire international pouvant éventuellement accueillir des salons internationaux d'envergure, dans le domaine de l'aéronautique notamment à l'image des salons du Bourget, en France, et de Farnborough, en Grande-Bretagne.
Questionné sur un tel projet, le président d'ADM s'est dit prêt à l'examiner, affirmant du bout des lèvres que la décision de démolir l'aérogare pouvait être révoquable advenant l'apparition d'un projet viable, piloté par des promoteurs «aux reins solides». À défaut d'un tel projet cependant, le pdg précise n'avoir aucune intention de revenir sur sa décision.
Le maire de Mirabel entend, enfin, tendre la main au nouveau ministre des Transports, Robert Poéti et sensibiliser Pierre Arcand, ministre de l'Énergie et des Ressources naturelles et responsable de la région des Laurentides, afin d'aider à trouver rapidement une solution.
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