Qui dit croissance dit nécessité, tôt ou tard, de déléguer. Quand commence-t-on à le faire ? Quelles sont les premières fonctions les plus faciles à confier ? Est-ce plus compliqué de déléguer en affaires parce qu'on est une femme ?
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«Je délègue beaucoup moins facilement que mes confrères masculins», concède d'emblée Linda Rivest, propriétaire d'Imprimerie Rivest, à Repentigny. Cette femme d'affaires de 49 ans, qui a repris l'entreprise familiale en 2007, admet avoir attendu cinq bonnes années avant d'embaucher un planificateur financier. «Je voulais tout faire moi-même. Je voulais contrôler les destinées de l'entreprise à 100 %», explique l'imprimeuse, qui gère une dizaine d'employés.
Linda Rivest ainsi que deux autres femmes entrepreneures, Chantal Lévesque, présidente fondatrice des Collections Shan, à Laval, et Martine Whalen, propriétaire du Centre de location d'outils et de la franchise Rona, à Val-des-Monts, ont discuté de l'enjeu de la délégation au féminin au cours d'une conférence téléphonique organisée par Les Affaires.
L'attitude de Mme Rivest face à la délégation n'a rien d'inhabituel au sein de l'entrepreneuriat féminin. Chantal Lévesque, qui dirige aujourd'hui 125 employés, a attendu davantage de temps que sa consoeur avant de créer le premier poste de direction, autre que le sien. Ce n'est pas avant 2005, soit 20 ans après la fondation de son entreprise, que la créatrice de maillots de bain a embauché sa toute première directrice des finances. «Je voulais être certaine de maîtriser parfaitement tous les aspects de cette fonction et, surtout, être capable d'avoir une confiance absolue en cette personne avant de lui confier le mandat», indique Mme Lévesque.
Ironiquement, concèdent Chantal Lévesque et Linda Rivest, elles ont cru au départ que l'administration, la comptabilité et les finances seraient les tâches les plus faciles à déléguer...
Qu'en est-il pour la plus jeune de nos trois interlocutrices, Martine Whalen qui, à 31 ans, dirige deux commerces liés aux outils et à la quincaillerie ? Le concept de la délégation, dit-elle, s'est rapidement intégré dans ses méthodes de gestion.
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«J'ai vu mes parents s'essouffler à vouloir tout faire eux-mêmes. Ils n'ont jamais été capables de déléguer des responsabilités. En créant l'entreprise de location d'outils avec mon conjoint en 2007 et en reprenant la quincaillerie de mes parents en 2011, je me suis juré de ne pas faire la même erreur», rapporte la jeune femme d'affaires qui gère cinq employés, dont deux responsables de département.
Il y a cinq ans, pour diversifier l'offre de services de son centre de location d'outils et, en particulier, pour donner une plus-value à son commerce, Martine Whalen a ouvert un atelier de réparation de petits moteurs ainsi qu'un atelier de fabrication de boyaux hydrauliques. Elle n'a pas hésité à embaucher deux personnes à qui elle a confié la responsabilité de ces services. «De toute façon, ni moi ni mon conjoint ne maîtrisions ces domaines. Aujourd'hui, j'ai non seulement la conviction d'avoir contribué à donner à ces deux employés une chance de se faire valoir sur le marché du travail, mais je réussis à mieux trouver mon équilibre familial», mentionne l'entrepreneure, qui élève deux enfants âgés de moins de cinq ans.
S'entourer de bons leaders
Malgré sa réticence à vouloir déléguer, Linda Rivest concède qu'au fil des ans cette formule lui a permis d'injecter de l'oxygène au sein de son entreprise. «J'évolue dans une industrie où plusieurs imprimeries ont fermé leurs portes depuis 10 ans. J'ai tout intérêt à me remettre en question, à faire appel à des consultants, des chargés de projet en communication provenant de l'extérieur pour m'aider à prendre de bonnes décisions», soulève l'entrepreneure de Repentigny.
La clé, poursuit Chantal Lévesque, c'est d'apprendre à s'entourer de bons leaders. Et parmi ces leaders, il faut savoir les reconnaître selon leur type de personnalité. «J'ai appris avec les années à faire la différence entre les gesitonnaires et les entrepreneurs. Quand j'ai besoin d'une nouvelle ressource plus cartésienne, je fais appel à un "gestionnaire". Lorsqu'il s'agit de pourvoir un poste pour relever des défis et faire preuve de créativité, je favorise une personnalité entrepreneure», dit la femme d'affaires.
En fait, de conclure Chantal Lévesque, devenir entrepreneur ne s'apprend pas. On l'est ou on ne l'est pas. La gestion, par ailleurs, ça s'apprend, ça se développe. «Je constate que ça fait du bien de pouvoir s'entourer de bons gestionnaires. Ce sont des partenaires qui vont constamment exiger des réponses au sujet de mes actions afin de s'assurer que je prends les meilleures décisions. En fin de compte, je trouve que ces alliés jouent un rôle sécurisant.»
Entreprendre au féminin
Série 2 de 5. Des femmes d'affaires débattent des grands défis d'entrepreneuriat qu'elles relèvent.
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