Vous avez raison. Ce n'est pas qu'une simple impression. Il n'y a eu aucun engagement électoral qui porte directement sur l'économie pendant cette campagne. Il semblerait que lorsque l'économie tourne à plein régime, que le taux de chômage est à un creux historique et que les revenus de l'État sont au rendez-vous, le sujet n'intéresse plus personne.
Pourtant, ça serait une erreur de ne pas s'en occuper. Tout indique que l'embellie actuelle est passagère et que l'économie devrait croître plus lentement au cours des prochaines années.
Le rapport préélectoral du ministère des Finances du Québec, certifié par la Vérificatrice générale du Québec, ainsi que les rapports des grandes banques indiquent tous que les prévisions seront plus modestes à l'avenir. La majorité des économistes évalue le potentiel de croissance de l'économie du Québec entre 1 % et 1,7 %, soit moins que la tendance historique de 2 % et beaucoup moins que la croissance record de 3 % observée en 2017.
Le potentiel de croissance est défini par la productivité et la démographie. Avec une population vieillissante et une croissance limitée, les travailleurs potentiels ne contribueront que de façon marginale à la croissance. Pour ce qui est de la productivité, avec une croissance annuelle qui stagne autour de 1 % depuis plus d'une décennie, rien n'indique que c'est ce qui nous sauvera.
Une occasion de changer les façons de faire
Le départ massif des baby-boomers à la retraite représente toutefois une occasion unique de faire bouger les choses.
Le resserrement du marché du travail devrait inciter les entreprises à procéder à des changements majeurs dans leurs façons de faire, notamment en ce qui concerne les pratiques de recrutement, la formation des employés et l'automatisation. C'est sur ces trois éléments centraux de notre prospérité collective que nous aurions aimé entendre les différentes formations politiques.
Comment inciter les entreprises, surtout les PME, à mieux gérer la diversité et à mieux intégrer les immigrants dans leur processus d'embauche ? Comment ajuster les incitatifs fiscaux afin d'assurer davantage de formation continue pour permettre aux travailleurs de s'adapter aux changements technologiques de plus en plus rapides ? Comment assurer une plus grande collaboration entre le monde des affaires et les établissements d'enseignement ? Surtout, comment tout mettre en place pour que les pénuries de main-d'oeuvre deviennent une occasion d'accélérer l'automatisation et la productivité des entreprises ?
Pour avoir la légitimité de faire d'importants changements une fois au pouvoir, c'est maintenant qu'il faut aborder de front ces enjeux et en débattre.
EXPERTE INVITÉE
Mia Homsy est directrice générale de l’Institut du Québec (IdQ) depuis sa fondation en février 2014.
CLIQUEZ ICI POUR CONSULTER LE DOSSIER «PÉNURIE DE MAIN-D'OEUVRE: LE CONSTAT»