Par passion autant que par stratégie, Huppé a mis le cap sur le design et le haut de gamme. La décision a permis à l'entreprise de ne pas perdre trop de plumes pendant la crise immobilière américaine, et elle est dans une bonne position pour profiter de la relance.
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En 2010, Jean-François Nolin rachète le fabricant de meubles Huppé, de Victoriaville, fondé en 1967. Dès le départ, il souhaite créer des meubles haut de gamme, en misant sur le design. Il engage le designer Joël Dupras en 2011, et crée la gamme UP par Huppé, qui se veut une solution de rechange aux importations européennes.
«L'avantage que nous avons sur les fabricants européens, c'est que nous sommes en Amérique du Nord, ce qui réduit nos frais de transport et nos délais de livraison», explique la directrice générale et marketing, Julie St-Arnaud.
Bien sûr, il y a une stratégie derrière ce choix. L'entreprise pourrait difficilement concurrencer les fabricants chinois dans le bas de gamme. Mais c'est aussi une décision de coeur. «Nous avons une passion pour le design et nous souhaitons que cela se reflète dans nos meubles», poursuit la directrice générale. L'entreprise compte 35 employés, auxquels s'ajoutent les 40 personnes qui travaillent pour quatre fournisseurs, dont la production est presque exclusivement réservée à Huppé.
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Traverser les frontières
Stratégique ou passionnelle, l'orientation prise par Huppé l'a aidée à traverser les années difficiles et à en ressortir en bien meilleur état que nombre de ses concurrentes. Pendant plusieurs années, le chiffre d'affaires est resté stable, malgré la crise immobilière américaine et la hausse du dollar canadien.
L'entreprise anticipe une croissance de 15 % du chiffre d'affaires en 2014. Environ 45 % de ces revenus provient d'exportations aux États-Unis.
Depuis deux ans, Huppé tente de développer de nouveaux marchés en Amérique latine, notamment au Mexique, où elle a un représentant, et au Costa Rica.
«Nous y allons lentement, car nous rencontrons des défis importants dans ces marchés», explique Mme St-Arnaud. Le transport et le dédale administratif propre à chacun de ces pays compliquent la tâche des exportateurs.
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«Ce n'est pas toujours facile d'obtenir des informations, parfois les produits restent bloqués aux douanes sans trop de raisons apparentes, bref, il faut s'armer de patience et apprendre à travailler dans un contexte différent de celui des États-Unis ou du Canada», ajoute la directrice générale et marketing.
Le Canada et les États-Unis restent les marchés de prédilection de l'entreprise. Pour y faire sa marque, elle déploie une série moyen de gamme et une série haut de gamme. Ses produits sont disponibles dans des magasins du type Maison Corbeil, et non dans de grandes surfaces telles que Brick ou Target.
«Nous souhaitons devenir une solution de rechange aux grandes marques européennes. Nous nous devons donc d'être dans les mêmes magasins», lance Julie St-Arnaud.
«Et puis, des gens qui ont de l'argent, il y en aura toujours, ajoute-t-elle. Si nous sommes dans les bons magasins, il n'y a pas de raison que ça ne fonctionne pas pour nous.»
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L'épreuve du réel
Il reste que miser sur le design et l'innovation présente certains défis. Chez Huppé, il a fallu changer les méthodes de travail, après avoir rencontré en chemin une résistance toute naturelle au changement.
«Auparavant, nous avions quatre ensembles de chambre à coucher qui étaient montés presque de la même façon, dit-elle. Maintenant, nous en avons beaucoup plus, et ils sont tous différents ! Il a fallu innover pour accomplir ça tout en respectant nos coûts de production.»
Au printemps 2014, Huppé a regroupé sous un même toit son usine de finition, ses bureaux et son entrepôt. L'entreprise a investi plus de 1,2 million de dollars dans ce projet, profitant de l'occasion pour automatiser la ligne de finition afin d'en augmenter l'efficacité et la productivité. «Nous travaillons maintenant en "juste à temps", ce qui nous permet de satisfaire les besoins de notre clientèle grâce à un vaste choix de produits finis et de matériel, sans allonger nos délais de livraison», précise Mme St-Arnaud.
Cette adaptation touchait aussi les fournisseurs, qui ont dû développer plus de produits et innover à leur tour, et donc investir temps et argent dans l'opération. Les dirigeants d'Huppé se sont assurés de rester près d'eux et de partager leur vision. En 2012, ils les ont invités au Salon canadien du meuble, à Toronto, afin qu'ils voient les ambiances qu'Huppé mettait de l'avant dans son kiosque. Cela les a aidés à comprendre la direction que prenait l'entreprise, tout en renforçant les liens.
Le designer maison, Joël Dupras, joue dorénavant un rôle crucial dans l'entreprise. Sa collaboration avec le service d'ingénierie est essentielle. C'est là que les idées du designer sont confrontées à l'épreuve de la réalité. Une bonne idée sur papier doit être réalisable, solide, on doit pouvoir la fabriquer dans les matériaux que le fabricant utilise habituellement à un coût de production raisonnable, etc.
«Le design est désormais au coeur de notre culture d'entreprise, dit Mme St-Arnaud. Tous les membres de l'équipe sont appelés à innover. C'est le moteur de notre croissance.»