Récemment, une collègue m’a parlé d’une situation de laquelle elle a été témoin et concernant une succession où plusieurs legs particuliers devaient être payés à partir d’actifs liquides et non liquides. La complexité de cette situation vient du fait que les actifs non liquides sont souvent très difficiles à convertir en liquidités pour effectuer les paiements nécessaires et couvrir les dettes du règlement de succession.
En général, les gens lèguent leurs avoirs de deux façons, soit par des legs particuliers, lorsque quelqu’un laisse un objet ou un montant particulier à une personne précise, ou encore par des paiements résiduels, lorsque l’héritage est d’abord utilisé pour payer les dettes, les impôts ou tout autre paiement s’imposant avant que le reliquat soit versé à l’héritier résiduel.
Dans l’histoire de ma collègue, la défunte a laissé une liste de legs particuliers à faire à différents amis, membres de la famille et organismes de bienfaisance, pour finalement léguer le reliquat à son fils.
En réalité, elle a laissé un montant de 10 000$ pour 10 légataires différents. Cependant, 100 000$ auraient été nécessaires pour couvrir ces legs particuliers inscrits à son testament. En plus de ces paiements, les frais funéraires totalisaient 15 000$, la dette fiscale, 3000$, divers frais pour la gestion de la succession s’élevaient pour leur part à 1500$ et finalement, il fallait débourser 4800$ pour régler le solde d’une carte de crédit. Il faut des liquidités pour couvrir ces frais!
Vous aurez deviné que dans ce cas, le problème qui se posait était le suivant : la somme des montants à débourser pour le règlement de la succession dépassait sa valeur en liquidité. La succession était solvable, c’est-à-dire que sa valeur en actif dépassait le passif, mais il n’y avait pas assez d’actifs liquides. En conséquence, le fils de la défunte avait une décision difficile à prendre.
En effet, sa mère avait un chalet au nord de Montréal, ainsi que 120 000$ dans son compte de banque. La succession valait donc environ 370 000$ au total. Si l’on considère ce montant, les dettes et legs pourraient être payés sans problème. Le problème, c’est que le fameux chalet avait une valeur émotive très importante pour le fils de la défunte, et il n’était pas question qu’il le vende pour payer les dettes laissées par sa mère. Le fils se retrouvait donc devant une impasse : comment payer les legs, les dettes tout en gardant le chalet?!
Pour éviter ce genre de situation à votre décès, il s’avère judicieux de dresser l’inventaire complet de vos actifs et de vos dettes afin d’avoir une vision d’ensemble de la valeur de votre succession. De plus, assurez-vous de connaître les intentions de vos héritiers quant à la gestion de vos biens (vente ou non, par exemple), afin de pouvoir en tenir compte lors de la rédaction de votre testament.
Dans cette histoire, le fils était tellement déterminé à garder le chalet qu’il a décidé de payer lui-même les sommes dues. Avec les 120 000$ du compte de banque de sa mère, il a payé ce qu’il pouvait des legs particuliers et des dettes, après quoi il s’est vu obligé de débourser environ 4300$ de sa poche pour combler le manque de liquidités de la succession, sans vendre le chalet.
Je doute fort que ce soit ce que sa mère avait prévu. Ce genre de situation survient souvent lorsque nous ne révisons pas régulièrement notre bilan financier, et donc que nous n’ajustons pas notre planification successorale au cours de notre vie.