La ville de Beauharnois attendait le parachèvement de l'autoroute 30 comme une bouffée d'air frais. «Avant, nous étions le cul-de-sac du Québec. Aujourd'hui, avec trois sorties d'autoroute, nous sommes dans le trafic», lance son maire, Claude Haineault. Depuis la fin des travaux, en 2012, la municipalité attire de nombreux projets. Signe de ce renouveau, l'immense site de 26 hectares (l'équivalent de 65 terrains de football) laissé vacant par la fermeture de Rio Tinto Alcan affiche complet.
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Pour profiter de sa position stratégique, la petite ville devait préparer des emplacements pour accueillir les industries prêtes à s'installer chez elle. La municipalité s'est d'abord tournée vers Rio Tinto Alcan, qui a mis la clé sous la porte de son usine de Beauharnois en 2009.
Le fabricant d'aluminium, qui compte encore un centre de coulée dans la région, a accepté de céder son terrain ainsi que ses quatre salles de cuve, pour la somme symbolique de 1 $.
«Il a aussi créé un fonds de relance de 650 000 $, en plus de décontaminer le site, ce qui lui a coûté plus de 8 millions de dollars», indique Claude Haineault.
Après l'aluminium, place aux serveurs
Un tremplin pour la relance du secteur. Dès 2013, OVH s'est installée dans le bâtiment. La firme française prévoit y implanter le plus important centre d'hébergement Web du monde, avec 360 000 serveurs.
La proximité de la centrale hydroélectrique de Beauharnois, en plus des immenses locaux disponibles, a fait pencher la balance vers cet emplacement, explique Guillaume Gilbert, responsable des relations publiques pour OVH en Amérique du Nord. «C'est aussi une porte d'entrée vers le marché américain pour nous.»
D'ailleurs, depuis son implantation dans les anciens bâtiments du fabricant d'aluminium, l'entreprise française a ouvert un bureau à Montréal et un autre à Québec. Aujourd'hui, 30 personnes travaillent à Beauharnois. Et, d'ici 2018, l'hébergeur français créera 150 emplois, dont une centaine se répartiront entre Montréal et Beauharnois.
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OVH n'est pas la seule entreprise à s'être installée dans ce parc industriel qui compte aussi le producteur d'eau de Javel Cloretech, Balances Leduc & Thibault et Lalonde-Brient, un entrepreneur général. Autre occupant : la firme de génie Construction & Expertise PG, qui a quitté Dorval en octobre 2014 pour s'y établir. Une décision en grande partie liée à la proximité de l'autoroute 30.
«Même si nous n'étions pas si loin, Beauharnois nous paraissait comme un village inconnu. Il fallait faire un grand détour pour s'y rendre», raconte Pierre Gouslisty, président de cette firme de construction et de génie civil.
Aujourd'hui, la vingtaine d'employés qui occupent ces bureaux sont enchantés d'éviter la circulation, ajoute-t-il. Autre avantage : le bas prix des terrains et des taxes. «Nous avons été parmi les premiers à nous établir dans ce parc industriel, mais on sent qu'il y a un petit boom économique, un intérêt à développer de nouveaux projets.» Un plus pour la société, qui agit également à titre d'entrepreneur général.
En plus du développement du parc industriel de Rio Tinto Alcan, Beauharnois a d'autres projets en cours. La ville a, par exemple, mis la main sur un site de 13 millions de pieds carrés inutilisés par Hydro-Québec. L'usine de biométhanisation BioM y sera construite, un investissement de 38 M$ pour une ouverture prévue en 2017. Une portion de ce terrain sera aussi occupée par Espace 30, qui y installera une halte routière, une aire de restauration rapide, un hôtel et des immeubles de bureaux. Le projet de 40 M$ générera 350 emplois.
Changement de climat
Ces exemples illustrent les efforts de diversification menés par Beauharnois et sa région. Car en 2006-2007, le climat était plutôt morose, se rappelle Joanne Brunet, directrice générale du CLD Beauharnois-Salaberry. Une série de mauvaises nouvelles s'abattaient sur le secteur : perte de 1 000 emplois chez Goodyear à Salaberry-de-Valleyfield, mise à pied de 150 personnes lors du démantèlement du seul abattoir de bouvillon au Québec, à Saint-Louis-de-Gonzague, et plusieurs autres. «Durant cette période, nous avons perdu 1 300 emplois sur les 6 000 que comptait le secteur secondaire», estime-t-elle.
À l'époque, le CLD a été mandaté pour mettre sur pied un comité de relance constitué d'une vingtaine d'acteurs locaux de la MRC. «Nous avons ciblé une quinzaine de projets pour diversifier l'économie régionale, comme soutenir le développement du port de Salaberry-de-Valleyfield», précise la directrice.
> Depuis 2008, les 15 projets ciblés par le comité de relance du CLD Beauharnois-Salaberry ont généré des retombées de 80 M$ et créé 1 647 emplois.
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