DÉVELOPPEMENT PROFESSIONNEL. Près de 85 % des emplois que les apprenants d’aujourd’hui occuperont en 2030 n’ont pas encore été inventés, selon une étude menée par l’Institute for the future pour le compte de Dell Technologies. Dans un marché du travail en constante évolution, acquérir de nouvelles compétences tout au long de la carrière devient une clé pour progresser dans sa carrière, mais aussi pour se maintenir en poste.
« Avec la transformation numérique et l’accélération des changements dans la manière de collaborer ou d’organiser le travail, les spécialistes nous disent que nos compétences deviennent dépassées au bout de cinq ans en moyenne », prévient Manon Poirier, directrice générale de l’Ordre des conseillers en ressources humaines agréés (CRHA). L’époque où l’on se contentait de suivre une formation initiale est donc révolue pour beaucoup de travailleurs. D’ailleurs, les entreprises interrogées par le Forum économique mondial en 2020 estimaient qu’environ 40 % d’entre eux auraient besoin d’un recyclage d’une durée de six mois ou moins d’ici 2025.
Levier de développement
« La formation continue est d’une grande importance pour maintenir des équipes de travail innovantes et demeurer à l’avant-garde dans notre domaine », affirme Hélène Beaulieu, directrice des ressources humaines pour l’Est du Canada de la firme de génie-conseil et de gestion de projet Hatch. L’ensemble des employés y ont accès à de la formation en cours d’année dans des domaines variés allant des systèmes informatiques au leadership, en passant par la gestion de projet.
Mouhssine Marrakchi dirige les ressources humaines de Renaissance depuis 13 ans. L’organisation montréalaise de 167 personnes qu’il appelait par leur prénom en rassemble aujourd’hui 1 200. « Les besoins et les niveaux de compétence pour accompagner ce développement ne sont pas les mêmes », lance celui qui a suivi avec son équipe de direction une formation d’un an en « agilité du leadership » auprès de l’organisme Unique coaching en 2019-2020. « Elle m’a permis de travailler sur moi-même en apprenant à déléguer, à responsabiliser et à faire des suivis. Elle m’a aussi donné des outils de communication », résume-t-il. Convaincus par les résultats, Mouhssine Marrakchi et ses collègues sont retournés se former cinq jours chez Unique coaching par la suite pour « maintenir la formation vivante » en apprenant à animer eux-mêmes un programme de leadership agile déployé au sein de leur organisation.
Des formats variés
« Il ne faut pas croire qu’il faut s’arrêter de travailler pour retourner sur les bancs de l’école », rassure Manon Poirier. Les moyens de se former en continu sont variés. « On peut le faire de manière traditionnelle en classe, mais cela se fait aussi beaucoup en ligne », rappelle celle qui observe une tendance au microapprentissage (microlearning) et aux formations courtes accessibles en tout temps.
« Il y a cinq ans, on nous demandait si nous pouvions condenser une formation de deux jours en une journée. Aujourd’hui, on nous demande parfois de l’organiser en deux séances de deux heures chacune », observe pour sa part Geneviève Brouillette, directrice d’ÉTS Formation, le service de perfectionnement et de formation continue de l’École de technologie supérieure. L’approche sur mesure en entreprise permet d’offrir cette souplesse, de personnaliser la formation avec les outils de l’entreprise et de l’adapter à une clientèle précise. Résultat : leur programme « Gestionnaire performant » a par exemple connu une croissance de 650 % en cinq ans.
La plateforme de formation Boomrank, qui a constaté un « regain spectaculaire des activités de formation » en 2021 dans son Baromètre de la formation continue au Québec, a compté le nombre de recherches effectuées par les organisations auprès des quatre grands acteurs de ce marché. Les entreprises privées sont en tête (46 %), suivies par les cégeps (31 %), les universités (22 %) et les organismes et comités sectoriels.
Les cégeps proposent depuis l’an dernier de courts perfectionnements crédités pour les personnes sans emploi et des certifications collégiales pour les personnes en emploi. « Ces formations certifient auprès des employeurs l’acquisition des nouvelles compétences, et non uniquement la participation », souligne Jean-François Roulier, directeur adjoint à la formation continue et au développement au Regroupement des cégeps de Montréal.
Des coups de pouce financiers
Pour accompagner la transformation des entreprises et les aider à renforcer leurs compétences, la formation continue est encouragée par certains programmes d’aides. Sur le site montezdeniveau.ca, des perfectionnements crédités ou programmes de formation financés par le gouvernement du Québec, à temps plein ou partiel, sont répertoriés. Ils s’adressent en priorité aux personnes résidant ou travaillant sur l’île de Montréal.
Le gouvernement accompagne aussi la mise en place de mutuelles de formation, qui permettent aux PME de se regrouper pour réduire les coûts. D’autres initiatives offrent un coup de pouce appréciable, comme celle de la supergrappe canadienne Scale IA, spécialisée en intelligence artificielle, qui finance jusqu’à 85 % des projets de formation sur mesure dans le domaine.