TOURISME D'AFFAIRES ET D'AGRÉMENT. Avant que Saint-Sauveur, L’Estérel et Mont-Tremblant ne deviennent les principaux pôles d’attraction touristiques des Laurentides, Sainte-Agathe-des-Monts était la reine incontestée de la région. Bien qu’elle n’aspire plus à ce titre, la destination reconstruit son industrie touristique sur des bases solides.
Surnommée la métropole des Laurentides, la Saint-Moritz ou encore la Chamonix du Nord, la plus ancienne station touristique de la région a attiré les foules de 1920 à 1960. Les plus âgés se souviendront que la jeune princesse Elizabeth — aujourd’hui Sa Majesté la reine —, accompagnée du prince Philip, a été de passage à Sainte-Agathe-des-Monts à l’été 1951, l’instant d’une croisière sur le lac des Sables.
Cette glorieuse et faste époque touristique est toutefois révolue. Au cours des quatre dernières décennies, les investissements privés dans le domaine ont profité davantage à d’autres villes laurentiennes. «Ce qui a incité la municipalité à entamer une profonde réflexion sur son avenir et sa nouvelle identité», raconte Simon Lafrenière, directeur général adjoint et directeur du développement économique et de l’urbanisme de Sainte-Agathe-des-Monts.
Au fil de ces discussions, il a été décidé que la pérennité de la ville ne reposerait plus uniquement sur ses activités touristiques, mais plutôt sur un équilibre entre ce secteur et les autres secteurs économiques actifs, tels le commerce de détail et l’industrie.
Une décision qui a donné naissance, en 2017, au projet Destination 2030. Dans le but de créer un milieu de vie capable de mieux répondre aux besoins de sa population, la Ville a mis en place une démarche qui tient compte de son historique, de son environnement concurrentiel, de ses forces et de son potentiel comme levier de développement. «Notre objectif consiste désormais à faire de Sainte-Agathe-des-Monts l’endroit de référence des Laurentides pour y résider, y élever une famille, y travailler, y faire des affaires, sans oublier un lieu pour s’y divertir», énumère Simon Lafrenière.
Un nouveau trafic qui ramène les investisseurs touristiques
Avec son hôpital, ses six parcs industriels et ses quelque 160 commerces, Sainte-Agathe-des-Monts est ainsi devenue une ville de services où circulent aujourd’hui plus de 25 000 véhicules par jour, avance le directeur. Comme par enchantement, tout ce trafic qui passe par le centre-ville entraîne un retour des investisseurs touristiques privés. «Ce ne sont pas moins de 60 millions de dollars (M$) qui ont été investis au cours des cinq dernières années en nouvelles infrastructures sur le territoire agathois», signale Simon Lafrenière.
StoneHaven Le Manoir, qui a ouvert ses portes en 2019, mène le bal. À lui seul, l’établissement hôtelier de 34 chambres, qui appartient au promoteur immobilier Georges Coulombe, représente le tiers des plus récents investissements touristiques en ville. L’ancien domaine des Pères oblats, situé en bordure du lac des Sables, fait actuellement l’objet de travaux de construction qui permettront d’ajouter 18 chambres dans un bâtiment attenant au domaine, d’ici la fin du printemps. Ces nouvelles chambres, encore plus spacieuses et modernes que celles du bâtiment principal, conviendront davantage à la clientèle affaires, fait savoir la directrice générale de StoneHaven Le Manoir, Marie-Josée Denis.
Ce domaine, dont la cuisine est assurée par la brigade du chef Éric Gonzalez, est d’ailleurs devenu membre de Relais & Châteaux l’automne dernier. Cette adhésion au prestigieux réseau international permet à ce dernier de renouer avec les Laurentides, après une absence de près de 15 ans. Le défunt hôtel L’Eau à la bouche, fermé en 2013, avait été le premier établissement laurentien membre de Relais & Châteaux. Son adhésion avait toutefois pris fin avant sa fermeture.
La réussite du StoneHaven a motivé l’investisseur Louis Lespérance à investir, lui aussi, dans la région. Ce promoteur, qui est également copropriétaire du manoir Maplewood, à Waterloo, et de l’entreprise Signé Local, a injecté près de 3 M$ pour transformer l’ancien château Belvoir, construit au tournant du 20e siècle, en lieu d’hébergement. Rebaptisé Manoir Davis, le domaine de huit chambres, exclusif aux événements privés tels mariages, rencontres familiales et réunions d’affaires, a ouvert ses portes en décembre dernier, indique Louis Lespérance, qui envisage de créer un réseau de manoirs au Québec et ailleurs dans le monde.
Des investissements pour raviver le centre-ville
Le centre-ville de Sainte-Agathe n’échappe pas à l’attention des investisseurs privés. Sur la rue Saint-Vincent, deux complexes d’appartements réservés à une clientèle Airbnb seront par exemple achevés d’ici le printemps 2023 par les promoteurs Gestion Finstar et Strawberry. Ces deux projets, qui engloberont un total de 68 appartements, représentent un investissement de plus de 15 M$.
D’ailleurs, près de la moitié des appartements seront accessibles dès cet été. «L’avantage de ce projet est d’offrir de l’hébergement touristique au cœur de notre centre-ville, un des rares au Québec à être situés en bordure d’un lac, explique Simon Lafrenière. Une entente avec les deux promoteurs prévoit même une transformation de ces appartements locatifs de courts séjours en résidences permanentes si une crise venait à perturber l’industrie touristique.»
Dans les coulisses agathoises, on chuchote qu’un autre investissement estimé à 20 M$ pourrait être annoncé sous peu pour la construction d’un nouvel hôtel de 80 à 100 chambres.
Un coup de main des autorités
Encouragée par ces investissements et par l’arrivée de nouveaux résidents — la population de Sainte-Agathe-des-Monts affiche l’une des plus fortes croissances de la province selon les plus récentes statistiques québécoises, avec plus de 10% d’augmentation en 2020 —, l’administration municipale participe elle aussi activement à la refonte de son identité touristique.
Les travaux d’envergure menés au théâtre Le Patriote, qui a rouvert ses portes le 23 mars, en sont un bel exemple. Plus de 7,5 M$ ont été injectés afin de rénover ce bâtiment municipal, inauguré en 1967, et son stationnement. Mentionnons que la COVID-19 a retardé à deux reprises la réouverture de l’établissement fermé depuis l’automne 2019. «Le théâtre attire plus de 40 000 visiteurs annuellement», signale fièrement son directeur général, Alexandre Gélinas. Depuis qu’il est arrivé en poste il y a 11 ans, l’établissement a toujours été rentable. Les profits, dit-il, varient entre 5% et 10% annuellement, et sont réinvestis dans la recherche de nouvelle clientèle. «Plus de 40% de nos spectateurs habitent à plus de 60 minutes de voiture de la ville», tient à préciser le gestionnaire.
Outre le théâtre, la municipalité a investi près de 10 M$ au cours des cinq dernières années pour aménager entre autres la promenade Gaston-Miron, la place Lagny, une piste cyclable de 12 km autour du lac des Sables ainsi qu’un marché public qui ouvrira ses portes cet été. Et ce n’est pas fini, avertit Simon Lafrenière. Un ambitieux projet de réserve naturelle afin de préserver le bassin versant du lac des Sables — le joyau de Sainte-Agathe-des-Monts —, est sur le point de voir le jour.