EXPERT INVITÉ. Nous nous réveillons aujourd’hui dans une situation identique à celle d’il y a 50 ans. On apprenait l’automne dernier, lors du dévoilement du plan stratégique d’Hydro-Québec, qu’il fallait massivement investir pour doubler nos capacités de production afin de répondre à la croissance économique et atteindre nos objectifs de carboneutralité d’ici 2050. L’histoire qui se répète, mot pour mot… Ça ne s’invente pas!
Il y a cependant un problème à l’horizon. Il ne reste sur notre territoire que des rivières représentant un potentiel hydroélectrique modeste et le seul réel projet d’envergure que nous avons actuellement est un méga parc éolien occupant une superficie équivalente à 15 fois l’île de Montréal! Je ne sais pas vous, mais moi, je me pose exactement la même question que Jean-Paul Gignac. Devrions-nous rouvrir le débat sur la diversification de nos moyens de production?
En nationalisant la production et la distribution de l’électricité, nous avons fait le choix de miser sur la force naturelle que nous avions, soit notre immense potentiel hydroélectrique. Au fil des années, Hydro-Québec a réussi avec brio à exploiter notre territoire afin de bâtir, notamment, une soixante de centres hydro-électriques produisant une électricité abordable et verte tout en jouant un rôle central dans le développement économique de notre province.
Sommes-nous maintenant rendus à l’heure de la révolution énergétique?
Le risque du nucléaire?
Je me pose la même question que vous. Le risque en vaut-il la peine?
Il existe bel et bien des risques inhérents à la production d’énergie nucléaire, de la fabrication d’armes de destruction massive au risque d’accident, en passant par les défis de l’entreposage des déchets nucléaires.
Mais je me pose la question: est-ce plus risqué d’utiliser une énergie propre comme le nucléaire, malgré tous les risques associés, pour atteindre nos objectifs de décarbonation ou de continuer à utiliser des énergies fossiles en espérant un miracle?
James E. Hansen, — réputé chercheur, activiste climatique et ancien dirigeant de la Goddard Institute for Space Studies de la NASA — observe dans une étude qu’en analysant le nombre de décès par 1000 térawattheures produits (unité de mesure de production d’électricité), l’énergie nucléaire est la moins dangereuse de toutes. En prenant en considération les décès reliés autant aux accidents qu’à la pollution générée, il décrit que le pétrole, le charbon, le gaz naturel, l’hydroélectricité, le solaire ainsi que l’éolien sont tous plus mortels que le nucléaire.
Mais dans l’imaginaire collectif, une mort suivant un accident nucléaire comme celui de Tchernobyl, est plus marquante qu’une mort causée par une affection pulmonaire ou un cancer lié aux polluants dans l’air.
Et les avantages alors?
Hydro-Québec a exploité Gentilly-II pendant une trentaine d’années sans incident majeur. Son coût de production est comparable aux autres sources d’énergies renouvelables, et l’énergie nucléaire n’émet aucun gaz à effet de serre lors de la production d’électricité. Comparativement à l’éolien et au solaire, elle peut produire de l’électricité 24h sur 24h et 7 jours sur 7.
Je comprends l’hésitation et même le refus de certains de rouvrir ce débat. Le nucléaire a toujours été un sujet délicat et les opinions se sont solidement ancrées au fil des années. Cela étant dit, il est important de prendre un pas de recul, de mettre de côté la dimension émotive qui entoure le sujet et de sérieusement étudier la question.
La production d’électricité au Québec est à la croisée des chemins et nous devons prendre aujourd’hui des décisions dont nous subirons les conséquences pour les 50 ou 75 prochaines années. Pour tout vous dire, mon opinion n’est pas encore faite. Cependant, je tiens absolument à ce que l’on prenne le temps d’analyser toutes les options possibles avant de prendre une décision qui marquera l’avenir et l’histoire du Québec.
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