Vous voulez investir dans les champions du fonds commun de placement. Qu'ils soient notés « or », « argent » ou « bronze », les fonds sur le podium de Morningstar Canada sont en bonne posture pour dépasser leurs pairs sur un horizon de 5 à 7 ans, estime l'équipe d'analystes de la firme de recherche indépendante. Les Affaires vous présente le podium de cinq catégories et fait un portrait plus détaillé des médaillés d'or.
Comment Morningstar décerne ses médailles
Que la médaille soit d'« or », d'« argent » ou de « bronze », un fonds sur le podium de Morningstar est plus susceptible de mieux performer que ses pairs sur un horizon de 5 à 7 ans, selon les analystes de la firme indépendante.
Pour distribuer ses médailles, Morningstar scrute cinq « piliers » : la stratégie, le lien entre les rendements passés et cette stratégie, les gestionnaires du fonds, la firme qui vend le fonds et les frais. « Notre approche combine une part d'analyse quantitative et une part d'analyse qualitative », précise Christopher Davis, directeur de la recherche.
Les analystes portent ainsi un jugement sur la firme et les gestionnaires qui y travaillent. « Nous rencontrons les gestionnaires de portefeuille, et nous vérifions si leurs investissements s'inscrivent vraiment dans la stratégie qu'ils prônent, explique M. Davis. On regarde aussi les motivations de la firme. Tente-t-elle de créer des bénéfices pour ses clients ou pour elle-même ? »
D'ailleurs, M. Davis aime qu'un gestionnaire détienne les fonds qu'il gère. Un peu comme les actionnaires qui valorisent la participation d'un pdg au capital d'une société inscrite en Bourse. « Ça aligne l'intérêt des gestionnaires sur celui des détenteurs de parts, commente-t-il. Malheureusement, les règles de divulgation sont moins transparentes que celles des sociétés en Bourse. Tous ne dévoilent pas cette information. »
Quant au volet quantitatif, la firme utilise le ratio des frais de gestion, qui mesure le coût de la gestion du portefeuille pour l'épargnant. Morningstar recourt également au ratio des frais de transactions, qui tient compte des transactions et des commissions.
La note
Après s'être penchée sur les cinq « piliers », l'équipe de recherche attribue une note « or », « argent » ou « bronze » aux fonds qui se démarquent dans chaque catégorie. Les trois notes signifient que l'analyste de Morningstar est optimiste quant à la capacité du fonds suivi de mieux performer que ses pairs sur un horizon de cinq à sept ans.
Attention toutefois : un fonds médaillé ne donnera pas nécessairement un bon rendement, prévient M. Davis. Si les perspectives sont très négatives dans le secteur des métaux, par exemple, ça n'empêchera pas Morningstar de l'amener sur le podium si elle conclut qu'il est mieux géré que les fonds comparables. C'est le bateau et l'équipage qui sont évalués, pas la marée.
Même si elle constitue un troisième rang, une note « bronze » est très positive, assure M. Davis, un rire dans la voix. « On doit souvent expliquer que bronze n'est pas une mauvaise recommandation. La différence entre les cotes reflète seulement notre degré de certitude quant à notre prévision de surperformance. »
La note « or » signifie que le fonds excelle dans les cinq « piliers ». L'« argent » veut dire que les avantages dans toutes les catégories sont supérieurs aux désavantages. Un fonds « bronze » dispose de nombreuses forces dans plusieurs « piliers », mais pas nécessairement dans toutes les catégories.
L'évaluation par médaille diffère du système d'étoiles, la note la plus connue de Morningstar. Le système de notation d'une à cinq étoiles compare le rendement passé au risque du fonds. Ce n'est pas une tentative de prévoir la performance future comme le système de médaille, précise M. Davis.
Deux médaillés d'or chez les Canadiens
Deux fonds d'actions canadiennes se partagent la plus haute marche du podium : le Fonds d'actions canadiennes Beutel Goodman et le Fonds d'actions canadiennes Mawer.
L'analyste Vishal Mansukhani aime la démarche de Beutel Goodman, aussi médaillée d'or dans la catégorie « portefeuille équilibré ». Son équipe cherche des actions sous-évaluées. Pour que le titre soit choisi, ses analystes doivent être convaincus que l'action peut procurer un rendement « minimal » de 50 % sur trois ans, selon les principaux indicateurs de leur méthodologie. « Cet objectif de rendement élevé leur donne une marge de sécurité si leurs prévisions sont trop optimistes », explique l'analyste de Morningstar.
En se liant les mains en certaines circonstances, Beutel Goodman renforce sa « discipline », croit M. Mansukhani. Son équipe systématise certaines décisions d'investissement afin de contrer les biais que pourraient développer ses professionnels. « Par exemple, le fonds doit vendre le tiers des actions d'une société lorsque celle-ci atteint son cours cible, explique l'analyste. Beutel Goodman doit ensuite refaire son analyse pour déterminer s'il faut conserver le titre plus longtemps. Ça permet d'éviter qu'un gestionnaire ait un biais trop favorable sur un investissement ayant procuré de bons rendements. »
L'analyste a aussi de bons mots pour Mark Thomson, qui gère le fonds depuis 1999. « Il croit vraiment dans sa philosophie, et il est très prudent », avance M. Mansukhani.
Un seul pépin : l'environnement est plus difficile pour les adeptes d'une stratégie valeur. Lorsque l'évaluation des titres augmente, les occasions sont moins nombreuses, nuance M. Mansukhani.
La version destinée aux investisseurs autonomes a des frais de gestion de 1,38 %.
L'autre champion canadien
Le Fonds d'actions canadiennes Mawer cherche des titres sous-évalués par rapport aux flux de trésorerie qu'ils génèrent. Même si son équipe adopte une analyse basée sur les fondamentaux d'une entreprise, ses membres scrutent régulièrement les perspectives économiques, dit l'analyste Shehryar Khan. Le but est de détecter les risques involontaires, comme une vulnérabilité à la fluctuation des prix du pétrole.
« Son équipe ne s'assoit pas sur ses lauriers parce qu'elle a eu de bons rendements au cours des dernières années. Elle cherche toujours une façon de s'améliorer, et c'est quelque chose que nous aimons. »
Les gestionnaires sont indifférents à la composition des indices. Cela fait en sorte que le contenu de leur portefeuille est sensiblement différent du S&P/TSX et des autres fonds canadiens.
Comme pour le fonds de Beutel Goodman, Mawer aura davantage de difficulté à mieux performer que ses pairs. « Mawer a eu l'occasion de trouver des aubaines après la crise et a profité de ses achats, explique M. Khan. La direction admet elle-même qu'elle compose avec ce défi. Malgré tout, nous avons confiance que Mawer fera mieux que les autres, mais cet écart ne sera peut-être pas aussi prononcé. »
Les frais de gestion sont de 1,21 %. L'assureur Manuvie vend le fonds de Mawer avec un ratio de frais de gestion 2,52 %, plus élevé en raison des commissions aux conseillers. Malgré ce coût plus élevé, la version offerte par Manuvie conserve sa note « or ». « Pour le prix, nous pensons que c'est neutre, mais les autres aspects du fonds lui permettent de se démarquer. »
Des obligations en or
Les frais de gestion font toute la différence lorsqu'on compare des fonds obligataires. En attribuant ses médailles d'or aux titres à revenu fixe, Morningstar Canada jette son dévolu sur trois fonds dotés d'un bon rapport qualité-prix.
« Dans l'univers des obligations, l'écart entre les meilleurs et les pires est beaucoup plus mince que ce qu'on voit du côté des fonds d'actions, commente Vishal Mansukhani. Là où l'on peut vraiment apporter une valeur ajoutée, c'est par rapport au coût. »
L'analyste attribue une cote « or » à deux fonds de Phillips, Hager & North (PH&N) : le Fonds d'obligations PH&N et le Fonds d'obligations à rendement global PH&N. Le Fonds d'obligations canadiennes TD est aussi sur la plus haute marche du podium.
Les deux fonds de PH&N, dont la firme a été achetée par la Banque RBC en 2008, sont gérés par les mêmes personnes avec la même stratégie. « La seule particularité du fonds à rendement global est qu'il peut détenir des titres à haut rendement », dit M. Mansukhani.
PH&N fait une très bonne analyse du risque, affirme l'analyste. « Cela leur permet de mesurer l'impact qu'auraient divers scénarios économiques sur leur portefeuille. Ils ont aussi une très bonne équipe de recherche. »
Puisque ce sont les frais de gestion, en grande partie, qui séparent le bon grain de l'ivraie, les deux Fonds de PH&N se trouvent naturellement parmi « les plus abordables de l'industrie ». Leurs versions pour les investisseurs autonomes ont des frais de gestion de 0,6 %.
Le fonds de la TD
Le fonds d'obligations canadiennes TD, pour sa part, peut compter sur une équipe « solide » dans les titres à revenu fixe, considère M. Mansukhani. « Il est presque impossible d'ajouter de la valeur avec les obligations gouvernementales, car on ne peut prévoir la direction de la politique monétaire, ajoute-t-il. La valeur ajoutée de son équipe se trouve du côté du crédit des entreprises. »
La répartition des tâches est aussi un aspect qui joue en faveur du fonds. Les gestionnaires et les analystes travaillent de concert. Leur gestionnaire de portefeuille n'aura pas le choix de vendre un titre qui n'a plus la faveur de son collègue analyste. « Ça permet à un gestionnaire de se détacher émotionnellement d'un titre qui aurait bien performé pour lui, commente M. Mansukhani. Je ne dis pas que ça arrive, mais ça permet de corriger les biais, s'il y en a. »
L'équipe de la TD produit sa propre recherche, ce qui permet d'adopter un point de vue différent de celui des grandes agences de notation, notamment Moody's et Standard & Poor's. Lorsque Sears a utilisé les recettes tirées de la vente de ses cartes de crédit à JP Morgan pour récompenser ses actionnaires en 2005, la TD a retiré le détaillant américain de sa liste de sociétés convenables pour l'investissement, raconte M. Mansukhani. Les grandes agences ont été plus lentes à réagir.
Ses frais de gestion sont de 1,11 %, par rapport à une médiane de 1,40 % pour cette catégorie.
Un podium dégarni pour les fonds équilobrés et d'actions américaines
Le club sélect des médaillés est encore plus restreint pour les fonds équilibrés et les fonds d'actions américaines. Un seul fonds équilibré obtient une médaille d'or, c'est-à-dire qu'il se démarque parmi les cinq critères évalués. Du côté des fonds d'actions américaines, aucun ne se hisse en tête du podium.
La comparaison entre gestion passive et gestion active joue en défaveur des fonds communs canadiens d'actions américaines, explique Christopher Davis, directeur de la recherche chez Morningstar Canada. Le coût des fonds activement gérés est prohibitif tandis qu'on peut trouver des fonds indiciels à prix réduit.
« En ce qui concerne les actions américaines, c'est très difficile pour les gestionnaires de fonds communs de surpasser le marché, constate M. Davis. La plupart des gestionnaires qui essaient échouent. »
Aucun fonds d'actions américaines n'obtient la mention « or ». Et un seul obtient la mention « argent » : le Fonds Capital Group actions américaines.
« Capital Group est une firme qui investit beaucoup dans sa main-d'oeuvre, commente M. Davis. Les gestionnaires ont plusieurs années pour perfectionner leur expertise à l'interne avant qu'on leur confie la gestion d'un fonds. Le taux de roulement dans l'entreprise est faible. »
La segmentation du portefeuille, dont chaque partie est confiée aux bons soins d'un gestionnaire différent, plaît à M. Davis. « Si une des parties du portefeuille sous-performe, une autre peut se démarquer. »
Fonds équilibré
La raison pour laquelle les fonds équilibrés sont si peu nombreux à obtenir les honneurs est moins claire, répond Christopher Davis. Il voit tout de même une explication du côté des fournisseurs de fonds. « Cet univers est dominé par les banques. Leur offre ne se différencie pas vraiment d'une institution à l'autre. Il y en a peu qui sortent du lot. »
Une autre raison est la dualité de la mission : gérer des actions et des obligations, deux produits totalement différents. « C'est difficile de trouver une firme qui excelle dans l'analyse des deux catégories d'actifs », constate M. Davis.
Le fonds équilibré Beutel Goodman est le seul médaillé d'or dans sa catégorie. Pour la pondération en action, la grande majorité est investie dans le Fonds d'actions canadiennes Beutel Goodman, dont nous avons traité plus haut.
Vishal Mansukhani aime le fonds d'actions en raison de la « discipline » de ses gestionnaires, qui optent pour des titres sous-évalués. La firme réduit systématiquement sa pondération lorsque ses cibles sont atteintes, afin de corriger de possibles biais.
Pour ce qui est de la pondération en titres à revenu fixe, la majorité est investie dans le Fonds revenu Beutel Goodman, un fonds « argent ». L'approche du fonds relativement au volet obligations est très « prudente », note M. Mansukhani. « Dans sa participation de 50 % en obligations de sociétés, il se tournera vers les titres les moins risqués, comme les titres d'infrastructures. Ce fonds choisit aussi les créances prioritaires, soit celles qui se feraient rembourser en premier en cas de défaut. »
International: Mawer le champion
Mawer trône seul au sommet du podium de Morningstar dans la catégorie des actions internationales. Ses fonds d'actions internationales et mondiales sont tous deux notés « or ».
L'analyste Shehryar Khan aime la stratégie de la firme. Il attribue d'ailleurs une médaille d'or à son fonds d'actions canadiennes (voir, à la page précédente, « Deux médaillés d'or chez les Canadiens »).
Comme pour le fonds d'actions canadiennes, la firme cherche des titres sous-évalués par rapport aux flux de trésorerie qu'ils génèrent. M. Khan considère favorablement le processus d'analyse des risques économiques du portefeuille, tout comme la détermination de la firme à « s'améliorer continuellement ».
Les gestionnaires auront plus de difficulté à trouver des aubaines en raison de l'appréciation du marché boursier, note M. Khan. Comme pour son fonds d'actions canadiennes, Mawer devrait, malgré tout, mieux performer que ses pairs.
La société de Calgary, qui a ouvert un bureau à Singapour en 2013, est en pleine croissance. Sans trop s'en inquiéter, M. Khan admet qu'il se demande comment la firme réussira à intégrer les différents bureaux créés, tout en transmettant sa philosophie d'investissement aux nouveaux employés.
Les frais de gestion sont de 1,49 % et de 1,45 % pour les fonds d'actions internationales et mondiales, respectivement. Manuvie offre aussi une version de ces fonds à 2,68 % et à 2,51 %.