DÉVELOPPEMENT PROFESSIONNEL. Souvent comparé à un espace de respiration, un catalyseur ou un accélérateur d’apprentissage, le codéveloppement professionnel mise sur l’intelligence collective pour permettre à un travailleur de progresser. Le principe de cette méthode née au Québec, depuis exportée en France et en Belgique, notamment : réfléchir et s’entraider entre pairs.
Le codéveloppement consiste à réunir régulièrement 6 à 8 personnes — qui occupent des fonctions similaires ou pas, provenant de la même organisation ou non — qui conviennent d’apprendre ensemble et de s’entraider pour améliorer (voire renouveler) leurs pratiques. Adoptée depuis des années par de entreprises comme Metro et Vidéotron, les Villes de Montréal et de Laval ou encore diverses associations professionnelles, cette approche permet également de connecter les participants entre eux, de les rendre plus autonomes et éventuellement de pouvoir contribuer à des transformations dans leur environnement professionnel.
À partir d’un sujet apporté à tour de rôle par l’un des participants, un processus structuré en étapes favorise à la fois la résolution de problème et l’apprentissage. Trois valeurs clés sont constantes dans toute démarche de codéveloppement : la confiance, l’ouverture et la bienveillance.
« Il y a au moins autant de rencontres que de participants, afin de permettre à chacun d’exposer un sujet qui l’habite dans sa pratique », précise Claude Champagne, professionnel en formation et développement qui a développé la méthode dans les années 1990 avec Adrien Payette, professeur à l’École nationale d’administration publique. « Lorsqu’une personne présente son sujet, elle prend la posture d’un client et les autres agissent comme des consultants », résume-t-il.
L’Association québécoise du codéveloppement professionnel (AQCP), regroupant des praticiens qui souhaitent faire rayonner cette approche, recommande que la rencontre soit encadrée par un « facilitateur » formé par ses soins.
L’entraide entre pairs
La première réunion de codéveloppement au sein de l’équipe santé, sécurité et environnement d’Hydro-Québec s’est tenue début juin. « Nous souhaitions instaurer une approche de gestion du changement, explique la conseillère en planification stratégique Mélanie Hotte. Le codéveloppement — qui nous permet de réfléchir ensemble sur certains sujets, projets et défis et de faire part de nos connaissances — nous est apparu comme un choix évident. »
Plusieurs groupes de 6 à 8 personnes, dont des conseillers en planification stratégique et en prévention ainsi que des gestionnaires, se rencontreront toutes les quatre à huit semaines, selon leurs besoins. Mélanie Hotte apprécie cette occasion de ralentir un moment pour aborder les divers changements auxquels l’entreprise doit simultanément faire face.
« Tout va très vite ! Le codéveloppement est à la fois très engageant et gratifiant. Il nous permet de mettre notre expertise au service de nos collègues, décrit celle qui s’attend à un foisonnement d’innovations. Je pense que cette approche est là pour de bon à Hydro-Québec. » Elle reçoit déjà de très bons commentaires des premiers participants.
Des applications variées
Claude Champagne reçoit lui aussi des retours positifs d’entreprises qui utilisent cette méthode. Le Mouvement Desjardins, par exemple, qui a notamment utilisé le codéveloppement pour former de jeunes cadres depuis 2018. Deux facilitatrices y ont constaté son succès tant sur le plan du climat d’entraide qui s’est développé que du recul pris sur les réalités des jeunes gestionnaires. Chez iA Groupe Financier, outre l’appui au développement d’un leadership conscient, le codéveloppement contribue à soutenir la transformation organisationnelle.
« Il existe autant de groupes de codéveloppement que de pratiques professionnelles », assure Chantal Renaud, présidente de l’AQCP. Parmi les thèmes particulièrement en vogue depuis la pandémie, elle note la gestion à distance ou en mode hybride et la gestion du temps.
Elle observe également que les bénéfices de la méthode débordent souvent des thèmes choisis. « On veut par exemple apprendre à gérer une situation problématique ou une préoccupation professionnelle concrète pour finalement découvrir qu’on développe aussi des habiletés relationnelles et des compétences d’écoute, de questionnement et de rétroaction », illustre-t-elle.