Le concepteur et fabricant de luminaires DEL à haut rendement Lumenpulse (Tor., LMP, 12,52 $) a beau produire des résultats record, les investisseurs en veulent toujours plus.
Malgré un bond de 72 % de ses revenus, un bénéfice ajusté de 0,09 $ par action et une marge brute de 52,4 %, sans l'effet des acquisitions, son action reste de glace au premier trimestre.
Après avoir perdu 37 % depuis un an, le titre se situe autour de 13 $, un cours en deçà de son prix d'émission de 16 $ et loin du sommet de 20,49 $ atteint en septembre 2014, cinq mois après une entrée en Bourse palpitante.
Kris Thompson, de la Financière Banque Nationale, résume bien la dynamique boursière du titre de la société de Montréal. «Les investisseurs ont moins d'appétit qu'avant pour les PME à forte croissance, dont la performance est volatile d'un trimestre à l'autre. Ils préfèrent les sociétés dont les résultats sont plus visibles et plus réguliers», explique-t-il.
Il faut dire que la marche est haute pour satisfaire des investisseurs pressés lorsqu'on fait ses premiers pas en Bourse avec un multiple d'évaluation de 5 fois ses revenus.
Pas l'accélération souhaitée
Au premier trimestre, ce sont les revenus stables des luminaires Lumenpulse du quatrième trimestre de 2015 au premier trimestre de 2016, sans l'effet de change, qui ont attiré l'attention.
«La progression annuelle des ventes est vigoureuse, mais elle ne s'accélère pas de trimestre en trimestre, tel que le prévoyait notre modèle d'évaluation», indique M. Thompson, qui diminue son cours cible de 22 à 18 $.
Les ventes à l'extérieur de l'Amérique du Nord ont aussi reculé de 43 %, sans l'effet des acquisitions, à cause de la réalisation d'un important contrat au Moyen-Orient un an plus tôt et du report de certaines commandes.
Autrement dit, il faut donc que la société croisse assez pour rattraper son évaluation, dans le jargon des analystes.
De plus, les dépenses d'exploitation ont bondi de 48 % depuis un an, soit une cadence plus rapide que la hausse de 44 % des revenus, sans l'effet de change.
Une croissance aussi rapide requiert des investissements, reconnaît l'analyste, mais la hausse des dépenses du premier trimestre l'incite à plus de prudence à court terme.
Enfin, le bénéfice ajusté par action de 0,03 $ par action, sans l'effet de change, a été de moitié inférieur au consensus des analystes.
Sans les dépenses non récurrentes, la marge d'exploitation de 6,3 % du premier trimestre a tout de même été à la hauteur des attentes de M. Thompson. Les dirigeants ont promis de porter cette marge à 18-20 % d'ici 2019.
Jed Dorsheimer, de Canaccord Genuity, tempère aussi son cours cible de 21 à 16 $, mais recommande toujours l'achat du titre. «Vu la marge brute élevée du premier trimestre, nous regagnons confiance dans la capacité de la société de récolter les fruits de ses investissements», note-t-il.
Le bond trimestriel de 64 % des revenus des principaux produits ainsi que la marge brute élevée redonnent de la crédibilité à ses ambitieux objectifs à long terme, écrit pour sa part Ben Holton, de RBC Marchés des Capitaux. Son cours cible passe de 25 à 23 $.
Le plan d'action avant tout
Rencontrés à la deuxième assemblée annuelle de la société, le fondateur et pdg François-Xavier Souvay et son chef de la direction financière, Robert Comeau, font peu de cas de cette dynamique purement boursière.
«Il est dangereux de perdre le point focal quand on se préoccupe du cours de l'action. Nous gérons l'entreprise en fonction de notre plan d'action, qui fonctionne comme prévu. Tôt ou tard, nos réalisations se répercuteront sur notre valeur en Bourse», a confié M. Souvay. L'entrepreneur de 45 ans ne regrette aucunement son entrée en Bourse, qui a fourni à sa société un capital de croissance de 115 millions de dollars.
Il souligne que Lumenpulse, qui configure et assemble des luminaires dans ses locaux du quartier Griffintown, dispose d'une capacité manufacturière d'environ 300 M$, soit le triple des revenus affichés en 2015.
M. Comeau rappelle aussi qu'en 18 mois, Lumenpulse a presque déjà atteint certains des objectifs qu'elle s'était fixés pour 2019.
Ainsi, au premier trimestre, sa marge brute a atteint 47,2 %, ce qui n'est pas bien loin de l'objectif des 50 % promis d'ici quatre ans.
La structure de coûts fixes devrait rester stable à l'avenir, ce qui lui procurera un énorme levier de rentabilité à mesure que les revenus augmenteront, a expliqué M. Comeau, qui prendra sa retraite à la fin de l'année.
«Les investisseurs constateront tout notre potentiel quand ils verront notre marge d'exploitation s'améliorer au cours des prochains trimestres», dit-il.
Les dépenses de rémunération et les commissions aux agents et aux revendeurs augmentent, mais cela reflète la hausse des ventes et des marges, ajoute celui qui deviendra en 2016 un conseiller. Il concentrera ses efforts sur diverses initiatives clés, dont les acquisitions.
Le début d'un long parcours
L'optimisme des dirigeants ne tient pas qu'à l'enthousiasme propre aux entrepreneurs. Il repose aussi sur une foule de moyens entrepris pour capter les occasions qui se présentent et relever les marges.
Pour soutenir la croissance, M. Souvay a recruté en juin Marc Filion au nouveau poste de chef de la direction commerciale. L'ex-dirigeant de Telus Santé et de BCE Emergis «met déjà à profit son savoir-faire en commercialisation pour aider les équipes à élever leur jeu à un autre niveau», dit-il.
Après avoir renforcé sa chaîne d'approvisionnement et automatisé certaines fonctions d'assemblage, Lumenpulse a raffiné ses procédés avec l'aide d'un expert externe. La petite rationalisation a entraîné l'abolition de 20 postes et devrait dégager des économies annuelles de 2,1 M$.
Pour percer plus rapidement le marché nord-américain des détaillants et des hôtels, qui a fait le succès de sa filiale britannique AlphaLED, Lumenpulse a instauré une structure de comptes majeurs, dont les retombées apparaîtront progressivement. L'entreprise réduit aussi ses coûts d'approvisionnement et augmente certains prix de vente, en ajoutant ses technologies brevetées aux gammes de luminaires qu'elle a acquises.