EFFICACITÉ ÉNERGÉTIQUE: LES ENTREPRISES EN ACTION. L’électrification des transports implique de revoir nos façons d’alimenter et de propulser nos véhicules, un changement qui repose sur le développement de nouvelles technologies. Mais si certains acteurs du milieu suggèrent de rapidement catalyser l’innovation, l’adoption de ces nouvelles technologies apparaît comme un second défi d’importance. Tour d’horizon.
Dans sa feuille de route pour faire du Québec un leader des transports électriques, « Ambition TEI 2030 », Propulsion Québec dévoue un thème entier à la question de l’innovation. Selon le groupe, qui chapeaute la grappe industrielle des transports électriques et intelligents dans la province, celle-ci a besoin d’une stratégie pour la R-D dans le secteur.
Pour catalyser l’innovation, Propulsion Québec propose plus spécifiquement d’organiser un forum R-D annuel pour le secteur et de développer des outils de soutien et d’accompagnement pour la création de consortiums en R-D.
L’organisme estime qu’il faut également créer des partenariats stratégiques au Canada et à l’international alignés sur certains créneaux porteurs qu’il a identifiés, comme la filière batterie, les infrastructures de recharge et intelligentes, les solutions logistiques de mobilité et les véhicules connectés et autonomes.
Recherche collaborative
Pour Thierry St-Cyr, le président-directeur général d’InnovÉÉ, l’une des meilleures manières de stimuler l’innovation est de miser sur la recherche collaborative, c’est-à-dire sur des projets impliquant un partenaire industriel et un partenaire académique tel qu’un centre de recherche ou encore un professeur. « InnovÉÉ, on est le regroupement sectoriel de recherche industrielle en énergie électrique, alors je prêche pour ma paroisse parce que l’on compte beaucoup sur la recherche collaborative, dit-il. Mais ç’a des avantages indéniables. »
Il divise ces avantages en deux types: ceux qui rapportent à qui les développe, et ceux qui bénéficient plus largement à l’écosystème et à la société.
Parmi les premiers bénéfices, il note que la recherche collaborative permet aux entreprises d’avoir accès non seulement à de l’expertise, mais aussi à des équipements spécialisés. « Ce n’est pas seulement une question de coûts, dit Thierry St-Cyr. Certains équipements prennent des mois, voire des années à obtenir, ce qui peut freiner l’innovation. »
Quant aux seconds types de bénéfices, le président compte le développement de l’expertise, et l’apprentissage collectif à travers les échecs inévitables de certains projets. « Quand une entreprise innove en isolation, si son projet est un échec commercial, personne n’en tire de leçon plus largement, dit-il. Mais dans le cadre de la recherche collaborative, on conserve ces apprentissages au moyen de nos instituts de recherche. »
InnovÉÉ a contribué à divers projets d’innovation comme celui du développement du midibus Letenda, un autobus zéro émission adapté aux personnes à mobilité réduite. Elle a aussi aidé à la création de l’entreprise Calogy Solutions, fondée par des chercheurs de l’Université de Sherbrooke, dans le cadre d’un projet touchant à la gestion thermique des batteries Li-ion.
« La gestion thermique, c’est moins sexy que d’autres sujets liés à l’électrification, reconnaît Thierry St-Cyr. C’est pourtant un enjeu central parce qu’il y a une densité énergétique importante dans un véhicule, et la chaleur peut être difficile à dissiper. »
Il tient Calogy Solutions comme un exemple de réussite sur le plan de l’innovation dans le domaine. « La semaine dernière, ils étaient avec nous en France pour rencontrer différents industriels, dit le président. Ça montre que la recherche collaborative, ce n’est pas juste pour les grandes multinationales. »
Stimuler l’adoption d’innovations
Pour François Adam, le directeur général de l’Institut du véhicule innovant, la nécessité de stimuler l’innovation dans le secteur n’apparaît pas comme une urgence. Non pas que le secteur n’ait pas besoin d’innover — au contraire. Selon lui toutefois, la roue de l’innovation tourne déjà à plein régime et ce qui ralentit l’électrification se trouve ailleurs.
« Je ne suis pas sûr qu’on ait besoin de stimulation, dit-il. Le secteur est en pleine effervescence. Je baigne là-dedans depuis 25 ans, et on a longtemps prêché dans le désert, bien avant que l’électrification ne devienne le sujet de l’heure, mais je n’ai jamais vu autant d’effervescence. »
À son avis, le gouvernement offre un soutien robuste qui a permis notamment d’accélérer le développement de véhicules lourds électriques. Ce qui pose le vrai défi, pour lui, c’est plutôt l’adoption de nouvelles technologies. « C’est pour cette raison que l’on va rencontrer des gestionnaires de flottes de véhicules pour leur expliquer les avantages des véhicules électriques, dit François Adam. On en a rencontré une centaine. Et quand ils font le saut, ils ne retournent plus en arrière. »