Le ciel est tombé sur la tête des citoyens de Montmagny en mai 2004.
C’est à ce moment que l’usine d’électroménagers Whirpool, qui employait plus de 500 personnes, a définitivement fermé ses portes. Ce n’était pas une surprise, la direction l’avait annoncée quelques mois plus tôt.
Quand même : pour cette ville de 11 000 habitants située à 60 kilomètres à l’est de Québec, le choc a été terrible.
Pour mettre les choses en perspectives, au prorata de la population, c’est comme si 100 000 personnes perdaient d’un coup sec leur emploi à Montréal.
Pourtant, et c’est apparemment difficile à croire, la ville se porte aujourd’hui mieux que jamais !
Le taux de chômage en Chaudière-Appalaches se situe actuellement à 2,3 %, deux fois moins que la moyenne québécoise. C’est le plus bas au Québec. En d’autres mots, c’est là un contexte de plein emploi. Et la vitalité de Montmagny y contribue largement.
Comment expliquer cette remarquable renaissance, en un si court laps de temps ?
Trois facteurs : la détermination du milieu ; l’engagement des entrepreneurs locaux ; et la disponibilité du capital, à commencer par un fonds de 1 million de dollars attribué par Whirpool au moment de la fermeture, un peu comme un prix de consolation. Mais il a servi plus qu’on ne pouvait l’imaginer au moment où la ville se trouvait en plein désarroi.
« Nous avions atteint le fond du baril, en pleine léthargie, avec comme seul choix la nécessité de nous réinventer », dit Frédéric Corriveau, président de la Chambre de commerce de Montmagny et lui-même entrepreneur. Il dirige à la fois le Groupe Corriveau, spécialisé en électricité, plomberie et chauffage, et l’entreprise KGC Telecom.
« La solidarité de la communauté a été déterminante, et les entrepreneurs ont foncé », dit-il. Avec raison : les petites entreprises sont devenues des moyennes entreprises et Montmagny a cessé de dépendre des multinationales pour son avenir. Finie, l’attitude « Waiting for the big one »… Les Maisons Laprise, Ressorts Liberté et autres ont pris le relais. Et le parti pris décidément entrepreneurial de la ville lui a valu de nouveaux investissements
Rémi Langevin est le maire de la ville depuis à peine novembre 2017, mais son engagement comme conseiller municipal remonte à 2002. Il a vécu les hauts et les bas de la ville.
« Il fallait passer outre à morosité, voire le défaitisme », dit-il. Avec d’autres, il a travaillé à mettre en valeur les nombreux attraits de la ville. Son lien avec le fleuve et les îles en face, Île aux Grues, grosses Île et autres. Les montagnes de l’arrière-pays. Les majestueux paysages. Une offre de services complète. Un accès moins coûteux à la propriété, sans les ennuis de trafic de la grande ville… « Oui, il faut saluer la communauté qui a fait, et continue de faire la différence », dit le maire de la ville, Rémy Langevin.
Il souligne un élément moins connu, même si important dans toute la démarche de relance de Montmagny. En quittant, Whirpool avait quand même versé 1 million de dollars pour soutenir les autres usines manufacturières locales. Du capital de risque s’est ajouté. Et les entrepreneurs plus ambitieux en ont profité pour prendre de l’expansion. Les centaines de travailleurs licenciés lors de la fermeture ont été en bonne partie récupérés et ont contribué à ce nouvel élan.
« Montmagny est aujourd’hui un terreau fertile pour les nouvelles entreprises, dit-il, nous prenons nous aussi le virage 4.0, même si la main-d’œuvre se fait toujours plus rare », dit le maire Langevin, qui en profite pour saluer l’initiative du journal Les Affaires avec le panel d’entrepreneurs réunis le 6 juin, à Lévis, pour faire le point sur l’économie de la région Chaudière-Appalaches. « J’ai réalisé qu’il me fallait encore mieux connaître nos entreprises pour en arriver à une réelle synergie entre les industriels et les élus », ajoute-t-il.
Montmagny se prépare déjà pour la suite. Par exemple, le parc industriel a été agrandi et on songe déjà à marquer le 375e anniversaire de la ville en 2021, en misant toujours davantage sur le fleuve et les attraits naturels dont elle est pourvue.
« Il faudra forcément composer avec nos problèmes de main d’œuvre, dit Frédéric Corriveau, qui voit au moins trois fronts sur lesquels agir : retenir les jeunes qui ont encore tendance à quitter en misant sur la qualité de vie qu’on peut leur offrir à Montmagny, attire en parallèle de nouvelles familles et miser sur l’apport des immigrants « en les faisant sortir des grands centres et en les aidant à bien s’installer, entre autres au niveau de l’habitation.
Et il y va de cette véritable profession de foi envers l’entrepreneuriat : « Les entrepreneurs assument un leadership important dans le milieu… Ici, pour vous donner une idée, nous avons dépassé notre objectif de collecte pour doter l’hôpital d’un appareil d’imagerie à résonnance magnétique. Oui, les entrepreneurs alimentent la vitalité des communautés. »
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