FOCUS RÉGIONAL. Développé et mis en marché il y a moins d’un an, le premier produit d’Ethnocare, la prothèse Overlay, attire déjà les regards aux quatre coins de la planète. Une excellente nouvelle pour cette équipe de jeunes designers industriels de Québec qui souhaite « révolutionner le domaine prothétique mondial ».
Ce sont des raisons familiales qui ont mis les deux concepteurs Marc-Antoine Malouin et Louis-Philippe Garneau sur la piste de l’Overlay, une prothèse ajustable pour les personnes amputées sous le genou. « Nous avons tous les deux des proches qui ont énormément souffert en raison de la maladie, relate Marc-Antoine Malouin. Il y a plus de dix ans, la mère de Louis-Philippe a dû être amputée des deux jambes à la suite d’une septicémie (une infection du sang). Après la réadaptation, elle devait utiliser des produits qui ne répondaient pas à ses besoins et qui créaient énormément d’inconfort au quotidien. »
Au fil d’une journée, le membre résiduel des personnes ayant subi une amputation peut changer de volume en raison de la variation de la pression sur celui-ci. Cette situation crée un inconfort que les personnes amputées devaient jusqu’à maintenant gérer au moyen de bas ou de gaines qui requéraient chaque fois le retrait de la prothèse. L’Overlay élimine complètement ces manipulations : la gaine en tissu extensible est munie d’une pompe qui permet de répartir l’air autour du membre résiduel. Elle permet aussi un ajustement personnalisé au fil de la journée.
« Ce que nous appelons l’interface prothétique, ça n’avait pas évolué depuis plus de 40 ans, fait valoir Marc-Antoine Malouin. Même s’il y avait eu des avancements en matière de genoux bioniques ou de pieds en carbone qui créent le lien entre l’humain et la bionique. »
Selon lui, ce sont ces manipulations qui causaient la majeure partie des problèmes vécus par l’ensemble des personnes amputées. « On a décidé de faire le saut en affaires pour avoir un impact réel sur la vie des gens », dit-il.
S’entourer des meilleurs
C’est au moment où le Québec est mis sur pause durant la pandémie que Vincent Breton, titulaire d’un baccalauréat en génie et d’un MBA vient compléter le trio fondateur d’Ethnocare. La pandémie a certes constitué un « défi », mais aussi une occasion, selon lui, dans la mesure où elle a introduit un mode de travail hybride qui a jeté les bases d’un « réseau de partenaires d’envergure mondiale », incluant autant de fabricants que de distributeurs de produits et de services de santé.
« Dès le début, notre approche était “si on n’est pas les meilleurs pour réaliser certains éléments, on va aller chercher les meilleures personnes pour le faire”, dit Marc-Antoine Malouin. Ç’a passé par le fait de bien s’entourer », illustre-t-il, précisant qu’il est important pour un jeune entrepreneur d’être humble.
De part et d’autre de la frontière avec les États-Unis, l’entreprise collabore désormais avec de nombreux professionnels issus de domaines variés : prothétique, design et fabrication d’équipement sportif de haut niveau, commercialisation de produits médicaux… Ce réseau de contacts a été renforcé par la participation aux incubateurs d’entreprises Le Camp, à Québec, et le Centech, à Montréal, ainsi que par l’obtention de 2,5 millions de dollars d’Investissement Québec pour faciliter la commercialisation de l’Overlay.
Une distribution à l’échelle mondiale
La dernière année, l’équipe d’Ethnocare, passée de trois fondateurs à dix personnes à temps plein, a développé des ententes de distribution au Canada et aux États-Unis, la « clé des modèles d’affaires dans le milieu » étant « d’avoir une stratégie de remboursement ». Par exemple, pour les clients québécois, par la Régie de l’assurance maladie du Québec (RAMQ). Ou encore par les programmes d’assurance privés, ou Medicare et Medicaid aux États-Unis. Le but est de « pouvoir faire bénéficier le plus grand nombre d’utilisateurs des meilleures solutions possible », précise Marc-Antoine Malouin.
Présenté lors d’un congrès en Europe, l’Overlay a tellement attiré l’attention qu’Ethnocare a décidé d’accélérer la commercialisation sur ce marché, notamment grâce à l’obtention du marquage de conformité européenne (CE), qui a permis la mise en place d’ententes de distribution en Norvège, au Danemark, en Suède ainsi qu’en Italie, en Espagne, au Portugal et en Allemagne.
« On se concentre à matérialiser ces différentes relations et ententes. On est en train de mettre la table pour une croissance accélérée », indique Marc-Antoine Malouin, qui promet que les « produits en R-D dans le pipeline », bientôt matures pour la commercialisation, continueront de « challenger le statu quo » dans le domaine prothétique. Et ce, dans le monde entier.