RECRUTEMENT. L’époque où il suffisait d’avoir une marque employeur forte pour recevoir des CV sur une base régulière est bel et bien révolue. Les employeurs doivent aujourd’hui faire preuve d’une grande rapidité en matière de réponse et de traitement des candidatures pour seulement être considérés par un chercheur d’emploi.
Dominick Béland, qui est administrateur de trois pharmacies Jean Coutu à Saguenay, est aux premières loges de ce changement de paradigme. « Avant la pandémie, je récoltais chaque mois plusieurs candidatures dans la boîte de CV présente en succursale, se souvient-il. Aujourd’hui, si je n’affiche pas de poste précis, la boîte demeure vide. »
Il remarque également que les candidatures qui trouvent leur chemin jusqu’à lui sont très changeantes. « Je ne compte plus le nombre de fois où j’ai appelé un candidat le lendemain de la réception de son CV pour me faire dire qu’il avait déjà trouvé un emploi ailleurs. » Rappelons que le réseau des pharmacies Jean Coutu a été nommé deuxième meilleur employeur du Québec en 2019 par le site spécialisé Indeed. Pourtant, rien n’y fait. Le recrutement demeure ardu.
Dominick Béland n’abandonne pas la partie pour autant. Depuis un an et demi, de nombreuses initiatives ont été mises en place dans ses succursales de l’arrondissement de Jonquière pour accélérer le temps de réponse aux candidats. Lorsque l’un d’entre eux se présente en personne pour postuler à un poste, le personnel a les outils en main pour faire une première entrevue de préqualification. « Si le candidat correspond à ce qu’on recherche, on l’appelle immédiatement », assure l’administrateur.
Sitôt appliqué, sitôt embauché!
Si les candidats sont à ce point volatiles, ce n’est pas uniquement parce qu’ils ont l’embarras du choix. C’est aussi parce qu’ils ont la technologie comme allié. Avec la multiplication des outils virtuels, ils peuvent effectivement trouver un emploi en quelques clics et en passant une entrevue à distance.
Pour prendre la mesure de la rapidité constatée dans le monde du recrutement, il suffit de s’intéresser à Appyhere et à sa plateforme de gestion des interactions entre candidats et recruteurs. L’application mobile permet à une personne en quête d’un emploi payé à l’heure de lancer un processus d’application à partir d’un simple code QR.
« Notre record vérifié, c’est 40 minutes entre l’application du candidat et une promesse d’embauche conditionnelle à la vérification des antécédents criminels », raconte Martin Mathe, cofondateur de la PME basée à Montréal. La personne en question désirait postuler à un poste à la Société des alcools du Québec ; après avoir répondu à quelques questions de préqualification, elle s’est fait offrir une entrevue virtuelle dans les minutes suivantes. Un recruteur a discuté avec elle pendant 20 minutes avant de l’embaucher. « La candidate elle-même ne le croyait pas ! » s’amuse-t-il.
Appyhere aide actuellement des entreprises de différents secteurs à pourvoir leurs postes payés selon un taux horaire et qui demandent peu de qualification. Dans cette catégorie d’emploi, Martin Mathe a maintenant la conviction que « le temps de réponse a plus d’impact [sur le recrutement] que la marque employeur ».
« Nous avons des clients du secteur industriel qui n’ont aucune marque employeur, qui ne sont pas connus du public et qui tirent très bien leur épingle du jeu grâce à notre application », affirme celui qui a été directeur des ressources humaines avant de lancer sa propre entreprise.
La rapidité d’exécution comporte un autre avantage qui vaut son pesant d’or. En analysant les données de sa plateforme, Martin Mathe s’est rendu compte que plus l’entrevue était planifiée à une date éloignée, plus le pourcentage de candidats ne s’y présentant pas — les fameux « no show » — augmentait. Un délai d’une semaine peut se traduire par 50 % d’absence non motivée à l’entrevue, illustre-t-il. « Si l’entrevue se déroule dans plus de 72 heures, il y a de bonnes chances que le candidat trouve un autre emploi et oublie la rencontre », avance-t-il.
L’emploi, simple commodité
De toute évidence, une large proportion des travailleurs accorde désormais une plus grande valeur à la rapidité du processus d’embauche qu’à la réputation d’un employeur. Comment expliquer ce changement de mentalité ?
« Nous faisons beaucoup de groupes de discussion avec des candidats et, quand on parle avec eux, on comprend qu’à leurs yeux, un emploi est une commodité, explique Martin Mathe. S’ils ont besoin de prendre des vacances, ils n’hésiteront pas à démissionner pour en trouver un autre à leur retour. » Voilà ce qui arrive quand on a l’embarras du choix.